Ça fait mal ! [Red]


Suite à l'assaut sur Marine Ford...

Olek se réveilla, les paupières lourdes et douloureuses, comme tout le reste son corps. Il voulut bouger, mais un éclair vivide de douleur lui arracha un hoquet de surprise et le cloua au lit. Il sombra une énième fois dans l'inconscience, son système nerveux incapable de résister à la puissance du lancinement incessant de ses blessures. Le colosse, aux portes de la mort, refusait de les ouvrir, cherchant courageusement à revenir à la surface, à remonter ce fleuve de tourments à la seule force de son mental. Quiconque s'asseyait à son chevet y verrait une ressemblance frappante avec celle d'un cafard écrasé ou d'un serpent décapité, continuant à ramper, à respirer et à gesticuler sans savoir que son corps avait déjà rendu l'âme depuis longtemps.

Il se rendit rapidement compte qu'il était incapable de nager au-delà des courants du Styx, le fleuve des Enders. Le blessé, épuisé et au teint aussi pâle que le fion d'un albinos, ne se réveillait plus que rarement et à chaque fois, son corps s'affaiblissait davantage. La fièvre le faisait délirer, l'empêchait de guérir et le gardait enchaîné à des meurtrissures qui lui suçaient la vie jusqu'à la lui vider entièrement. Olek ne dut sa survie qu'à deux hommes, dont il discernait vaguement les visages à travers le voile opaque imposé par sa condition morbide. Red et Reyson, l'un qu'il détestait, l'autre qu'il connaissait à peine.

Les premiers jours, il mit ces visions sur le compte de la fièvre, les considérant comme de simples hallucinations. Il finit par se rendre compte que leur passage était souvent suivi de brefs moments salvateurs de paix et de lucidité, comme si sa douleur s'endormait quelques temps, comme si cette damnée Mort s'autorisait une pause clope avant de recommencer à lui ronger la moelle. Dans ces rares moments, les souvenirs récents de Marine Ford ressurgissaient dans son esprit aussi torturé que le reste de son corps. Il comprenait alors qu'il ne rêvait pas, que Red était bien venu le sauver de la potence, avec toute son armée.

L'homme qu'il avait aimé comme un deuxième père et détesté plus que quiconque était sorti de sa cachette, avait déclaré la guerre au monde entier pour le récupérer. Olek ne savait ni quoi faire de cette information, ni de la myriade d'émotions contradictoires qui en découlaient et qui le tourmentaient autant que ses blessures physiques. Le colosse finit par réaliser qu'il ne pouvait, dans tous les cas, pas faire grand-chose, là, à moitié mort au milieu de nulle part et à la merci de ses protecteurs. Le mieux qu'il pouvait faire était de fermer sa gueule et d'accepter sa misérable situation, conséquence de sa propre faiblesse. Et c'était bien ça qui faisait le plus de mal. Ça et le fait de ne plus rien sentir au niveau de sa jambe droite, là où tout le reste de son corps semblait à vif.

Lors d'un de ces moments de clarté, Olek laissa échapper un ricanement moqueur d'auto-dérision, en même temps, Red poussait le battant de la porte de sa chambre pour entrer.
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- Salut gamin. ça fait longtemps.

Longtemps oui. Un mot tellement pratique pour résumer les vies entiéres qui séparent le présent de notre dernière rencontre, la bas en Amerzone.

A l'époque j'étais encore un agent du Cipher Pol. le genre de salopard discipliné, amoral et meurtrier qui s’assurent de la survie a n'importe quel prix du gouvernement mondial. J'ai beaucoup cherché mais je n'ai jamais trouvé d’allégorie qui convienne mieux au boulot d'agent que celui d'égoutier. On se farcit le nettoyage des conduits d'ordures que personne ne veut voir, on s'assure que la merde et la puanteur qui pourrissent les entrailles du GM restent loin des yeux et de l'odorat des gens bien. La vraie désignation de la fiche de poste d'un agent c'est faciliter le transit intestinal de la grande carcasse pourrissante qu'est le Gouvernement mondial.

J'étais un agent et je regardais le père d'Olek se faire exécuter par la marine, découpé par l'amiral Tetsuda en personne, pendant que moi, planqué et chiant de trouilles je me contentais de ne sauver que le fils de mon plus vieux pote tout en me persuadant que c'était déjà bien assez, que c'était suffisant. Inutile de dire que l'avis n’était pas partagé par le tout nouvel orphelin...

Après ça le boulot n'avait plus le même gout, je revois ces années grises, mortes, vides, ou seule la peur d'en finir m'empéchait de me coller proprement une balle dans le crane pour sortir du jeu.

Et puis il y a eu la marine, une nouvelle chance, une nouvelle vie, Les Sea Wolfs, Rachel, une année de feu et de poudre sur la quatrième voie, et puis la chute, encore.

Dans les romans héroiques que je le lisais étant môme, on disait que l'important c'est pas le nombre de fois ou on tombe, mais le nombre de fois ou on se relève. Avec le temps je ne suis plus vraiment convaincu, mais je me relève toujours, ça doit être l'habitude.

Ou les mains qu'on me tend.

La dernière fois que j'ai croisé Olek c'était il y a dix ans. Dix ans qui ont fait d'Olek une étoile filante qui vient de se carboniser les ailes sur la dure réalité de la route de tous les périls. Dix ans pour me souvenir des promesses faites à un vieil ami condamné, et pour échouer à les honorer.

Et pendant que je regarde Olek qui lutte pour sa survie sur son lit de douleur, agonisant, mutilé, c'est le visage de Druss que je vois couché la pour me juger.

Je suis désolé Druss.

J'ai essayé et ça n'a pas suffit.




Dernière édition par Red le Lun 9 Oct 2023 - 17:10, édité 1 fois
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- Salut Red.

Une intonation plus froide qu'il ne l'avait voulu et un regard qui aurait pu réveiller un mort. Olek ne savait comment réagir face à la situation et n'en avait surtout pas la force. Il était vaincu, humilié et détruit sur bien trop des niveaux. Une partie de lui voulait continuer à haïr l'homme en face de lui, tandis que l'autre était prête à le prendre dans ses bras et lui dire merci. Au final, l'amertume qui lui rongeait l'âme prit le dessus et il ne put s'empêcher de lâcher pathétiquement :

- À croire que Testuda avait raison. Il n’y a pas grand-chose d'autre qui coule dans mes veines que de la merde.

Il regretta immédiatement sa phrase et se détesta un peu plus. L'autoflagellation, le fait de se faire passer pour une victime, prouvait qu'il venait à l'instant même de toucher le fond d'un gouffre dont il risquait de ne plus jamais trouver la sortie s'il continuait ainsi. Énervé contre lui-même, il refusa de laisser Red le voir dans cet état lamentable plus longtemps. Pour faire bonne figure et se donner du courage, le colosse démembré se redressa misérablement sur son lit en s'aidant de ses moignons. Il luttait rien que pour garder le dos droit et ne pas perdre connaissance. Ils restèrent ainsi, sans bouger, jusqu'à ce qu'Olek n'en puisse plus du silence. Incapable de déchiffrer le regard de son aîné, il parvint à trouver l'énergie de faire un trait d'esprit en tendant son bras.

- Je t'aurais bien serré la main, mais...

Piètre tentative de réconciliation. Parce que oui, Olek était conscient qu'il ne devait sa survie qu'à Red, que l'attaque sur Marine Ford avait été un coup de théâtre monumental et un risque pour le moins inconsidéré. Sa vie ne valait pas celle des centaines d'autres perdues lors de l'assaut, mais questionner son sauveur sur les raisons de son acte était aussi inutile que ridicule. Le blessé savait, il le savait depuis le jour où son père était mort.

Red n'y était pour rien, il avait souffert autant que lui, si ce n'était même plus, de sa faiblesse et de son inaction. Mais le gosse qu'il était à l'époque avait besoin d'un coupable, de jeter la pierre sur une personne plus facile à atteindre que la toute-puissance représentée par Testuda. L'impossibilité de revenir en arrière et le temps passé avaient érigé un mur de barbelés infranchissable entre eux, que Red avait finalement explosé de ses propres mains en vengeant le père et en sauvant le fils. Par delà sa rage et face à la vérité, Olek libéra du plus profond de son être fissuré un sentiment désagréable qu'il ne pensait pas être capable de ressentir :  la honte.  
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- Tetsuda est mort. Et c'était le même connard que le jour ou il a tué Druss. Alors son avis...

Olek se redresse, et comme prévu c'est moche, très moche. Reyson m'avait prévenu, pour l'instant il est en vie, mais si diminué que ce n'est pas sur qu'il considère que ça en vaille la peine. Quelque part j'espérais qu'avec le pouvoir d'un logia il s'en tirerait mieux que ça, mais le haki remet tout le monde au même niveau. Olek n'a plus de mains, plus de pieds, un corps qui n'est que blessures, et il n'y a guère qu'en le comparant à Ace revenant de Marinford qu'on peut considérer qu'il s'en est bien tiré.

- Et je serais bien arrivé plus tôt mais...

Son pouvoir est toujours la évidemment, je le sens. Mais si le logia du feu vend du rêve sur le papier, c'est sur que pour compenser une perte générale de membre il est vachement moins pratique qu'un truc comme la glace. Est ce qu'on peut seulement manipuler les pouvoirs d'un logia quand on a plus un membre valide ?

J’attrape une chaise pour m’assoir en face du môme. Je sens son regard brulant qui me fixe, son esprit qui lutte pour ne pas penser aux blessures qui le condamnent quasiment à n’être plus rien, le contrôle qu'il s'impose pour ne pas laisser transparaitre tout ce qui lui traverse le crane, sa colère de s’être fait piéger et blesser, la douleur qui lui ronge le corps, la honte brulante qu'il ressent d'avoir été sauvé par un homme qu'il a passé des années à haïr, et plus loin, derrière toutes ses pensées, celle sur laquelle il évite de se tourner, la peur panique de vivre désormais dans un corps incapable de quoi que ce soit...

- C'est bien que tu t'en sois sorti.


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- Tu appelles ça s'en sortir ?

Olek ricana, mais le son qui sortit de sa bouche, transformé par la douleur et l'auto-dérision, se rapprochait plus du gémissement qu'une expression de joie. Il en avait cependant fini avec son rôle de victime. Son regard avait retrouvé sa flamme d'antan, ou du moins un début d'étincelle. Son père avait été vengé par un autre que lui, et même s'il avait du mal à l'admettre, il n'aurait pas pu espérer mieux. Par ce geste, Red venait de lui retirer non pas une épine du pied, mais une lame rouillée en plein cœur. Il y avait un symbole, un sens à cette action. Le colosse lui en serait éternellement reconnaissant, et sa haine d'autrefois se transformait timidement en gratitude. Lui qui détestait compter sur les autres, le voilà avec une dette de sang sur le dos qu'il mettrait probablement toute sa vie à rembourser. S'il parvenait d'abord à renaître de ses cendres.

- J'imagine que c'est toujours mieux que la mort. Puis il faut voir le bon côté des choses, il me reste toujours ma jambe principale, celle du milieu !

Sa petite blague salace s'ensuivit d'un clin d'œil complice. Il semblait qu'Olek aille déjà mieux, mais sa petite tentative de bluff ne fonctionna pas sur le vétéran qu'était Red. Son sourire disparut, et son visage se referma rapidement alors qu'il tentait de mettre de l'ordre dans ses pensées et d'imaginer un futur.

-Tu sais quoi ? Je pensais qu'une fois ce bâtard de Tetsuda mort, la rage que j'ai en moi se calmerait au moins un peu...

Pour appuyer ses propos, il transforma sa main mutilée en une torche qui vint éclairer la pièce et faire danser les ombres. La pièce prit instantanément quelques degrés, ce qui ne sembla pas impacter les deux hommes. Olek, le regard figé dans les flammes, reprit la parole.

- Ce pouvoir me sied à merveille, il correspond parfaitement à l'enfer dans lequel brûle mon âme et celles de mes victimes.

Une bien belle phrase sortie de la bouche d'un type à moitié mort. La fatigue eut raison de lui, et le feu s'éteignit subitement. Le colosse, incapable de tenir plus longtemps, s'effondra dans son lit. Des gouttes de sueur perlèrent de son front, et des frissons le parcoururent malgré la chaleur qui régnait dans la chambre. Le blessé réussit à articuler quelques mots dont il n'entendait pas la réponse, emporté par l'ivresse de la douleur dans un sommeil qu'il espérait réparateur.

- Tu crois que je pourrais un jour repartir à l'aventure ?

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- Tu ne te souviens pas des leçons de l'Amerzone ? Tout ce qui ne tue pas profite. Et t'es pas mort... Et une fois qu'on a évité ce faux pas, il y a un paquet de moyens de s'en remettre, pour peu qu'on ait les bons contacts...

Et je sais de quoi je parle, après tout j'ai été manchot avec un bras coupé au niveau de l'épaule, et maintenant je vais mieux. Quand on connait les bonnes personnes, les bons pouvoirs, et qu'on a les moyens de se les offrir, la vie reste une charogne prête à vous en faire baver, mais s’avère aussi tout à fait corruptible.

- Le feu qui brule ton âme hein ? J'ai pas l'impression que tu ais appris à réfléchir avant de tout casser, mais au moins t'as du apprendre à lire, c'est pas mal. T'as tiré un chouette pouvoir aussi ouais, le logia du feu se traine une sacré réputation, plutôt méritée, avant même que tu saches l'utiliser il a bien failli te faire buter deux fois. Mais par rapport à Ace tu t'en tires bien.  

Je me demande s'il sait pour Kiyori et le fruit que j'ai du lui donner pour éviter qu'il ne fasse que survivre à la marine pour se faire buter par des pirates. Probablement pas. Je n'ai pas réussi a en apprendre beaucoup sur son parcours sur les Blues depuis que nous nous sommes quittés, juste ses coups d'éclats sur Grand line. La route de tous les périls a le don de chauffer les sangs, et ce n'est pas pour rien qu'on parle de supernova pour les pirates qui montent, la plupart ne font que briller brièvement avant d'exploser en vol. Et Olek....

Olek n'a jamais gagné qu'une seconde chance...

- Je ne suis pas venu te proposer une balle dans le crane et une mort rapide. Je connais quelqu'un qui pourra peut être te soigner. Et sinon, il reste toujours le choix du chrome, la marine fait des membres mécaniques encore mieux que les vrais.

La seule chose qui peut t’empêcher de repartir, c'est ce qu'il se passe dans ta tête.


Au final on en revient toujours au même point, l'important c'est pas le nombre de fois ou on tombe, c'est le nombre de fois ou on se relève.


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Après sa discussion avec Red, Olek s'était muré dans un silence grincheux. Incapable de répondre, il avait prétexté ses blessures pour se reposer et lui tourner le dos. L'empereur, loin d'être dupe, s'était contenté d'un signe de tête compréhensif avant de disparaître. La difficulté résidait dans le fait de proposer de l'aide à une personne réticente à la recevoir. Accepter la main tendue de Red, bien que considéré comme un démon par le reste du monde, était pour le colosse l'opposé d'un pacte avec le diable. Il aurait préféré vendre son âme à Satan plutôt que de devoir une nouvelle fois compter sur l'homme pour qui lui sauver la vie devenait un hobby.

Aidez quelqu'un une fois et il vous en sera reconnaissant, sauvez lui la vie et il vous en sera éternellement redevable. Continuez à le faire et vous lui ôterez paradoxalement toutes raisons de vivre. Olek buté et déboussolé se morfondait dans un schéma de pensées erroné qui lui permettait, à défaut de renaître, de s'accrocher aux lambeaux de sa fierté déplacée. Son identité s'était brisée en même temps que son corps, ses rêves de grandeur n'étaient que les caprices d'un gosse qui refusait de grandir, son désir de vengeance rien d'autre que les baragouinements d'un faible. Le retour à la réalité faisait mal, et certaines vérités étaient impossibles à surmonter tant elles nécessitaient une profonde remise en question.

D'aussi longtemps qu'Olek puisse se souvenir, Red n'avait jamais rien attendu en retour de son incessante bienveillance. S'occupant d'Olek comme s'il était son propre frère, vengeant Druss comme son propre père. Cette seule évidence détruisait toutes ses vaines tentatives de le tenir pour responsable de son malheur, de sa propre incapacité. L'énigme représentée par Red et ses actions surpassait la dépression qui étranglait Olek depuis des semaines. Lui qui passait son temps à hanter les couloirs et les rues d'Armada en claudiquant sur sa jambe de bois, qui sifflait des bouteilles de rhum tremblotantes entre ses moignons jusqu'à s'endormir dans son vomi, se rendit compte de la futilité de sa vie, de son ridicule combat terminé avant même qu'il ne commence. Là, fixant les cieux assombris par les feux des forges travaillant nuit et jour, vautré dans sa misère, il prit enfin une décision.

Après mûre réflexion, ou plutôt pourrie tellement elle était mûrie, le colosse débarqua à l'improviste dans les quartiers de Red, explosa la porte de sa chambre d'un coup de pied enflammé et claqua son échasse sur le bureau envahi de missives. L'effort que ce petit numéro lui demanda le fit transpirer à grosses gouttes qui vinrent noyer l'encre encore fraîche d'une lettre en cours de rédaction. D'abord insolent, Olek plongea son regard dans celui de l'empereur jusqu'à en devenir nostalgique. Son visage qu'il voulait garder de marbre se fissura pour laisser place à un large sourire, espiègle et sans pitié, le même qu'il affichait le jour de leur rencontre.

- Bon, je suis prêt Red, guéris-moi. J'ai trop réfléchi, ça m'a fait mal au crâne, mais j'ai compris un truc. Je ne vaux rien, alors donne-moi de la valeur !

Imperturbable, Red ne bougea pas, continuant à le fixer adossé dans son fauteuil en cuir. Olek était aussi imprévisible que l'empereur sagace. Une odeur de brûlé vint leur piquer les narines et la fumée irrita leurs yeux tandis que la porte derrière Olek s'embrasait dangereusement.

- Quoi ? T'as pas compris ? Je te dis que je veux être ta pute ! Moins le sexe, je ne suis pas encore de ce bord-là ! Je veux que tu serves de moi pour réduire en cendres tes ennemis, et même tes amis si l'envie t'en prend ! Tu penses peut-être que tu n'as pas besoin de moi, après tout j'ai vu de quoi tu étais capable, mais tu ne peux être à plusieurs endroits à la fois. Alors utilise-moi et donne un sens à ma vie ! Vois-moi comme ton Buster Call personnel.

Le colosse se surestimait sans aucun doute, mais l'idée n'était pas mauvaise, et son potentiel, en adéquation avec sa loyauté, était illimité.
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C'est la deuxième fois que le logia du feu vient cramer mes locaux. J'aurais du être pompier...

- Tu m'emmerdes Olek. Tu comprends rien.

Et moi, moi je ne sais pas expliquer ce que je ressens, ce que je veux faire comprendre. J'ai essayé, mais ça ne marche jamais, dés que c'est important, il suffit que j'essaye de dire clairement quelque chose pour que les gens a qui je parle comprenne exactement l'inverse. Et ça ne rate tellement jamais que j'en viens à préférer souvent fermer ma gueule. Se contenter d'écouter, laisser l'autre se répandre en gardant un silence ténébreux. Mais avec l'empathie qui vient vous donner l'impression de savoir ce qui se passe dans le crane de l'autre, c'est dur de fermer sa gueule...

- Je suis pas venu te chercher pour que tu m'obéisses, ou pour pouvoir utiliser ton pouvoir comme si c'était le mien...

Et bim, je n'ai pas plus tôt ouvert la bouche que l'empathie me signale que je fais fausse route. Dans le crane d'Olek il n'y a aucune place pour ce que je voudrais dire, pour tenter de lui faire comprendre qu'au milieu d'une vie jonchée de cadavres, de trahisons, et de saloperies qu'un môme comme lui n'imagine même pas, se ménager de petites traces d'humanité est la manière la plus simple de pouvoir continuer à se regarder dans une glace sans y voir le dernier des monstres. Que ces moments volés au cipher pol avec lui et son père, c'était ce qui permettait de ne pas simplement me mettre une balle dans le crane pour en finir, une façon de tricher avec moi même, en me disant qu'au fond, quelque part, certaines de mes actions faisaient encore de moi un type bien. Et qu'aujourd'hui, ces choses la sont toujours aussi importantes, quelles que soient ce qu'elles peuvent me couter...

Mais je ne sais pas comment lui dire ça...

- Je préférerais retrouver mon frère. C'est à lui que je peux me fier et dont j'ai besoin. Et c'est lui que je suis venu chercher quand il a eu besoin qu'on lui tire les couilles des ronces.

De ma main posée sur le bureau coulent des volutes de liquide noire, se répandant sur le meuble en noyant les flammes qui commencent à gagner les papiers.

- Je vais faire prévenir l'Abbé, il s'occupera de toi. Et ensuite, tu feras ce que tu voudras.


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"Frère", un mot lourd de sens, surtout lorsqu'il sortait de la bouche d'un homme avare en sentiments. Olek était si obtus qu'il forçait son aîné à énumérer des vérités pourtant flagrantes. Oui... Des sbires, des hommes d'armes et des serviteurs, l'Empereur en avait des centaines, voire des milliers, mais combien avait-il de frères ? Avec combien de personnes pouvait-il être lui-même, boire son vin et rompre le pain sans risquer d'être trahi ou empoisonné ? Sur bien des aspects, le colosse ne lui servait à rien, au contraire, il lui coûtait même cher, autant en ressources qu'en patience. Alors pourquoi s'entêtait-il à lui sauver la vie, à l'aider et à lui tendre la main ? Olek avait enfin la réponse ; voir l'empereur ainsi exaspéré devant sa proposition d'allégeance lui prouvait que l'homme en face de lui n'avait jamais agi par intérêt, simplement par envie, par l'égoïsme désintéressé caractéristique de l'homme qui protège sa famille.

Red avait-il réellement besoin de donner ses raisons ou d'expliquer ses actions ? Olek devait-il vouer sa vie pour rembourser une dette qui n'existait pas aux yeux de son bienfaiteur ? L'évidence d'un non faisait écho aux paroles sèches et lourdes de sens de l'empereur. Leur relation n'était pas quantifiable, ni ne demandait de compensation, tout comme un père qui meurt pour sauver son fils, ou un frère qui risque la sienne pour son cadet. Red ne voulait pas voir la vie d'Olek réduite à une simple transaction.

Plus têtu qu'un phacomoshère, le jeune colosse blessé voulut s'excuser, sa bouche s'ouvrit doucement, rappelant celle d'un poisson asphyxié, mais aucun son n'en sortit. Il se sentit bête, comme lorsque Druss lui remontait les bretelles, lorsqu'en de rares occasions la véracité de ses mots valait la plus puissante des gifles. Il pinça ses lèvres et se détourna en claudiquant. Un merci était trop facile, et demander pardon pour son manque de discernement encore plus inutile. Olek voulut garder le silence mais se ravisa au dernier moment.

- Tu ressembles à Paps... murmura-t-il sans se retourner et disparaissant derrière l'embrasure de la porte réduite en cendres.

Il regagna ses quartiers à la hâte ; Olek non plus n'était pas à l'aise avec ses sentiments. Des larmes coulaient le long de ses joues rouges de honte, et il était hors de question que Red en soit témoin.
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