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Tu as une belle maison toi, tu sais...

Inu Town, 1620...

L’été, il ne devrait pas y avoir de pluie ! Sinon, on pouvait tout aussi bien rester au printemps. Et pourtant, depuis deux semaines, il pleuvait des cordes !
Bien sûr, dans ces cas-là, on pense d’abord aux pauvres vacanciers, comme le malheureux Mr. Takashi qui se retrouve condamné à jouer à la belote dans le bungalow qu’il a loué plutôt que d’aller se faire carboniser au soleil. On plaint aussi, plus par principe, les pauvres cultivateurs qui vont perdre une partie de leur labeur de toute une année. Enfin de toute façon, on les aurait aussi plaints s’il y avait eu trop de soleil.
En revanche, on oublie souvent les clochards. Parce que même en été, un sans-abri est content d’avoir quelque chose à se mettre au dessus de la tête, et la misère est nettement plus supportable lorsqu’elle n’est pas trempée ! Alors si on ne peut même plus compter sur l’été pour rester au sec… mais où va le monde ?!

C’était dur pour lui, mais Ange faisait partie de ces vagabonds. Il avait beau se prétendre "cambrioleur itinérant", un gars qui erre d’une île à une autre sans domicile fixe, qui dort ou il peut, mange ce qu’il peut, et qui porte la même veste usée depuis plusieurs années, c’est un vagabond. Ce qui aurait pu le sauver –au moins provisoirement- de son état, ça aurait été un bon gros cambriolage, dans une belle grosse baraque pleine de bons gros objets bien chers ! Hélas, ses deux dernières tentatives dans des maisons du coin s’étaient soldées par un échec cuisant, la faute au chien de garde pour la première, et à sa maladresse qui lui avait fait renverser une série de vases précieux dans la seconde.

Alors qu’il errait dans les rues en longeant les maisons pour recevoir un peu moins d’eau sur le crâne, tout en ruminant ses pensées et en méditant ses échecs, un homme l’interpella d’une voix râpeuse:

- Holà, mon frère, tu cherches un abri ?

Bien sûr, ce n’est jamais un homme de bonne situation qui va vous appeler "mon frère". Et celui qui venait de parler appartenait plus à la catégorie "vieille loque qui à passé sa vie à clocharder à côté d’une bouteille d’alcool, et qui compte passer l’autre moitié de cette façon". Mais d’un autre côté, il avait un air sympathique, il souriait à pleines dents, et il était effectivement au sec, à l’abri sous un petit porche. Et il avait une bouteille !

Êêrk, ce type est encore plus sale que moi !
Au point ou tu en es,… tu devrais voir ce qu’il veut.
Mais… ce n’est pas mon frère ! J’en suis sûr ! Il n’a pas la peau blanche, et ses cheveux ne ressemblent pas du tout aux miens ! D’ailleurs, je n’ai même pas de frère !
Eh bien s’il est prêt à partager de la nourriture avec toi, appelles-le frère, cousin, maître, roi, ce que tu veux ! Mais tu ne peux plus rester le ventre vide !
Euh… c’est vrai.


Ange fit un sourire aimable au vieil homme (enfin il avait l’air vieux, mais il était peut-être juste très sale). Cependant, en voyant la réaction de l’autre, il préféra arrêter de découvrir ses crocs et s’approcha simplement.

- Euh… mh’soir, mon, hum… frère.
- Gyahaha, installe-toi ! On est au sec ici !
- Super !

Arrêtes de sourire ! Il va finir par s’enfuir !
Bon, bon…
Alors maintenant, pense à la nourriture : c’est important.
Je ne risque pas d’oublier. S’il n’était pas aussi sale, je serai prêt à le manger, lui !


- Ahem… mon frère, tu n’aurais pas à manger, par hasard ?
Et ailleurs qu’en toi.
- Gyahaha, désolé p’tit gars ! C’est la dèche pour le moment. Par contre, j’ai de la gnole à volonté pour passer la nuit !

Je préférais "mon frère" à "p’tit gars".
Tu n’as qu’à essayer de l’appeler grand gars, ou gros gars, pour voir s’il change.
Bon, et… je vais devoir le manger, s’il n’a rien à me donner ? Je ne sais pas si j’ai envie…
Non. En plus il à l’air très poilu, et ça risquerait d’être super long de le dépecer. Et puis tu n’es pas un cannibale.
Un canni quoi ?
Oublies, c’est trop compliqué. Enfin tu ne vas pas le manger.
Tant mieux ! Alors, je fais quoi ?
Accepte l’alcool, ça sera déjà ça de pris. Et essaie de glaner quelques infos.


***

Boire à la bouteille de Ricky le clochard, c’était l’assurance d’avaler par la même occasion des millions de bactéries porteuses de maladies en tout genres restées sur le goulot (oui, il s’appelle Ricky. ‘Fin si ça ne plait à personne, on peut l’appeler autrement. Lui il s’en fiche). Sauf qu’en réalité, la boisson du clochard était tellement concentrée qu’ils mourraient probablement tous au passage de l’alcool !
Après une lampée qui lui décapa intégralement les intestins, le sauvage revint à la charge :

- Dis, grand g… euh… -hm- dis, tu ne saurais pas ou je peux trouver à manger ? Parce que l’alcool c’est bien, mais je vais mourir de faim moi !

Ricky se gratta la tête en se raclant la gorge. Visiblement, il était satisfait de la situation : l’homme aux dents pointues s’en remettait totalement à lui. Il se sentait important, et il aimait ça ! Il continua à remuer ses poux un moment avec un demi sourire, puis ce décida.

- Huuuum… il y aurait bieeeen…

A la lueur dans ses yeux, on pouvait deviner que voir le regard du sauvage scotché sur ses lèves tandis qu’il prenait son temps lui faisait ressentir une grande satisfaction.

- J’crois bien que ce soir, y’a une grande réception, organisée par un gros richard du coin pour d’autres gros richous, dans… dans cet espèce de grand trucmachin, là… le restaurant. Ça s’appelle le… le… "Majestueux – Restaurant étoile étoile étoile étoile étoile", où un nom de snobinar dans de goût-là. ‘Va y avoir tout le gratin du coin, avec des artistes célèbres qui vont se faire mousser tout en buvant et en mangeant.
- Et, laisse moi deviner… fit Ange, dubitatif … tu as un carton d’invitation que tu gardes caché dans ta poche ?
- Gyahaha ! Non, pas du tout ! Par contre, d’ici quelques heures, les poubelles derrière le resto’ seront pleines de restes. Et alors, j’te dis pas, mon pote : ce sera un festin !

Hm, ça me tente bien, moi.
Réfléchis mieux que ça, crétin !
Bah… c’est bon, j’ai presque trouvé à manger, non ?
Le clochard t’as dit que tous les riches du coin seraient au restaurant. Ça veut dire qu’ils ne seront pas chez eux !
Et… alors ?
Tu es vraiment bête ! Ça veut dire que tu pourrais, par exemple, rentrer chez eux en tout impunité.
Oh ! Mais c’est bien ça !


- Dis-moi, Roucou,…
- C’est Ricky, p’tit gars ! Ricky.
- D’accord. Alors Roucky, dis moi… quelle est la maison la plus riche, dans le coin ?

Un peu surpris par la question, le clochard oublia de prendre son temps pour répondre :

- Bah… ça doit être la maison des Grissac, un peu plus loin en bordure de la ville. Une grosse baraque, tu n’peux pas la louper. Mais… tu ne vas pas aux poubelles finalement, mon gars ?

Ange ne l’écoutait déjà plus. Les Grissac auraient une drôle de surprise en rentrant de la réception, cette nuit ! Et Ricky en aurait une aussi quand il se rendrait compte que le sauvage lui avait volé sa bouteille !
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Louis, mon bon ami, voudriez-vous, je vous prie, atteler le cab et le rapprocher du porche, nous nous rendons en ville avec père et mère. Vous en seriez bien aimable et une fois cela fait, vous pourrez disposer de votre soirée et prendre congés.

Le majordome opina derechef par une petite inclinaison de la tête et quitta la bibliothèque aussi silencieusement qu'il était arrivé. Ankou, que l'on nommait encore Mr Loktar Grissac à cette époque, était en train de lire un livre sur les méthodes de tortures les plus loufoques de l'histoire, complètement avachi sur le canapé en cuir. La bibliothèque était immense, plus grande qu'une maison modeste et contenait pas moins de 8 546 ouvrages en tout genre. C'était la pièce où vous aviez le plus de chance pour rencontrer Loktar qui y séjournait de longues heures à lire ou écrire sur un petit secrétaire en acajou. Il en avait fait son repaire, son fief, son sanctuaire et personne n'était autorisé à le déranger sous peine d'encourir un discours enflammé sur "le besoin vital d'espace personnel nécessaire pour un développement serein et prospère de la conscience humaine". Et dieu sait que ni la famille, ni le personnel n'avait envie de l'entendre monologuer durant 20 minutes. Louis était venu suite à l'appel de Loktar par la petite sonnette du service. De nouveau seul, l'écrivain tournait les pages, inlassablement en humectant son doigt pour une meilleure accroche. Il trouvait ce livre hautement intéressant mais terriblement décadent.

Peu avant vingt et une heure, toute la famille se rassembla dans le hall, père, mère et fils, tous vêtu de façon élégante et sophistiqué s’apprêtaient à prendre le cab pour se rendre au Majestueux, restaurant grand standing, cinq étoiles au guide Micheline. La soirée était organisé par un des notables de la ville et tout ce qu'Inu Town comptait de personnalité, y avait été invité. Les Grissac, comptant parmi les plus grosses fortunes de l'île, était bien évidement de la partie. La mère de Loktar, dans une somptueuse robe pourpre, renouait le nœud papillon de son cher époux. Lui, occupé à griffonner un croquis pour son usine sur un petit calepin en cuir, ne prêtait attention à rien, même pas à Loktar qui jactait sans cesse.  

Vous avez eu, une fois de plus, le nez fin père en faisant construire ce porche massif en devanture de la demeure. Sans quoi, nous aurions du maculer nos escarpins par ce temps des plus humide. Ces facétieux impondérables météorologiques font le bonheur des cireurs de chaussures sur les dock, à coup sur.  

Le trajet dura une bonne dizaine de minutes durant lesquels le futur scribouillard des Saigneurs s'épandit sur son aversion de la pluie, laçant, toujours et encore, les autres occupants du cab. Une fois devant le Majestueux, les convives pénétrèrent à l'intérieur sans avoir besoin de montrer le carton d'invitation. Il faut dire que le père Loktar était un homme reconnu pour son savoir faire et son sens des affaires. Il n'était pas donné à n'importe qui de fournir au QG de la marine de North Blue des canons et autres œuvres de ferronnerie.  

Les invités s'entassaient déjà autour du buffet coktails, comblant leurs estomacs d'amuses bouches en attendant le vrai repas. Loktar lui, s'était éloigné du giron familiale pour se servir un scotch et s'allumer un cigare. Voyant que son père le cherchait des yeux pour lui présenter un illustre inconnu, Loktar fit mine de ne pas apercevoir le geste de son père et s'en alla voir ailleurs. Il trouva un petit groupe de demoiselles dans un recoin de l'immense salle de réception en train de discuter sur le dernier roman à la mode. Intéressé, Loktar s'incrusta, non sans politesses, dans ce petit groupe et se donna en spectacle.

Bonsoir mesdemoiselles, j'étais occupé à savourer ce merveilleux nectar ambré quand le doux et mélodieux chants de vos voix se sont posés sur mes oreilles. J'ai détourné mon attention pour constater que non content d'avoir de magnifiques petites voix, vous étiez les digne représentes du sexe féminin par votre élégance dans ces robes. J'espère que ma présence de vous importune pas, permettez-moi de me présenter, je suis Loktar, Loktar Grissac et je serais ravi de vous entendre critiquer la dernière oeuvre du fameux maître du suspens. Moi même, j'ai eu le charmant plaisir de feuilleter sa dernière parution et je dois hélas conclure à la décadence. Ne me prenez pas pour un nostalgique de ces débuts, loin de là; Simplement, son dernier roman est insipide et terriblement ennuyant malgré une ambiance onirique des plus exquis, qu'en pensez vous ?

Le verre à la main, le cigare coincé entre les doigts, une main dans le costume, une pose assez suggestive et un maintien de tête remarquable, firent de Loktar, la nouvelle coqueluche de ses jeunes dames. Les discussions allèrent de sujets en sujets sans que ce jeune coq devienne silencieux, il avait toujours quelques choses à dire, sur tout et n'importe quoi mais toujours avec classe et impertinence. Mais la soirée ne faisait que commencer et jamais il n'aurait pu se douter un seul instant de ce qui allait suivre.. Vous non plus d'ailleurs..

Hrp:


Dernière édition par Ankoü le Sam 31 Aoû 2013 - 12:31, édité 2 fois
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Le départ des Grissac père, mère et fils, sembla beaucoup intéresser une des poubelles du coin de la rue d’où émergeait une vieille serpillère. Elle pivota discrètement dans leur direction, comme si elle les suivait du regard. Puis, lorsque le cap eut disparu au loin, elle reprit son orientation initiale. Le même manège se répéta lorsque sortit par le même portail un majordome visiblement très satisfait que le fils de son maître lui ait donné sa soirée. Le couvercle se souleva alors entièrement, laissant émerger la serpillère qui était en fait la chevelure d’un cambrioleur décidé et très content de la tournure des évènements,… mais aussi très engourdi d’avoir passé plusieurs heures contorsionné au milieu des détritus à guetter ! D’accord, c’était une poubelle de luxe, il fallait l’admettre : bien épaisse, confortable, avec des poignées ouvragées et des bords à motifs – une poubelle de gens riches. Et puis elle mettait à l’abri de la pluie. Le seul souci, passés les détails de l’odeur et du manque de place, c’était qu’elle ne contenait rien de comestible ! Peut-être étais-ce la faute des chats du quartier, mais Ange soupçonnait les utilisateurs de la poubelle de donner leurs restes à leurs animaux plutôt que de le jeter, comme le ferait  toute personne honnête! Et les clochards dans tout ça, hein ?!

Le sauvage n’allait pas passer par devant, c’était bien trop risqué et voyant ! Le grand jardin à l’arrière, dans l’ombre de la nuit, serait bien plus discret. Cependant, il détestait des grilles forgées à barreaux munis de pointes, et la propriété en était entourée ! C’était chic, d’accord, mais est-ce qu’ils avaient pensé aux pauvres voleurs qui devraient les escalader avant de les faire poser ?! Décidément, ces riches-là ne lui revenaient pas ! Cela dit… d’accord, peut-être qu’ils y avaient pensé, justement. Tant pis ! De toute façon, à force de devoir en escalader, Ange avait fini par trouver une astuce. Il vida sa poubelle sur le trottoir, puis l’emporta avec lui et fit le tour de la demeure. Arrivé à un coin de grille dans l’ombre, il posa son ex-refuge par terre, à l’envers, pour s’en servir de marchepied. Il roula ensuite sa veste en boule, et la cala sur les pointes afin de pouvoir y passer sans mal. D’un danger, elles devenaient ainsi un point d’appui ! Le voleur prit ensuite son élan et sauta, se cramponna, et s’aidant des pieds et des mains, réussit à atteindre le haut des barreaux. C’était dans la poche : d’un bond, il serait en bas ! Il s’élança, dérapa sur la grille mouillée, et…

- AAAAÏÏEUH !!! MA JAMBE !!!

Oh, quel boulet !
Aaaargh, j’ai mal ! J’ai du me briser un os ! Peut-être même toute la jambe !
Mais non, ce n’est rien de grave. Tu t’es juste tordu la cheville en atterrissant stupidement !
Non, ça… ça fait vraiment mal ! La… la jambe doit être cassée !
Reprends-toi ! Tu ne peux pas rester ici de toute façon.
Je ne peux pas bouger : j’ai maaaal ! Aaaaah !
Tu veux dire que tu vas rester ici à mourir de faim alors que juste à côté de toi se trouve une maison probablement débordante de richesses… ?
M’en fiche, je souffre trop !
… et de nourriture ?!
Euh… j’avais oublié ça ! En plus d’avoir mal, j’ai faiiim ! Je vais mourir !
Au travail, bon à rien !


Grimaçant, gémissant, pleurnichant, le cambrioleur maladroit se releva péniblement et se traina plus qu’il ne marcha dans l’herbe mouillée, jusqu’à la demeure. Il était trempé, couvert de boue, de restes de détritus de sa poubelle, ses cheveux habituellement blancs avaient pris une couleur jaunâtre ; pour ajouter au tout, il était tenaillé par la faim et sa cheville était méchamment enflée ! Le pauvre ne se souvenait avoir été que rarement aussi misérable.

***

Cependant, la chance n’avait pas encore totalement abandonné le sauvage. En effet,  à l’intérieur de la maison œuvraient encore les deux bonnes chargées du nettoyage. En elles-mêmes, elles n’avaient rien de suffisamment intéressant pour qu’on prenne la peine de les décrire ou même des les nommer. En revanche, ce qu’elles faisaient méritait de l’attention : l’une d’elles, en particulier, avait trouvé bon de profiter de l’absence de Mr. Loktar pour faire un peu de nettoyage dans la bibliothèque. Quand le jeune homme était la, c’était un vrai calvaire à faire, car celui-ci ne supportait pas l’agitation lorsqu’il était dans la pièce, mais il y passait ses journées ! Et dès que l’on touchait à un livre pour dépoussiérer une étagère, c’était un drame ! Profitant, donc, de la soirée sans élément gênant, l’une des deux bonniches avait donc commencé à passer la serpillère ; mais surtout, pour aérer un peu la pièce, avait entrouvert une des larges fenêtres !

Ce détail n’avait pas échappé au cambrioleur qui s’en approcha, puis colla son nez au carreau pour surveiller la femme. Dès qu’elle disparut de son champ de vision, il se hissa sur le parapet.  

Hm, tu ne vas pas y aller comme ça ?
Ben… si, pourquoi ?
Et la boue sur tes chaussures, andouille ?! Tu veux que quand la bonne femme viendra refermer la fenêtre, elle trouve tes traces de pas ?!
Euh… non… mh. C’est vrai, ce n’est pas très sympa de salir ce qu’elle a lavé.
Mais non, abruti !! Si elle voit tes traces de pas, elle va donner l’alerte ! Alors mets-toi pieds nus, et en vitesse !


Le sauvage s’exécuta, puis se glissa sans bruit dans la pièce. Ayant déjà quelques rapines à son actif, il avait appris à se mouvoir à peu près silencieusement, ce qu’il faisait malgré sa douleur à la cheville, en marchant à quatre pattes.
Sans demander son reste, il quitta la bibliothèque. Il savait bien que certains livres valaient une fortune, mais il n’y connaissait rien. Il trouverait bien autre chose. Et puis un autre endroit l’intéressait bien d’avantage pour le moment : la cuisine !

***

Au même moment, mais à l’autre bout de la ville, dans le restaurant de luxe où se déroule la réception…

Parmi tous les invités de marque se trouvait  Sinibaldo di Capizzi, jeune pianiste de renom mais aussi Dom Juan autoproclamé de l’île. Pour le moment, l’homme tirait une drôle de tête. Pour tout dire, il voyait d’un très, très mauvais œil le freluquet qui avait tant de succès auprès d’un groupe de jeunes filles. La jalousie y était pour quelque chose, bien sûr, mais il appréciait d’autant moins que parmi elles se trouvaient Pervenche, son amante n°3, ainsi qu’Anastasia-Coquelicot, son amante n°7. Et le pire, c’était qu’il avait l’air d’avoir du succès, le bougre !

Un tel affront méritait une punition ! Se forçant à maîtriser sa colère, Sinibaldo arrangea le col de sa chemise, entortilla machinalement sa moustache, et passa sa main dans ses cheveux pour leur donner un style "héros dans le feu de l’action". Puis, un verre à la main, il s’approcha de l’inopportun. S’interposant alors de manière provocante entre Loktar et les jeunes demoiselles, il lança :

- Oh, mais dites-moi, ça ne serait pas le petit, euh… Lothar Gros sac ? Gras sac ? J’ai déjà entendu parler de vous. Malheureusement pas pour vos exploits. Vous êtes un genre de rat de bibliothèque, c’est ça ? Hu hu hu !
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La réception avait pourtant si bien commencé. Ankou avait réussi à esquiver son père au profit de jeunes demoiselles. Malheureusement pour lui, Sinibaldo semblait enclin à rompre l'harmonie de la soirée. En se plaçant entre son public et lui, Sinibaldo venait de s'attirer les foudres du jeune écrivain. Ankou du faire un effort colossal de maîtrise sur soi pour ne pas rosser le pianiste. Un léger rictus forcé, une sorte de rire jaune, s'esquissa sur le visage d'Ankou. Il baissa la tête et se pinça l'arrête du nez. Il soupira légèrement par le nez puis se redressa et fixa dans les prunelles l'élément perturbateur.

Sinibaldo di Capizzi, alias le virtuose des tavernes, comment diable avez-vous fait pour vous procurer une invitation ? C'est une réception de personnes civilisés et de bons goûts et je crains fort que votre présence soit une insulte à la bienséance. Néanmoins, si on ignore votre odorat visiblement perturbé pour avoir choisi une telle eau de toilette, je dois m'incliner et rendre hommage à la qualité du tissu qui vous habille. Vous avez du vendre père et mère pour vous payer un tel ensemble. Dommage que l'homme qui l'habite n'est pas en mesure de faire ressortir ses formes somptueuses.

Et sans laisser le temps au pianiste de répondre, il le pousse du revers de la main et l'écarte de son passage. Quand ils sont côte à côte, Ankou murmure à son oreille quelques paroles blessantes.

Je suis allé écouter votre récital avant hier, c'était médiocre, même mère joue mieux que vous. Cessez de vous pavaner et d'importuner ses dames, sans quoi je vous fais mettre dehors, misérable.

Hautain comme jamais, Ankou termine son mouvement et se remet devant les demoiselles qui ont semblerait-il, retenu leurs respirations durant la joute verbale. D'un geste précis et calculé, Ankou réajuste son nœud papillon et arbore un sourire étincelant.  

Où en étions nous mesdemoiselles ?

***

Les deux femmes de ménage briquent et astiquent sans relâche la maison et cela depuis huit heure du matin. Épuisée, la plus vieille des deux se posa sur un des nombreux fauteuil en tissu onéreux de la demeure. Elle se plaignit de son genou et maudissait le temps humide de lui faire endurer un tel supplice. Elle se releva en s'appuyant sur les accoudoirs et lança à l'intention de sa jeune coéquipière, quelle allait nettoyer le couloir et quelle allait devoir tout désinfecter à cause d'une odeur répugnante. Interloquée, sa collègue lui affirma quelle l'avait déjà nettoyé une demi heure avant et qu'il n'y avait aucune odeur. Les deux femmes se regardèrent un moment et se dirigèrent ensemble vers le couloir.

Elles reniflèrent un peu partout et en conclure, en experte, à une odeur caractéristique de poubelles laissée au soleil durant une semaine et avec un semblant d'odeur de chien mouillée. Étrange, d'autant plus que les Loktar n'avaient pas de chiens... Intriguée, elles remontèrent la piste en suivant l'odeur qui se faisait de plus en plus forte à l'approche de la cuisine. Légèrement apeurée, elles hésitèrent à pousser la porte. Elles se regardèrent à nouveau, comme pour se donner du courage et d'un signe de tête, elles agrippèrent les premiers objets qui leur tombèrent sous la main. C'est ainsi que, armées d'une statuette en fer représentant un apollon et d'un chandelier encore fumant que les deux femmes de ménage pénétrèrent dans la cuisine.


***

De son côté, Loktar avait réussi à s'isoler de la bande des jouvencelles, en compagnie de Pervenche et d’Anastasia-Coquelicot, ses préférées. Ensemble, ils déambulèrent près du balcon, faute de pouvoir y aller à cause de l'averse. La conversation semblait joviale et leurs rires se laissaient entendre à quelques mètres. Une dans chaque bras, l'écrivain arpentait la pièce à la recherche d'un endroit moins peuplé pour s'entretenir, plus.. profondément avec les demoiselles... Mais ne trouvant rien à sa convenance, l'écrivain demanda à l'un de serveurs de faire approcher son cab.

Mesdames, me feriez-vous l'immense privilège de m'accompagner jusqu'à ma demeure. Cette soirée, je le crains, ne nous apportera désormais rien d'autres qu'une redondance visuelle. Nous en avons fait le tour et je crois avoir quelques bouteilles de champagne millésimées à la cave. Etes-vous partantes ?  


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Pervenche et Anastasia-Coquelicot étaient partantes, oh ça oui ! Celui qui l’était beaucoup moins, en revanche, c’était leur premier amant, Sinibaldo di Capizzi ! Après avoir encaissé la série de remarques cinglantes du jeune Grissac, le pianiste était resté à l’écart, et l’on aurait pu croire qu’il avait la partie tellement il s’en était pris plein la figure. En réalité, il préparait sa revanche !

C’était intolérable ! Ce misérable, ce bon à rien, ce… ce voleur d’amantes, allait lui payer cher. De quel droit lui faisait-il de l’ombre ?! Depuis quand pouvait-on lui résister ?!! Il allait lui faire ravaler ses insultes !!
Le pianiste rouge de colère arpentait la salle du banquet en gesticulant, et manqua plusieurs fois de renverser un serveur. Il réfléchissait, mettait au point les réponses assassines qu’il enverrait à la face de son concurrent. Il fallait dire que Sinibaldo n’était pas très doué en improvisation orale.
Et… s’il le provoquait en duel ? Ça pouvait faire bien. Quoique… c’était risqué, car lui-même n’avait jamais touché à une arme de sa vie. D’un autre côté, Grissac n’avait pas la réputation d’un virtuose du combat.
Mais en faisant ça, ne passerait-il pas pour la brute devant les demoiselles ?

En tout cas, il allait voir !!

***

Un autre banquet avait lieu ailleurs en ville. Mais cette fois, c’était sans grande pompe, dans la cuisine de chez les Grissac ; et le seul convive, c’était Ange. Le cambrioleur affamé avait ouvert tous les placards, et avait étalé tout ce qu’il avait pu trouver de consommable sur une table, puis, avec l’aide des couteaux de cuisine, il avait crocheté la porte du cellier. Et là, s’étaient étalés devant lui des jambons secs, de larges pains, du fromage, des œufs, des fruits et des légumes, et toute la nourriture dont il rêvait depuis des jours ! Ce n’était plus un repas qu’il allait faire, mais une véritable orgie !

Le sauvage put se bâfrer comme il ne l’avait jamais fait, sans aucun respect pour des notions abstraites telles que la "bonne tenue à table", ou encore le "manger proprement et sans en mettre partout". D’ailleurs, il n’était pas à table mais assis sur une pile de sacs. Et le non-gaspillage de la nourriture ne s’appliquait pas dans une maison de riches qui devaient visiblement ignorer jusqu’au mot faim ! Affairé comme il était à massacrer un pain, il n’entendit pas arriver les deux bonnes. Et alors qu’il enfournait une nouvelle bouchée, une statuette d’Apollon en fer s’abattit sur son crâne !

***

Il existe, dans un petit village perdu au milieu d’une jungle sans intérêt, un proverbe que l'on se transmet de génération en génération et qui dit : "garde les cheveux longs, et tressés. Ça te protègera si une lame essaie de te couper la tête, et en plus, ça te donnera un air super classe !!". Si les cheveux d’Ange n’avaient dans le cas présent aucune raison d’empêcher sa tête d’être tranchée (la statuette d’apollon en fer avait plein de qualités, mais pas celle de couper), l’épaisseur des tresses amortit néanmoins le choc, empêchant leur propriétaire de se faire assommer. Celui-ci se contenta de tomber à genoux dans les œufs écrasés et les miettes qui tapissaient maintenant le sol, plus surpris que sonné.

Nyaaah ?! Qu’est-ce qui se passe ?!
On dirait que tu as reçu un truc sur la tête.
Le plafond ? Le plafond m’est tombé sur la tête ?! Qu’est-ce que j ‘ai bien pu faire… ?
Mais non, andouille ! Tu vois bien que tout est en place.


- Hiii ! Il bouge encore !
- Vas-y, frappe-le !!


- Aïïïeuh !

Ça fait vraiment mal !
Ne te laisse pas faire ! On t’attaque !!
Mince ! Par où je pourrais fuir ?!
Tu dois te défendre !
Ah zut, je n’ai pas le choix je suis coincé dans le cellier.
Regarde un peu, il y a juste deux pauvres cruches à peine armées.
Oui, mais justement : elles sont deux !
Alors fais leur peur. Tu peux au moins faire ça, si tu n’oses pas te battre !
Mais c’est moi qui ai peur !
Tu as une autre solution ?!
Je… bon, d’accord…


Le sauvage se redressa de toute sa taille. Sa cheville l’élança un bon coup pour lui rappeler qu’elle lui en voulait encore d’avoir été tordue tout à l’heure. Tout crasseux et répugnant qu’il était, l’œil hagard, il compléta son ensemble d’un sourire à rendre jaloux un requin –d’ailleurs, la dentition devait être à peu près la seule chose qu’il y avait de propre, et même d’impeccable, chez lui.

Cela eut pour effet de terroriser les deux ménagères (et ça c’était bien), mais aussi de pousser la plus jeune, dans un élan de terreur, à lui flanquer un second coup d’Apollon dans la figure (et ça c’était nettement moins bien) ! Cependant, la statuette avait plein de qualités, mais pas celle d’être une arme efficace. Le coup causa bien peu de mal, à peine pouvait-il se vanter d’avoir fait saigner la lèvre du voleur. C’était cependant beaucoup pour un homme fatigué, déjà blessé, sale, perdu, et qui venait de remplir son ventre vide de l’équivalent de cinq repas. Et puis en plus, Ange était très douillet !

Aaaaahaaaahaaa ! J’ai mal ! J’ai mal ! J’ai mal !
Ne racontes pas de bêtises ! Tu as à peine été frôlé !
C’est drôlement douloureux. En plus je saigne !
C’est trois fois rien.
Je… je saigne ! Je saiiiigne !!!
Ça suffit ! Débarrasse-toi de ces mégères, et finis ce stupide cambriolage !
Mais je saigne !... Euh, bon, je le fais. Au fait, c’est quoi une mégère ?
Ça doit être une femme qui, euh… on s’en fiche, débarrasse-t-en !!
Bon, bon,…


La série de grimaces qui avaient animées la réflexion du sauvage avaient déjà persuadé les deux femmes (pour peu qu’elles aient encore des doutes), que l’homme qu’elles avaient en face d’elles était un fou dangereux. Ou au moins un fou tout court. Et puis celui-ci se mit à hurler :

- J’en ai marre ! Arrêtez de me taper !! Je… je veux manger !!!

La fragile détermination des ménagères s’évapora. Il ne faisait pas de doute que ce qu’il voulait manger, c’était elles. D’ailleurs, vu les dents qu’il avait, cet… être était forcément un cannibale ! Les deux femmes poussèrent un hurlement suraigu parfaitement coordonné, jetèrent leurs armes, et détalèrent ! La statuette et le chandelier s’écrasèrent au sol, ajoutant au désordre ambiant. Et si l’Apollon en fer avait de nombreuses qualités, la solidité n’en faisait pas partie, aussi se brisa-t-il.
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Abrité par un porche massif, le jeune Loktar attendait le cab qui devait le conduire chez lui. Une demoiselle à chaque bras, la soirée promettait d'être trépidante. La pluie donnait le tempo avec une averse qui ne semblait jamais finir. Les sentiers n'étaient plus que boues ou flaques. Rentrer à pieds par cette météo était donc inenvisageable, sauf si vous comptiez jouer le mécène auprès du tailleur locale.

Sous le porche, il n'y avait pas grand monde, juste le maître d’hôtel et deux laqués qui semblaient de marbres. Impassibles aux paroles et remarques des invités de la soirée. Le petit maître d'hôtel, debout devant son pupitre, griffonnait le registre en jetant un coup d’œil à sa montre. Il surveillait que le cocher ne mette pas trop de temps à arriver.

Une autre personne se joignit à ce cercle fermé, il s'agissait du prétendant de seconde zone. Il semblait quelque peu agité. On distinguait sans peine sa veine sur son front battre à tout rompre. L'homme se dirigeait avec vigueur et empressement vers Loktar et ses invitées. Un gant à la main, le pianiste s'approcha dans le dos se campa sur ses jambes avant de tousser assez fort pour que Loktar le remarque.

C'est avec nonchalance que Loktar pivota la tête sans dédaigner lâcher ses deux demoiselles. Il vit le bras du pianiste prendre de l'élan. Il était clair que l'homme semblait décidé à gâcher ce début de fin de soirée.

Si vous escomptiez porter atteinte à ma fierté dans le but d'engendrer un duel, faites le avec un minimum de dignité et attendez au moins que nous soyons face à face.

Effarées par le comportement odieux et fourbe du pianiste, les demoiselles lâchèrent des regards pesant envers lui. Perdu, le musicien ne savait plus que faire, il n'allait tout de même pas frapper un homme sur la tête alors qu'il lui tourne le dos. Il voulut se rattraper et demander à Loktar d'avoir au moins la décence de se retourner et de ne pas se protéger derrière de si belles nymphes mais le cab arriva et Loktar entama la descente des escaliers, accompagné par les deux sublimes créatures qui relevaient désormais bien haut le menton.

Loktar querella le cocher pour avoir placé la portière devant une flaque. L'homme s'excusa et pour se faire pardonner, plaça au sol son long manteau en cuir pour que les dames évitent de se salir. Le cocher tendit sa main pour aider les dames à monter mais Loktar l'écarta d'un geste de la main et s'enquit de cette tâche. Une fois les deux dames à bord, il héla le pianiste qui n'avait pas bougé d'un pouce. Complètement hagard, ne sachant que faire devant une telle situation, l'homme fut surpris par l'appel du Grissac.

Si vous tenez tant à me défier, je vous invite prestement chez moi, je n'aime pas trop m'adonner en publique. Nous joindrons l'utile à l'agréable par la même occasion. Allons, pressons !

Plusieurs secondes furent nécessaire au prétendant pour accéder à la demande de Loktar. Il trouvait cela louche. Mais après tout, Loktar était un gentleman, il n'y avait pas de raison.

Pour Loktar néanmoins, il était question d'éviter un duel en publique et surtout, en mettre plein la vue à ce prétentieux pianiste au rabais en lui faisant visiter la maison familiale. Une fois cela fait, il le congédierait, sous la pluie, pour profiter seul des charmantes demoiselles.

***

A l'autre bout de la ville, les deux bonnes , terrorisées par les propos du cannibale, se mirent à courir comme jamais. Plus rien ne compter à leurs yeux. Elles devaient quitter rapidement cette demeure avant de finir sur un plat en argent avec une pomme dans la bouche. Aucune des deux n'eut la présence d'esprit d'appeler la Marine par le Den Den. Obnubilées par leur instinct de survie, elles sortirent du manoir par la porte arrière, donnant sur le parc boisé. Si le cannibale avait jeté un œil par la fenêtre, il aurait pu les apercevoir dans la pénombre. Si les deux bonnes avaient regardé la grille entourant le parc, elles auraient pu voir le cab de Monsieur Grissac Jr arrivé. Si Loktar avait regardé par la fenêtre du cab, au lieu du décolleté de Pervenche, il aurait pu voir son petit personnel fuir la demeure.

***

Une fois le cab arrêté, bien au sec sous l'immense porche de la maison familiale, Loktar descendit et ouvrit l'immense porte à double battant en chêne massif arborant les armoiries de sa famille. Une fois ouvertes, les portes laissaient voir à quiconque qu'ici, on ne manquait de rien. Il installa ses convives dans le petit salon, le temps d'aller chercher une bouteille. Les demoiselles jetaient des regards curieux à droite et à gauche tandis que le pianiste se contentait de fixer fermement Loktar et cela depuis vingt bonnes minutes. Il n'avait pas lâché sa prise durant le trajet mais Loktar se contentait de l'ignorer ou de l'éconduire verbalement, préférant s'occuper des dames.

Anastasia-Coquelicot demanda à visiter la maison, Loktar lui répondit par l'affirmative mais que d'abord, ils se devaient d'offrir un verre à ses convives. Il s'absenta et chercha les deux bonnes pour les faire travailler à sa place pendant qu'il comptait aller se refaire une beauté. Hélas, il ne les trouva pas et referma même la porte arrière de la maison, négligemment laissée ouverte.

Le personnel n'est plus ce qu'il était..

Contrarié mais gardant sa dignité, Loktar se rendit à la cave pour chercher du campagne...
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S’extirper des cuisines allait se révéler plus compliqué que prévu. Surtout l’escalier à remonter. Difficile de se déplacer quand on porte dans son ventre l’équivalent de plusieurs jours de bons repas, et que sa veste déborde de suffisamment de provisions pour remettre ça ! Et puis, la cheville du sauvage avait beaucoup gonflé, et lui faisait de plus en plus mal !
Il l’avait beaucoup frottée, en espérant la masser, avant de se demander si, au contraire, on disait que dans ces cas la il ne fallait surtout pas frotter, mais au contraire mettre des glaçons. L’un,… ou l’autre ? Ah, si seulement il connaissait la science magique de la science, seule discipline intéressante et utile parmi tout ce que faisaient les civilisés, en plus de la cuisine. D’après ce qu’il en savait, il suffisait de mettre une bande blanche autour de la blessure, d’attendre un peu, et hop ! Guéri !
Cela dit, il avait essayé sur son ancien maître, lorsque celui-ci c’était pris un coup de couteau dans le ventre après une bête bagarre à la taverne alors qu’il était saoul, mais ça n’avait pas marché…  Messire Vincent était mort, et Ange était devenu, par faute de choix et de volonté, un voleur. Il y avait donc une autre subtilité derrière la médecine, qui lui échappait.

Bon, dans le doute, il allait combiner les deux : des glaçons dans la chaussette, et des massages !

Le sauvage retourna dans le sellier, ouvrit une grande malle, et en extirpa un seau rempli de glace pilée d’où émergeait le goulot d’une bouteille en verre. Il ramena le tout dans la cuisine, et versa consciencieusement la glace dans sa chaussette. C’était horrible ! Le froid lui faisait tellement mal qu’il sentait que la glace lui brûlait la peau ! Et maintenant sa chaussette était toute trempée !
Finalement, il s’en tiendrait aux massages.
… ce qui était une erreur.

***

Bon, tu as fini tes bêtises ?!
Mais je… ça fait vraiment mal !
C’est entièrement de ta faute si tu en es la.
Oui mais…
Assez perdu de temps ! Tu as déjà trop trainé dans cette maison. Dépêches-toi de remonter, prends ce que tu peux, et va-t-en d’ici.
Euh… tout de suite…


S’aidant d’une table, le cambrioleur se redressa, et fit quelques pas en boitillant vers la porte. A cambrioleur une maison sur une seule jambe, il allait se sentir un peu ridicule, et surtout pas très efficace ! Déjà, il laissait la cuisine dans un sale état.

Tu oublies quelque chose.
Hein ? Mais euh… Non, j’ai mangé,… je me fiche que tout soit en bazar, j’ai bien ma deuxième chaussure,…
Et comment comptes-tu transporter ton butin, si tu as déjà les poches pleines de nourriture ?
Oh, je n’y avais pas pensé.
Peut-être en les accrochant à tes cheveux, comme des colliers,… hein ?!
Hé, mais c’est une bonne idée ça !
Mais non, c’est complètement idiot ! Va chercher un sac, abruti !!


C’est à ce moment que la porte s’ouvrit. Puisqu’il s’agissait là d’un des évènements les plus cruciaux de l’histoire, la scène méritait beaucoup de peaufinage. D’abord, le grincement : un magnifique "gniii", enregistré avec le meilleur son, et qui ne laissait aucune équivoque. Ensuite, l’air dramatique joué au piano qui accompagna l’ouverture de la porte –mais que l’on pourrait très bien imputer, non pas au génie du réalisateur, mais à l’impertinence de Sinibaldo di Capizzi, qui profitait de l’absence de son hôte pour faire une démonstration de ses talents-, qui rappelle à l’ordre le spectateur inattentif, et souligne le faire qu’il va se passer quelque chose qui mérite l’attention. Et enfin –cerise sur le gâteau-, l’entrée en scène de Loktar : grâce à un éclairage faible mais savamment dosé, il a tout pour impressionner ! Celui que l’on pourrait autrement décrire comme un frêle jeune homme à la moustache élégante et au costume bien taillé, était maintenant un impressionnant personnage en costume, dont l’ombre sur son visage, la coiffure, et sa fine moustache, soulignaient l’air sévère et terrible !

Du moins, c’était de ce point de vue-là qu’Ange voyait la scène, donc ça ne signifiait pas grand chose, sinon qu'il était un gros peureux. Sous l’effet de la surprise, le sauvage poussa un cri (le "gyaaaah" pas très élégant, mais un peu effrayant lorsqu’il est trop prolongé), lâcha son sac, s’appuya par maladresse sur son pied enflé, trébucha, tenta de se rattraper sur la table, mais manqua son coup, renversa au passage le seau contenant le champagne, et se vautra sur le sol. La douleur lui fit pousser un second cri.

Il était terrifié, mais avec ses yeux écarquillés, des dents de requin, son odeur de poubelle, et ses cris répétés, il se rendait lui-même assez terrifiant.

Je suis découvert ! Les deux femmes ont dû aller chercher du secours !
Tu aurais dû les tuer !
Pardooon !
Quoique… ce gars es tout seul. Il doit avoir bien confiance en lui. Ou alors… d’après la tête qui tire, il ne devait pas s’attendre à te trouver ici.
Et c’est qui ce gusse ? Le propriétaire ?
Non, probablement pas. Tu sais, dans ce genre de maison, le personnel est toujours habillé avec des vêtements qui les feraient passer pour des millionnaires n’importe où ailleurs !
Et… et je fais quoi ?
Saute- lui a la gorge, mords-le, déchiquète son cou avec tes dents, achève le en lui enfonçant tes doigts dans les yeux, et planque son corps dans le cellier !
Euh… je ne me sens pas trop d’attaque pour ça… avec ma jambe et tout…
Tu pourrais aussi découper sa tête, et l’emporter pour la réduire quand tu auras le temps. Comme ça, tu seras tranquille.
Je ne peux pas… je suis par terre et lui debout. Et s’il avait une arme ?!
Quel nul tu fais ! Bon, alors ment ! Et profite d’un moment d’inattention pour l’assommer.


***

Depuis l’arrivée de Loktar, un silence pesant planait dans la pièce. Du haut de l’escalier, à des années lumière de là, on entendait le rire aigu de Pervenche : apparemment, Sinibaldo profitait de l’absence de son concurrent pour reprendre du poil de la bête !

Ange essaya de sourire à son interlocuteur. Le genre de sourire qui fait pleurer les petits enfants. Puis, il essaya :

- Ahem… b’soir. Je, euh…
Un peu plus de conviction !
- Je suis… le nouveau, c’est ça ! Je suis le nouvel employé de la maison ! Pour remplacer, euh…
C’est quoi, les noms passe partout que tous les valets civilisés ont ?
Débrouille-toi, c’est ton problème !
Euh… Hochteplizuhec ? J’aime bien…
Non, pas Hochteplizuhec.
Mais ça sonne bien !
Oui, mais ça ne fait pas "civilisé".

- Pour remplacer, euh… Archithéobald, c’est ça ! Il… il s’est –hum- tordu la cheville, alors je suis venu à sa place.

Nouveau sourire raté en direction de Grissac.
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La demeure des Loktar étant tellement vaste qu'il est nécessaire de passer à travers de multiples pièces pour se rendre à la cave. L'entrée de cette dernière se trouve au niveau de la cuisine, près de la porte d'entrée du personnel. D'ailleurs, ce n'est pas la seule entrée de la cave, il y en a une autre, fermée de l'intérieur qui mène près des grilles  bordant la maison. Généralement, c'est par là que les livreurs déchargent leurs livraisons et produits.

Mais à l'heure qu'il était, la cuisine aurait du être vide et Ankou, légèrement surpris et circonspect, trouva un domestique peu ragoutant en train d'y apporter des vivres. Loktar allait ouvrir la bouche quand une sonate en ré mineur vint lui titiller les oreilles. Il leva les yeux au ciel et laissa tomber ses épaules en guise de soupir. Décidément, Sinibaldo ne lâchait pas le morceau et ne semblait pas époustouflé par la somptueuse demeure. Loktar avait misé sur une jalousie ou une gêne mais visiblement, le pianiste tenait bon. L'employé en profita pour se présenter, ce qui obligea Loktar à focaliser son attention de nouveau sur lui. Tout en descendant les marches qui le menait vers la cuisine et donc en direction de la cave au sous-sol, le jeune Grissac écoutait les explications dont il n'avait que faire de l'employé. Pour dire vrai, il s'en contrefichait éperdument. Ses oreilles écoutait mais son esprit était en train de lister les bouteilles qu'il allait sortir. Il faillit interrompre le serviteur mais au final, passa devant lui sans s'arrêter et pénétra dans la cave à la recherche de l'objet de son choix. Quand il ressorti, bouteilles en mains, il se planta devant l'employé qui n'avait pas bougé. Il allait ouvrir la bouche mais un vieux relent de poisson pourri percuta ses sens olfactifs.

Cette odeur.. c'est infecte.. Vous ne sentez pas ? Combien de fois faudra t-il leur dire de ne pas vider les tripes des poissons ici même.. c'est agaçant..  

Puis il pivota sur place, telle une girouette qui change de sens au grès des vents. Là, le jeune don juan posa ses bouteilles sur un des meubles de la cuisine et commença à remonter les marches d'un petit pas léger. En haut des marches il s'adressa à son serviteur de nouveau, mais cette fois pour lui demander un service.

Quand vous aurez fini de décharger toutes vos provisions, refaites vous une beauté et apportez trois coupes de la première bouteille dans la véranda sur le toit. Puis vous allumerez un feu de bois dans cette même véranda et vous redescendrez par l'escalier de service pour congédier le pianiste. Vous payerez sa prestation avec vos deniers, je vous rembourserai. Si il refuse et qu'il s'offusque, n'hésitez pas à le malmener mais en aucun cas vous ne devez me déranger. Quand nous aurons fini nos verres; je sonnerai à la cordelette et vous m'apporterez cette deuxième bouteille ensuite, vous pourrez prendre votre soirée. Ha.. une dernière chose, aérez cette pièce avant que ces immondes effluves n'envahissent les parties communes. Vous êtes bien brave. Bonne soirée Archithéobald.

Comme quoi, Ankou n'avait vraiment rien compris de ce que le pseudo employé lui avait servit comme mensonge. Il faut dire que le personnel n'était pas son fort et qu'une semaine sur deux, il oubliait les noms au grand désespoir de sa mère qui le forçait à se montrer correct avec eux.

***

Votre dextérité s'est grandement améliorée, je dois le reconnaître. J'apprécie sans modération les mélodies que vous nous interprétez néanmoins, sans vouloir être grossier, nous nous laissons embarquer dans une somnolence non convoitée. Auriez-vous quelque chose de plus.. tonique, à nous offrir ?  

De retour au salon, Loktar s'était approché du pianiste et l'avait chauffé à blanc de façon à ce que celui ci redouble d'effort. Le soliste se lança dans un rythme beaucoup plus effréné sans pour autant rogner sur la qualité. Loktar s'approcha et lui glissa dans le dos un état des lieux (faux, bien entendu) comme quoi les deux femmes étaient en hypnose devant son talent et qu'il devait bien l'avouer, il commençait à être jaloux de ses prouesses. Tout ceci emballa encore plus le musicien qui entra dans une transe et fit résonner le rez-de-chaussé par son énergique mélodie.

Tellement concentré sur sa partition, le musicien ne vit pas Loktar proposer aux jeunes femmes de monter dans les étages. Laissant le pianiste faire son concerto pour le tapis en peau de bête et les quelques lustres de la pièce. Loktar, lui, ricanait et s’enorgueillit de sa perfidie. Une demoiselles dans chaque bras, il s'adressa aux deux conquêtes de la soirée.

Votre présence en cette modeste demeure me donne des ailes. Je me sens au paradis et j'aimerai vous faire partager l'éden. Entre ces murs, de briques et de mortier, il existe un endroit où j'aime lézarder durant des heures. Il m'inspire et me fait me sentir tout petit. Vous voulez mesdames, vous sentir toutes petites devant l'univers ?




Dernière édition par Ankoü le Mer 19 Fév 2014 - 20:39, édité 1 fois
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Après que Loktar ait quitté la pièce, le cambrioleur s’assit sur une chaise, et poussa un long soupir de soulagement !

Bon, et je fais quoi maintenant ?
Vu qu’il a l’air de te prendre pour un employé, tu devrais en profiter.
Oui. Mon mensonge a marché, hein ?!
C’est… étonnant, d’ailleurs.
Mais si ! Après, tout, j’ai tout de la personne fréquentable : les dents bien limées, les cheveux très bien coiffés…
Ça n’a pas l’air de correspondre à la description de l’individu « normal » ici. Peu importe ! Fais ce qu’il t’a dit, et profite de ta couverture pour finir tes affaires !
D’accord, mais…
Qu’est-ce que tu vas encore trouver à redire ?
Eh bien… non, rien.


Il y avait les trois bouteilles, sur la table. Et puis le seau à glaçon à demi vide, qu’il avait utilisé pour soulager son pied. Jouer au serviteur, Ange savait faire : parmi les différentes étapes de sa vie peu reluisante, il avait eu un peu d’expérience dans le domaine. Pour commencer, il enfila un tablier : ça donnait un air de « serveur en cuisine », et ça cacherait la misère. Ensuite, il chercha un plateau. Oui, mais… la cuisine était immense, et il y avait des placards partout !  Tant pis, le gars se contenterait d’une assiette pour se faire servir ses bouteilles. D’ailleurs, il avait demandé la quelle en premier ? Mais l’avait-il seulement dit ? Oh, dans le doute, il apporterait les trois ! Il y ajouta aussi trois verres à pied, dangereusement en équilibre.

Son plateau préparé, le serviteur improvisé quitta la cuisine. Mais, à peine avait-il passé la porte qu’il s’arrêta brusquement.

On peut savoir ce que tu comptes faire ?
Eh bien… servir le vin ?...
A quoi bon ? Tu sais que le proprio est dans une pièce à l’écart, ce qui veut dire que tu as le champ libre !
C’est-à-dire que je peux cambrioler la maison sans risque ?
Mais c’est qu’il t’arrive de comprendre vite ! Allez, au travail !


***

Retour dans le salon, ou Sinibaldo di Capizzi enchaine avec ardeur les passes de doigts sur le clavier du piano. Le morceau va en crescendo, le pianiste enchaine les notes de plus en plus rapidement, et toute l’assistance, s’il y en avait eu encore une, en aurait eu le souffle coupé ! Sur un double do grave avec point d’orgue, Sinibaldo conclut son morceau. L’homme, qui se voyait déjà avec une couronne de lauriers sur la tête, se préparait à s’incliner avec satisfaction sous les applaudissements frénétiques de ses deux amantes, et même de son rival… Au lieu de ça, rien, le silence. C’était un résultat auquel il n’était gère habitué. Saisi d’un mauvais pressentiment, il se retourna vers les fauteuils : personne. Et sur le grand canapé de velours, personne non plus. Il était seul dans la pièce. Pourtant, il avait la désagréable impression qu’on le dévisageait. C’était comme se faire scruter du regard par un gros chat de gouttière, sans que l’on puisse savoir s’il vous contemple de toute sa malice et sa fourberie, vous considérant comme le dernier des imbéciles et sa prochaine victime, ou si c’est juste un gros chat un peu sale qui vous fixe parce qu’il n’a rien de mieux à faire en attendant que vous fassiez tomber votre sandwich.

L’homme qui le regardait n’était pas un chat de gouttière : il était pire ! Si au premier regard, Sinibaldo n’hurla pas, c’était parce que son pragmatisme lui fit penser que ce type, tout crasseux, avec les cheveux longs, sales, et très, très bizarrement coiffés, avec ses dents en pointe et son sourire à la « oh-super-je-viens-de-trouver-mon-diner-,-et-même-que-c-est-toi-! », n’était en fait que le valet des Grissac. Oui, c’était ça : toutes les riches familles avaient tendance à embaucher de pauvres malheureux délaissés par la nature. Des boiteux, des bossus, des aveugles, alors pourquoi pas des… des clochards un peu bizarres, ou… non, non, ce n’était sûrement pas un sauvage psychopathe ! Ça n’existait pas, et surement pas dans une ville comme Inu Town !
A moins que… Loktar n’ai voulu se débarrasser de lui, en laissant agir son valet fou.
Impossible ! C’était… illégal, non ?
Si au moins l’autre pouvait arrêter de le dévisager en souriant !

Eh bien, ne reste pas planté là ! Dis quelque chose !
Bah oui mais qui est ce type ? Il ne devait y avoir personne dans la maison.
Peut-être un employé. Le gars pour mettre de l’ambiance. Ou alors… le frère du gusse de tout à l’heure. Débrouille toi, un peu !
Mh… je ne sais pas. C’est vrai qu’ils se ressemblent un peu tous, mais c’est peut-être juste à cause de la moustache et du costume de soirée chic moche.


- Euh… c’était pour vous le… euh… les bouteilles ?

Le pianiste le regarda avec un air encore plus incrédule. Ange, qui avait déjà oublié les instructions de Loktar concernant le jeune homme, lui tendit obligeamment une bouteille. Et puis le sauvage remarqua le piano. Il en avait déjà vu, mais sans savoir à quoi cet espèce de table avec une ligne de rectangles noirs et blancs pouvaient bien servir. De part son expérience personnelle, ça devait être un genre d’alarme qui faisait du bruit lorsqu’un cambrioleur négligeant posait le coude dessus.
Devant l’attitude servile du nouveau venu, Sinibaldo retrouva un peu de son aplomb. S’efforçant d’adopter une expression affichant un mépris hautin, il s’adressa au pseudo-serviteur :

- Alors comme ça, vous êtes un serviteur des Grissac ?!

C’est quoi un « Grissac » ?
On s’en fiche, dis oui.
Mais si je dis une bêtise ? Je ne risque pas de me faire démasquer ?
Bah ! C’est toujours plus facile de dire « oui » si tu ne sais pas. Si c’est un bavard, il te donnera les informations tout seul.
Mais je ne veux pas faire ça, moi, de toute façon ! Je veux juste cambrioler la maison et rentrer me mettre à l’abri dans une poubelle bien au sec !
Raison de plus pour en finir rapidement. Tu n’as qu’à te contenter de hocher la tête. Comme ça, s’il te tend un piège, tu pourras toujours te défendre en affirmant que tu n’as rien dit !
Je ne suis pas sûr de tout comprendre, mais d’accord…
Tu n’as pas besoin de comprendre : tu dois juste obéir.


Effectivement, le pianiste de demandait qu’à parler. Et que son interlocuteur se contente d’acquiescer… eh bien c’était tout aussi bien ! De toute façon, un hurluberlu pareil n’aurait rien eu de très sensé à dire.

- J’ai été mené en bateau, d’un bout à l’autre. Cet homme… il m’a ridiculisé. Humilié ! Et devant des demoiselles, qui plus est !
Hochement de tête de la part du sauvage.
… ça doit être facile d’être comme toi, hein ? Pas de responsabilités, pas d’honneur à défendre !

Ce n’est pas très sympa, si ?
De toute façon, tu n’es même pas sensé lui répondre. Souris lui juste, et continue de secouer gentiment la tête.
D’accord.
Et sans montrer tes dents ! Tu vas encore l’effrayer !


- Oh, mais il ne s’en tirera pas comme ça. Je lui montrerai moi ! Il verra, il verra bien !!!
Pas les dents, on avait dit !
… et puis après tout… ha, haha ! (le genre de rire désespéré qui sonne faux) … si c’est tout ce qu’il peut se payer comme valet ! Un type aussi moche et crasseux… ha !
- …
- D’ailleurs, tu ne sais rien faire d’autre que hocher la tête et sourire bêtement ?! Bah, laisse tomber… de toute manière, tu ne comprends surement rien à ce que je te raconte !
- …
- Et tes bouteilles, elles sont surement pour Grissac et ses invitées, pas vrai ? Mes invitées en fait…
- …
- Ils n’auront pas besoin de trois bouteilles, alors donnes m’en une. Donnes, je te dis :de toute façon Anastasia-Coquelicot ne tiens pas du tout l’alcool. Et ensuite… laisse-moi seul !

Désirant avant tout ne pas contrarier l’homme, Ange lui obéit et tendit au hasard une des trois bouteilles. Puis fila sans demander son reste. Enfin, les choses sérieuses allaient pouvoir commencer ! L’autre jeune homme attendrait ses bouteilles longtemps.


***

Dans la véranda, au sommet de la somptueuse maison, les deux demoiselles avaient passé un long moment d’émerveillement en compagnie du maître de maison. Et puis l’une d’elles, Pervenche, en avait eu marre de tenir le second rôle assez peu valorisant de faire valoir pour séducteurs, et d’objet de commentaires désobligeants à propos de son rire ridicule et un peu agaçant ! Aussi avait-elle tenu  à montrer à Loktar comme elle récitait bien la poésie ; mais en fait, elle le faisait assez mal, entre autres parce qu’elle ne pouvait pas s’empêcher s’étouffer de rire après chaque vers.

Ce qui mit fin au supplice du jeune Don Juan et d’Anastasia-Coquelicot -qui affichait ouvertement son mépris-, ce fut un énorme bruit qui retentit dans toute la maison. Un bruit, comme celui d’une gosse étagère qui dégringolait en se vidant de son contenu, parce qu’un imbécile à la cheville foulée avait tenté de l’escalader pour voler la série de bibelots dorés qu’elle exposait. Si, si, il existe un bruit pour ce genre de chute : une espèce de « Aaaah !-Baoum-Spladabam-Craaac-Sbling-Psiiiing ».
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Les rafraîchissement tardaient à arriver, Loktar aurait du être anxieux, il aurait du pester contre l'incapacité du petit personnel à remplir des tâches pourtant faciles. Mais non, tout allait bien et pour cause. La chaleur de la véranda qui avait baigné dans le soleil une bonne partie de l'après-midi, juste avant l'averse, rayonnait encore. Tout était parfait, tellement parfait que les dames délassèrent un peu plus leurs corsets afin de pouvoir respirer naturellement. Les quelques millimètres de chairs découverts en plus faisaient frémir de joie le jeune polisson. Il avait bien entendu sa préférée, il faut dire qu'il n'y avait pas photo en la matière. Anastasia-Coquelicot avait été clairement beaucoup mieux loti par dame nature mais Pervenche affichait elle, d'opulents arguments. Alors que la dernière tentait une poésie improvisé, l'autre susurrait des mots à l'oreille de Loktar. Plus le temps passait plus son sourire s'agrandissait. La concurrence était rude entre les demoiselles et Loktar avait fait sa part de marché. Il n'aurait plus qu'à trancher entre les deux dès que l'occasion se présenterait. Malheureusement, celle-ci ne se pointa jamais. Tout comme les boissons et le serviteur d'ailleurs...

***

Un policier arriva devant la grille, l'air concentré, le regard vissé sur les fenêtres pour essayer d'y voir plus clair. Était-ce une patrouille de nuit faisant du zèle ? Un gardien de la paix légèrement voyeur ou trop curieux ? Non, simplement un brave homme répondant à l'appel de détresse de deux jeunes servantes. Celles-ci n'avaient pas osé s'approcher, de peur de revoir le "monstre" quelles avaient décrites au fonctionnaire. Celui-ci, matraque en main décida de pénétrer sur la propriété. Il savait très bien à qui elle appartenait et il n'y avait jamais eu de problème, les Loktar étaient aimés de la population et personne n'aurait songé à leur faire le moindre tord.

Prudemment, consciencieusement, l'officier approchait de la maison. Il regardait ici et là, cherchant des traces suspectes à la faible lueur de sa lampe. Ne repérant rien, l'homme se dirigea vers la porte principale afin d'écouter cette mascarade. Après tout, il venait d'entendre des bruits de piano.. Quel voleur irait jouer du piano ? Personne.. Donc l’officier conclut à une mauvaise blague du fils Grissac. C'était bien son genre de martyriser le petit personnel.

Il était à deux doigts de tambouriner l'épaisse double portes quand celle-ci s'ouvrit avec fracas. L'homme surpris leva le bras pour armer un coup de matraque. Sauf qu'en face de lui, ce n'était pas un monstre, encore moins un voleur, simplement Sinibaldo qui à moitié ivre avait décidé de quitter la petite fête. L'agent nota dans son rapport la chose cocasse suivante: "L'individu n'a pas obtempéré. Visiblement éméché et énervé, celui-ci n'a pas expliqué sa présence sur les lieux et m'a fait un geste obscène. J'ai du le neutraliser".

***
Alors que son rival mélomane et mégalomane se faisait embarquer sans ménagement par l'officier jusqu'au poste de garde le plus proche, Loktar, lui, faisait glisser ses mains dans les mains d'Anastasia-Coquelicot, ses pieds sur le parquet, ses yeux dans le décolleté, ses narines sur le parfum exquis et ses oreilles sur une petite valse à trois temps que jouait un instrument sans vie dans le coin de la véranda. La pauvre malheureuse pervenche commençait à voir rouge et elle aurait bien fait un scandale si un bruit de fracas n'avait pas ébranlé la maison. L'officier de police aurait surement donné plus de crédit aux servantes si il avait entendu le bruit mais hélas, il avait déjà tourné à l'angle du quartier suivant, Sinibaldo, inconscient, sur ses épaules.

La secousse fit sauter le disque qui sorti de sa course, coupant instantanément la musique. Les oreilles aux aguets, Loktar analysait la teneur de l'écho, les bruits persistants. Il essayait de matérialisé le lieu de l'incident. Les deux demoiselles quant à elles, restèrent inquiètes, les mains jointes, près de leurs bustes, attendant la suite. Loktar se dirigea vers l'escalier de la véranda et passa la tête dans le montant, tentant de percevoir d'autres signes. Soudain, un déclic se fit, ce vacarme venait de sa bibliothèque, il l'aurait juré. Une grimace contrit s'empara de son visage qui s'empourpra. Les muscles de sa face se crispèrent tous un à un, le reste du corps suivi de près. Il avait envie de lâcher une insulte, un juron, proférer des menaces, promettre des sévices et châtiments mais il ne fit rien. Était-ce l'émotion ou la présence des demoiselles qui le retint ?

Quoi qu'il en soit, il dévala quatre à quatre les marches et sprinta jusqu'à son sanctuaire. Qui avait osé ? Ce ne pouvait être que cet ordure de Sinibaldo. Il était furieux, hors de lui, il allait le tuer. Oui voilà ! Il allait le provoquer en un duel, là tout de suite, sur le champs. Les témoins ? Les femmes feraient l'affaire. Il allait le provoquer en duel non pas en le giflant avec un gant mais en lui collant un bourre pif. Ensuite, ce serait un duel au dernier sang. Ce serait rapide, expéditif, il avait osé pénétrer dans le sanctuaire de Loktar et qui plus est, y faire un carnage. Pourquoi attendre le duel d'ailleurs ? Tout en courant, le jeune bourgeois décrocha une rapière de décoration au mur. Il fouettait l'air pour s'échauffer. Il pivota à 90° à l'entrée de son bureau et fit irruption dans la pièce sans s'annoncer.

Sinibaldo ! Orchidoclaste ! Coprolithe ! Coureuse de rempart, je vais vous occire séance tenante !

Hélas, dans tout ce fatras, ce n'était pas le pianiste qui ressortait..

Vous !?
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L'espace sacré du jeune Grissac, sa bibliothèque, était dans un était de pagaille qu'elle n'avait probablement jamais connu. Outre les nombreuses décorations manquantes à divers endroits, une des imposantes -et probablement coûteuses- étagères en bois gisait maintenant sur le sol, fendue en plusieurs morceaux. Les centaines de livres quelle contenait s'éparpillaient par terre, leurs couvertures froissées et les pages pliées. Au milieu de ce carnage, le sac de nourriture volée du sauvage s'était vidé, salissant irrémédiablement les précieux ouvrages avec des taches de gras de viande et de fruits et légumes écrasés.
Ange émergea de sous l'armoire, encore plus ahuri qu'à son habitude.

Quel maladroit tu fais !
Ce n'est pas ma faute ! C'est cette... étagère. Elle n'est vraiment pas solide ! C'est bien dans les habitudes des riches civilisés, ça : très tape à l’œil, mais fragile.
Évidemment, avec un empoté qui essaie de l'escalader avec les deux mais prises.
Je ne pouvais pas savoir que tout allait se reverser. Et puis... j'ai mal maintenant ! Je crois que j'ai une grosse bosse sur la tête ! Et ma cheville est toute violette !
Tu ne peux t'en prendre qu'à toi, gros nul ! Bon, avec le vacarme que tu as fait, quelqu'un ne va pas tarder à débarquer alors tu ferais mieux de filer en vitesse.
Je ne sais même pas si j'arriverai à marcher.
Tu as intérêt !


Le cambrioleur malchanceux n'eut cependant pas le temps de mettre son projet à exécution, puisqu'à cet instant le maître des lieux fit irruption dans la pièce, rouge de colère ! Toujours sous le choc, Ange hésitait à propos de la conduite à tenir.

- Hein ? Ahem... oui, c'est... moi. Le valet.

Il accompagna ses marmonnements d'un esquisse de sourire gêné, comme si ce qu'il venait de commettre la n'était rien de plus qu'une vague maladresse, comme de renverser son verre d'eau sur la nappe.
A cause de ses dents, son sourire donnait aussi l'impression qu'il se demandait quel goût pouvait bien avoir Loktar.

- Et puis, c'est quoi un "Copopolite" ?

Vraiment, tu n'as rien trouvé de mieux à dire ?!
Eh bien... c'est vrai  que c'est un drôle de mot.
Orchidoclaste non plus tu ne sais pas ce que c'est. Ni occire.  Ni Sinibaldo. Mais ce n'est pas le sujet, andouille ! On parle du moyen de t'éviter la prison !
Ah ? Mais je n'ai qu'à lui inventer un petit mensonge, et m'excuser de ma maladresse. Et dès qu'il sera parti, je ramasse mon butin et je file ! Haha !
Bravo ! Félicitations, monsieur le roi des plans stupides !
Mais... ?
Tu étais sensé lui apporter son vin, et il te retrouve ici, avec deux sacs de butin vidés à tes pieds ?! Sans compter qu'il a l'air furieux à cause des dégâts.


Un léger bruit de course indiqua que les deux compagnes de Loktar l'avaient rejoint.  Comme si la situation n'était pas déjà suffisamment délicate, l'une des deux jeunes femmes en rajouta une couche en s'écriant : ooooh ! Un clochard dans votre bibliothèque !

Le sauvage leur jeta un vague coup d’œil, comme à deux personne négligeables qui n'auront de toute façon pas leur mot à dire dans le dénouement de l'histoire. Il prit toutefois un moment pour s'étonner, et se demander pourquoi deux personnes probablement saines d'esprit, et par ailleurs certainement très gentilles et aimables, se retrouvaient ainsi à se dévaloriser, en servant de... quoi, d'ailleurs ? De dame de compagnie ? De courtisane ? A un homme qui sans aucun doute les méprisait, juste parce qu'il était riche et -probablement- séduisant. Pas selon ses critères à lui bien sûr, puisque avec ses dents toutes plates et ses cheveux même pas tressés, il serait passé pour négligé et plutôt moche dans la tribu d'Ange.
Après tout, c'était ça un civilisé : un amas de comportements aberrants. Et c'était loin d'être le sujet de réflexion le plus urgent ! Il reprit donc, peu sur de lui :

- Ah, mais je... euh... je... faisais du rangement !

On avait dit que ça n'allait pas comme excuse, ça !
Alors je dis quoi, moi ?! Je ne la sens pas bien cette histoire ! J'aurai du filer aussitôt après avoir mangé !
Si au moins tu ne lui sortais pas des mensonges aussi nuls !
Je fais ce que je peux, moi. Et.... aaaah, il a une épée !


En voyant l'arme, toujours tendue dans le bras du jeune riche, le voleur se replia vivement sur lui même. Malgré la douleur qui le lançait à la cheville, il était prêt à bondir pour éviter de se faire transpercer. Son regard fou n'arrivait pas à se détacher de la lame.

Repends toi, bon à rien !
Mais je mais je mais je mais je fais quoi ???
Continue de donner le change. Ce gusse considère tous ses serviteurs comme des moins que rien. S'il te prend juste pour un imbécile sale et maladroit, il te reste une petite chance.


Ange déglutit. Rien dans sa posture ne changea, le ton n'y était pas non plus, mais il essaya toutefois :

- Je... suis désolé pour votre étagère. Et pour votre vin. Enfin... le monsieur qui jouait du... enfin vous savez, la table avec les bidules blancs et noirs, qui fait de la musique... C'est lui qui m'a pris les bouteilles.


Tout en bredouillant, le sauvage avait ramené ses jambes vers lui, prêt à se redresser. Les chances pour qu'il s'en sorte par de simples mensonges étaient minces, et s'il n'y arrivais pas il serait contraint de se battre pour se frayer un chemin : dans son état, il ne pouvait de toute façon pas fuir autrement. Il y avait aussi la possibilité -pas énorme, mais à prendre en compte- qu'il n'ose pas mettre les deux femmes en danger.

Il avisa près de lui un lourd volume intitulé "L'étiquette, les bonnes manières, le savoir vivre", dont la tranche avait été aux trois quarts arrachée à cause de la chute. Les livres ne l'intéressaient habituellement pas car leur valeur était bien trop difficile à estimer, mais celui-ci ferait un parfait projectile ! Faute de blesser sérieusement son adversaire, il pourrait au moins lui offrir une diversion le temps de lui bondir dessus et de lui lacérer le visage avec ses ongles longs ! Tout en fixant  son interlocuteur dans les yeux, il étendit son bras et posa délicatement la main sur le  livre, prêt à s'en saisir. Puis il attendit, avec angoisse, la réaction de l'autre.
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Le valet débitait des phrases mais Loktar faisait la sourde oreille. Il approchait, lame en main, vers le serviteur maladroit. Dans ses yeux, on pouvait y voir l'absence de compassion, l'amertume et la rage. Il était clair qu'à cet instant, il n'y avait plus aucune âme de gentlemen en Loktar, simplement celle d'un homme qui crie vendetta ! Chaque pas comblait la frontière entre l'écrivain amateur de thriller et le meurtrier. La lame oscillait dangereusement et le poignet du jeune homme était vif. Arrivé devant le valet, Loktar regarda à droite puis à gauche. Partout, des livres, des pages arrachées, des verres brisés, des statuettes et autres décorations, du bois brisé. La pommette gauche de Loktar sautillait nerveusement tout seule. Il était clair que rien ne beau ne laissait présager de cette situation.

Très cher ami, votre notion du rangement est dès plus étrange. Cette pièce est strictement interdite au personnel en mon absence. Tout ceux qui travaillent ici le savent, même les nouveaux. Alors voici la seule préoccupation de votre cinq prochaine secondes: Qui êtes-vous ? Que faites vous dans ma demeure ?

Pour être franc, Loktar s'en contrefichait de la réponse, ça se trouve, le pauvre gus travaillait vraiment pour la famille. La seule chose que tentait de faire Loktar était de gagner du temps pour ne pas céder aux pulsions meurtrières qui l'envahissait. Les jointures de sa main tenant l'épée était blanche à force de serrer. Il devait occuper son esprit pour éviter de penser au viol de son sanctuaire. Le jeune dandy inspira profondément afin de retrouver un semblant de calme intérieur. Hélas, ce fut tout le contraire. L'odeur nauséabonde du clochard lui ramona la cloison nasale et vint lui soutirer une grimace.

Mais c'est vous qui empestez de la sorte en fait ! Vous vivez comme des bêtes vous autres. Trop c'est trop !

Ulcéré par l'odeur qui lui donnait envie de vomir, Loktar leva la lame pour l'abattre sur le valet. C'était cruel, injuste et complètement disproportionné mais c'était du Loktar tout craché. Il n'en pouvait plus d'attendre une réponse, il n'en pouvait plus d'avoir sous les yeux sa pièce en ruine, il n'en pouvait plus de respirer une odeur fétide de la sorte. Ses nerfs lâchèrent. Mais au moment de frapper, une voie emprunte de légèreté stoppa le geste de l'écrivain amateur.

Loktar ? Tout va bien ?

Les deux conquêtes de la soirée s'invitait dans cette valse endiablée. Loktar dévia son geste et camoufla la lame dans son dos puis il fit demi tour pour faire face à l'entrée de la pièce où venait d'apparaître les deux demoiselles.

Merci de votre sollicitude mesdames, tout va bien, un simple accident domestique semblerait-il. Pas de quoi fouetter un chat. Je donnais quelques consignes au personnel afin de réparer cette erreur. Allons allons mesdemoiselles. Retournons nous amusez et ne pensons plus à ces choses matériels qui ont tendance à avoir trop d'emprise sur nous.

Loktar avança vers les demoiselles et de sa main libre il les invitait à remonter pour s’encanailler. Elle acceptèrent en acquiesçant aux propos tellement justes de Loktar sur le côté matériel des choses. Avant de remonter avec elle, le jeune homme retourna à petits pas vers son valet et lui tint à peu près ce langage.

Vous ne perdez rien pour attendre sac à puces. Vous ne touchez plus rien ici, vous foncez dans votre quartier prendre une toilette sans quoi je vous fais bouillir vif au petit matin. Allez me chercher du vin et au pas de charge de surcroît ! Si ma soirée se termine bien, vous garderez peut-être la tête sur les épaules. Disparaissez !

***

Mais depuis tout ce temps, la soirée était bien avancée désormais et il faudrait bientôt compter sur de nouveaux protagonistes. Les parents Grissac était dans leur fiacre et s’apprêtait à entrer dans le parc. En espérant que ça ne se termine pas en cul-de-sac !
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Dès que le jeune écrivain eut passé la porte, le cambrioleur laissa tomber son arme improvisée et poussa un "pfouaaaaah" de soulagement. Bien entendu, il n'était pas question d'obéir aux ordres de son soi-disant maître. A l'exception du dernier: "disparaissez" !

Hahaha ! Je m'en suis sorti ! On dirait qu'il m'a cru. Je suis vraiment un très bon menteur en fait !
Ou alors, tu es très chanceux. C'est d'ailleurs plus probable. Peu importe, tu dois décamper maintenant !
Je ne finis pas de faire le tour de la maison ?
Non ! Tu as déjà perdu bien trop de temps, et tu t'es fait voir par bien trop de gens. Tu vas devoir quitter la ville sans traîner.


Avec sa chute, le contenu des deux sacs qui lui servaient à transporter le butin s'était déversé par terre ; de plus, l'un des deux s'était déchiré, et était inutilisable. Saisi par une sorte de frénésie, le sauvage se mit à entasser pêle-mêle son butin dans le sac restant, mélangeant nourriture écrasée, œuvres d'art ébréchées, et tout ce qui lui paraissait encore à peu près en état. Sauf les livres. Personne n'allait débourser une fortune pour un livre quand il pouvait à la place acheter une assiette en porcelaine décorée de motifs tarabiscotés et d'une gravure naïve représentant des enfants potelés en robe, jouant avec des cerceaux. Personne de sain d'esprit en tout cas. Enfin, sain d'esprit pour un civilisé bien sûr.

Quand il n'eut plus de place, le voleur fourra le reste des objets dans ses poches, et dans le revers de sa veste. Ainsi chargé, il ressemblait à un étrange bonhomme boudiné, boitillant et déséquilibré par son sac volumineux.

Enfin ! Maintenant, on file !
Je retourne par où je suis passé, alors ?
Est-ce qu'il t'arrive, au moins une fois de temps en temps, de réfléchir ?
Eh bien, euh... ce n'est pas ce que je... ?
Avec l'état dans lequel est ta cheville, tu crois vraiment pouvoir sauter par la fenêtre, puis escalader de nouveau la grille ?
Je n'y avais pas pensé...
Et, avec un peu de chance, en admettant que tu y arrives, tu réussiras bien à  de démolir l'autre pied en redescendant !
Pardon...
Et tu feras comment pour t'en aller une fois dans cet état, hein ?!
Hum, je... euh... en rampant ?
Au lieu de penser des âneries, tu vas passer par la porte d'entrée. Maintenant que l'autre idiot de jeune moustachu super-snob est dans la maison, elle est sûrement ouverte.


Se traînant comme il le pouvait, Ange se rendit du côté du hall, qui donnait vers l'extérieur. Au passage, il rafla une splendide canne à pommeau pour s'aider à marcher.
La maison était une construction de bonne qualité. Entre autres, elle était bien isolée, aussi le sauvage n'entendit-il pas le bruit du fiacre qui se garait devant la demeure, ni les bruits de pas de Mr. et Mme. Grissac, précédés de leur cocher, qui rentraient chez eux. En fait, il ne s’aperçut de leur présence que trop tard, lorsque le valet et lui-même ouvrirent simultanément la porte.

Le sauvage resta un moment ébahi, la mâchoire grande ouverte et les yeux écarquillés. Les maîtres des lieux affichaient une expression semblable, quoique plus distinguée. Les yeux de Grissac passèrent d'abord en revue de visage de son vis-à-vis. Ils renvoyèrent à son cerveau des informations traduisibles par "hurluberlu", "horrible personnage", et "clochard". En détaillant ses vêtements, il souligna par deux fois la mention "clochard". Puis il remarqua la canne, et surtout le sac plein à craquer. Cette fois-ci, Mr. Grissac n'hésita plus sur le qualificatif à attribuer au nouveau venu : voleur.
Vêtu de son riche costume de soirée Mr. Grissac senior ne manquait pas d'allure. On l'imaginait facilement homme à commander ses semblables, et surtout ne se laissant pas marcher sur les pieds, ni ennuyer par un simple cambrioleur. ! Mais son aura gagna encore en prestige lorsqu'il tonna d'une voix forte, le visage rouge de colère :

- Louis ! Ah non, il est rentré chez lui. James ! Apportez-moi mon mousquet ! Je vais nous débarrasser de  ce misérable !
- Mais non, je suis jute le, le, le … le... le nouveau valet. D'ailleurs je m'en vais. Tout de suite. Euh... nyaaaaaaaah !
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