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Et toi, à quoi tu joues ? [PV un assassin sans imagination]

Il y a 6 mois, sur une île quelconque d'East Blue...


    « Lâchez-moi ! »

    Le cri retentit dans une sombre ruelle. Aigu, apeuré, la jeune femme qui s’est fait coincer par un officier de la marine se débat. En vain. Ses mains coincées au-dessus de sa tête, elle s’agite, cherche à se dégager. Le soldat sourit et lui souffle de se calmer, qu’ils vont passer du bon temps ensembles. Son haleine pue l’alcool, mais sa prise est ferme. Sa victime crie plus fort, remue de plus bel. Dans son regard dépareillé, l’homme aviné voit de la peur. Son sourire s’élargissant, il entreprend de passer sa main sous la robe de la jeune femme.

    ***

    « Vous êtes sûr ? »
    « Absolument certain. »
    « Bien. »

    Un sourire peu rassurant s’étendit sur le visage de Louise. Elle laissa glisser quelques berrys dans la main de l’homme défroqué qui l’avait renseignée et quitta la ruelle sombre. Elle avait bien fait de venir jusqu’à East Blue. Depuis les semaines où elle les traquait, elle obtenait enfin une vraie piste sur les révolutionnaires. Avec un peu de chance, elle pourrait les débusquer le soir même. Ses sources lui avaient affirmée que ceux qu’elle cherchait se trouvait en ville. Si c’était vraiment le cas, ce serait un vrai jeu d’enfant. Mais avant tout, un peu de shopping !

    Par chance, la blonde avait récupéré un peu d’argent en livrant aux autorités un bandit de bas étage. Un voleur qui ne valait même pas ce qu’il dérobait, mais l’argent était toujours bon à prendre. Surtout avec ce que la jeune femme présageait. Pour ce soir, ses habituels vêtements ne conviendraient pas. Elle aurait besoin d’être une autre, d’endosser un rôle. Ce ne serait pas la première fois, ni la dernière, mais cela nécessitait toujours une certaine préparation. Une préparation qui demandait quelques menues dépenses. Des dépenses qui ne lui ressemblaient pas. Aussi, quand la chasseuse de prime entra dans une boutique de vêtements, elle ne put contenir un soupir affligé. Affliction qui s’accentua lorsqu’une vendeuse s’avança vers elle avec un sourire commercial et une démarche ridicule.

    « Bonjour Mademoiselle, puis-je vous aider ? »
    « Je… »
    « Non ! Ne dites rien. Je vois bien que vous avez besoin de refaire votre garde robe. Vous semblez sortie d’un bordel, ce n’est guère adapté pour sortir. Laissez-moi faire, je me charge de tout ! »

    Louise la contempla, l’air interdit. C’était quoi ça ? Si elle traitait ainsi tous ses clients, les affaires ne devaient pas être spécialement fructueuses. Mais bon, la blonde était convaincue qu’elle reviendrait avec ce dont elle aurait besoin. Ou tout du moins, elle l’espérait.

    Quelques minutes plus tard, la vendeuse revint avec une pile de vêtements dans les bras. Sans les avoir encore vu, Louise savait qu’ils défiaient le mauvais goût et que jamais elle ne porterait ça si elle n’y était pas contrainte. Ce fut donc en réprimant des grimaces de dégoût qu’elle observa la vendeuse lui proposer robes à froufrous, jupes bariolées et autres ensembles à paillettes. Plus kitsch, tu meurs. Louise sentait venir la crise d’épilepsie lorsque – enfin ! – on lui montra une robe courte et blanche, simple et mignonne. Elle était tout ce qu’il y a de plus décent, les quelques nœuds et autres dentelles étaient placés avec goût et elle semblait taillée pour une jeune fille modèle. Exactement ce qu’il lui fallait !

    « Je la prends. Et celle-là uniquement. »

    Le ton employé par la blonde avait suffit à convaincre la commerçante de ne pas insister et ce fut avec un sourire forcé qu’elle observa sa cliente partir, un seul et unique sac à la main. Ladite cliente, elle, se dirigea vers un hôtel pas cher où elle se paya une chambre. Là, elle déposa ses affaires et commença à se préparer. Une fois n’est pas coutume, elle se natta les cheveux soigneusement et se maquilla de manière naturelle. Lorsqu’elle sortit de l’hôtel, elle n’était plus la salope de base, elle était devenue une jeune femme élégante et douce. Une bonne blague pour qui la connaissait.

    Pendant une heure ou deux encore, Louise se balada en ville. La soirée n’était pas encore avancée pour se rendre là où se trouvaient potentiellement les révolutionnaires. Pendant une ou deux heures encore, elle se fit à son rôle, s’obligeant à ne pas se montrer aussi hautaine et provocante qu’habituellement. Finalement, lorsque la lune fut haute dans le ciel, la blonde se dirigea vers les bas-fonds de la ville. Les quartiers étaient plus sordides, moins entretenus. Les tavernes mal famées faisaient également légion. Louise ne leur prêta d’abord pas attention puis décida finalement de s’arrêter vers l’une d’elle dont l’enseigne était « Le Paladin ». Pour la suite, elle n’avait plus qu’à patienter. Prenant un mine mal à l’aise, comme si elle ne savait pas ce qu’elle faisait ici, la jeune femme reluquait la porte, ayant l’air d’hésiter à entrer. Régulièrement, des hommes ivres en sortaient et la regardaient comme si elle était une attardée. Puis, après quelques minutes, son attente fut récompensée.

    Un marine encore vêtu de son uniforme sortit du Paladin. Il la repéra presque immédiatement et, tout alcoolisé qu’il était, s’approcha d’elle. Le vin aidant, il se montra très vite provoquant, la coinçant contre un mur, essayant de lui porter les derniers outrages.

    « Lâchez-moi ! »

    Si l’homme n’avait pas été aussi saoul, il aurait peut-être remarqué que la blonde n’était pas sincère. Il aurait peut-être vu le demi-sourire qui, pendant une seconde, avait pris la place de la peur. Evidemment, rien de tout cela n’arriva. Fier de lui et de la pauvre jouvencelle en détresse qu’il venait de trouver, il se contenta de passer sa main sous sa jupe, ignorant les larmes que la belle parvenait à faire couler sur commande.

    « S’il vous plait… »

    Ultime supplique. Ultime espoir que la scène éveille l’esprit chevaleresque de ceux qu’elle cherche.
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La nuit n’est que le linceul de notre propre fin. Enrobée de ténèbres, elle s’immisce entre chacun de nos os et rongent petit à petit ces brins de vie qui nous constituent. Certains appellent ça vieillir mais ils se trompent car à l’image de la gangrène, les ténèbres déferlent sur le monde, sur les hommes et les abreuvent de faux-semblants. Ils chancellent, perdent foi et se prêtent à des actes vils, guidés par la cupidité et le pouvoir. L’humanité perd alors ce qui fit d’elle une puissance guidée pour l’intérêt commun et voit alors l’entendement personnel mettre à bas cette simple règle. Cette fourmilière ne faisait pas exception et la noirceur de son âme n’avait d’égale que l’ampleur de la réponse qui lui serait administrée. La corruption grandissait à une telle vitesse que même les âmes charitables se retrouvaient avalées par ce miasme corrupteur et implacable. Les quelques hommes de bien avaient fuit depuis longtemps la place et les criminels arboraient pour la plupart un uniforme, se targuant de leur capacité à faire office de loi en des temps aussi sombre. Les nuages cachaient à la Lune ce sinistre constat, ces Marines qui se pavanaient dans la discorde et prenant profit de la mort des faibles. Ils opprimaient, pressaient la cité pour en tirer le jus mais ne se rendaient pas compte à quel point leur entreprise étaient pitoyable. Ils n’en récoltaient que le fiel abject des graines qu’ils avaient semé et seule la purification de ces terres pouvaient espérer tirer quelque chose de bon de ce peuple abandonné. Si tous s’étaient détourné de la voie de la sagesse, une seule âme ne pouvait fermer les yeux sur ce triste constat. Une âme qui n’était ni tiraillée par les besoins obsessionnels de ses semblables, ou encore une quelconque pitié envers ce charnier. Perché en haut d’une tour aussi large que haute, un ombre observait le monde sombrer avec un flegme inébranlable. Le feu n’était pas le moyen qu’il arborait pour élever les strates de cette conscience commune. Non, il ne désirait pas purifier chaque être d’une mort précoce et stérile mais préférait semer ses graines de discordes afin de permettre au système lui-même de se détruire. Rester cet agent du chaos insaisissable qui épargnait ceux qui souffraient le plus et condamnait ceux qui profitaient de cet état de crise. Sa lame n’était pas au service de la justice, mais à celui du peuple. Il pensait au bien de ses semblables, et plus que cela il savait ce qui était bon pour eux. Animé par une sombre vengeance, il était incorruptible. Indéfectible. Un Chevalier sans armure, un combattant de l’ombre qui se nourrissait de la peur du peuple pour y faire naître les graines du courage et épancher chez les tyrans les prémices de la peur. Il était un sombre serviteur des citoyens et ceux-ci préféraient le craindre que de se ranger de son côté. Ainsi, il en était capable. Capable de déclencher des carnages sans précédent, de torturer. Il devenait un monstre mais ses actions étaient si étudiées que leurs conséquences naissaient d’elles-mêmes dans l’esprit des hommes libres. Se créait de cette manière l’aboutissement de sa volonté, car les opprimés finissaient par prendre les armes contre les tyrans et les régimes autoritaires se voyaient renversés. La diplomatie du poignard était la plus efficace pour crever les abcès d’une société sur le déclin. Et cette purge était nécessaire.

Une ombre noire promenait ses yeux sur la ville, abrité par l’obscurité de la nuit. Sous le couvert de sa capuche, elle était méconnaissable, mais l’assassin était étrangement connu. Il avait besoin de faire savoir aux hommes qu’il était là, qu’il pouvait surgir en permanence. Ainsi ils apprenaient à le craindre et cette peur engendrait les prémices du changement. En cette sombre soirée, le jeune Auditore ressentait une haine comme il n’en avait jamais éprouvé. De voir autant de vies gâchées, autant de reddition ou d’abnégation le répugnait. Les hommes naissaient libres et égaux, jamais pour servir de bétail à des chefs qui ne méritaient pas de l’être. Il voyait le salut de l’humanité en chaque être, un talent inné qui ne demandait qu’à croître. Le sien consistait à tuer, mais il ne l’accomplissait pourtant pas avec plaisir. Cependant, avec le temps, tuer lui devenait de plus en plus naturel, tout autant que les inégalités accroissaient sa hargne. Rafaelo ferma les yeux un instant, se laissant bercer par le flot constant de la ville. Il écoutait sa rumeur, paisiblement, et laisser le rythme de son cœur se calquer sur cette valse incessante et bruyante au possible. Les cris étaient nombreux, mais de son perchoir il ne pouvait tout voir, ni entendre. Il avait grimpé ici pour se raccorder avec lui-même et passer un peu de temps à apaiser son âme. Il transpirait la haine à tel point qu’il était à deux doigts de s’emporter. Son empathie lui jouait des tours, mais c’était un mal nécessaire pour sauver ces hommes. Il se coupa du monde par la seule force de son esprit puis une fois qu’il fut certain d’être enfin en paix, il se laissa glisser de son promontoire. Sa demi-cape claqua au vent alors qu’il enchaînait avec une rapidité stupéfiante les prises les plus improbables. Cette tour était aussi un défi à ses propres capacités physiques. Mens sana in corpore sano.


La ville débordait d’une vie lugubre en de tels instants. Se frayant un chemin entre les citoyens qui avancée tête baissée, l’assassin relevait la tête avec arrogance. Il dévisageait les Marines non sans insolence et prenait un malin plaisir à leur dérober leur maigre pécule en sectionnant les fines lanières de cuir maintenant leurs bourses à leurs ceinture. Il joua ainsi avec le feu jusqu’à ce que la recrudescence de Marines soit intolérable à ses yeux et il finit par gagner les toits de la cité, quelques dizaines de minutes après les avoir quittés. Il se hissa ainsi sur un toit, non loin d’une auberge activement fréquentée par les forces de l’ordre puis s’assit sur une malle entreposée au sommet d’un bâtiment, sur un toit plat. Il entreprit alors de sonder l’endroit et d’examiner tous ces Marines qui entraient et sortaient tout en élaborant un plan fictif visant à mettre à feu et à sang cette auberge lorsqu’il aperçu une timide créature dans une robe immaculée, non loin de là. Il riva inconsciemment son regard sur cette pauvre petite chose puis se vit sourire en l’étudiant de près. Ah, il était vraiment incorrigible pour se laisser ainsi distraire. Il suffisait que le délicat parfum d’une femme vienne chatouiller ses narines et il perdait alors tous ses moyens de réflexion. Son frère se moquerait bien de lui s’il l’apercevait en cet instant, mais avoir conscience de la chose lui permettait de se reprendre aussi tôt. L’assassin secoua la tête, chassant la belle demoiselle de son esprit puis se concentra à nouveau sur les réserves d’alcool entreposées dans la taverne, la fenêtre légèrement dégondée au premier étage et les hommes qui sortaient titubant de l’endroit. Il se perdit encore quelques secondes dans des déductions tactiques puis un cri strident le tira de ses pensées.

« Lâchez-moi ! »

Un frisson parcouru l’échine de l’assassin. Il se redressa, et sentit son cœur battre la chamade. Se pourrait-il que … ? Un simple coup d’œil lui confirma qu’il avait vu juste. Une tignasse blonde en bataille maintenue contre un mur par un uniforme bleu et blanc. Son sang ne fit qu’un tour, et sa haine ne fut qu’une timide rime au chuintement des lames qui jaillirent de ses brassards. Rafaelo se laissa glisser sans bruit dans la ruelle et se fondit dans l’ombre aussi tôt. Nul ne vit l’éclat argenté de la Lune se reflétant sur ses armes, pas plus que l’éclat malsain qui luisait au fond de son regard. Aussi silencieux qu’un chat, l’assassin apparut hors de l’ombre juste derrière l’agresseur. Seul le bas de son visage était visible, et on pouvait y voir un malicieux sourire y trôner. Ses deux mains étaient alors invisibles, tout comme ses dagues secrètes. La dernière supplique de la jouvencelle ébranla alors son cœur. Un sillon brillant se dessinait sur ses douces joues, des larmes de détresse coulaient de ses grands yeux de biche. La main du soulard était déjà glissée sous sa robe, il n’avait aucun conscience de la présence meurtrière qui se dressait derrière lui.

« Resquiescat In Pace. » murmura-t-il, avant de s’emparer de la gorge du tortionnaire.

Il saisit sa nuque de sa main gauche puis enfonça sa lame de son autre main entre deux vertèbres, le tuant sur le coup sans lui laisser l’occasion de hurler. Le Marine s’affala sans même comprendre qu’il venait de mourir et l’assassin se recula d’un pas, évitant que le cadavre ne s’écroule sur lui. Il rengaina ses lames d’un seul geste puis se maintint droit devant la pauvre damoiselle. Il inspira un grand coup et tenta de l’apaiser.

« L’heure est trop tardive pour une jeune femme. Cette ville est condamnée, vous feriez mieux de rentrer chez vous et d’éviter de vous exposer ainsi. Seul le hasard vous a sauvé ce soir, ma Dame. Plus de peur que de mal, mais vous avez frôlé bien pire que la mort que je viens d’administrer à ce criminel. Cette ville est pourrie, mais ne perdez pas espoir … un jour viendra où cela changera. » murmura-t-il, se fondant à nouveau dans l’ombre.
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    Invisible, l’ombre fond sur sa proie. Silencieuse, elle le tient. Inaudible, elle le tue.

    Le corps du marine s’affaissa, libérant Louise de son emprise. Parfaitement calme en apparence, elle entreprit lentement de défroisser sa robe et de détacher ses cheveux, sa natte ayant été mise à mal. Pourtant, la sérénité qu’elle laissait voir était à des années lumières de ce qu’elle ressentait réellement. Ses mains tremblaient et elle avait envie de se laisser glisser au sol le temps de se reprendre. N’allez cependant pas croire que tout ceci venait de la peur éprouvée face à son agresseur. Si la blonde l’avait souhaité, elle s’en serait débarrassée sans le moindre problème. Non, le problème était autre part. Juste en face d’elle, en vérité.

    « L’heure est trop tardive pour une jeune femme. Cette ville est condamnée, vous feriez mieux de rentrer chez vous et d’éviter de vous exposer ainsi. Seul le hasard vous a sauvé ce soir, ma Dame. Plus de peur que de mal, mais vous avez frôlé bien pire que la mort que je viens d’administrer à ce criminel. Cette ville est pourrie, mais ne perdez pas espoir … un jour viendra où cela changera. »

    Alors qu’elle reprenait contenance, qu’elle changeait d’attitude pour laisser partir la douce jeune fille qu’elle avait prétendu être, Louise écoutait ces paroles. Prononcées avec sincérité, elle n’en paraissaient pas moins ridicules pour la blonde. Tous ces discours révolutionnaires sonnaient durement à ses oreilles, lui donnaient l’envie irrépressible de frapper ceux qui les proféraient. Elle s’en abstint pourtant, consciente que la colère équivalait à la perte de contrôle, et la perte de contrôle à la défaite. Elle laissa donc son « sauveur » parler, terminer sa tirade. Elle avait des questions à lui poser, et ce n’est pas en répondant agressivement qu’elle parviendrait à tirer quoique ce soit de lui. Mais les événements en voulurent autrement. Ils ne laissèrent pas l’occasion à la jeune femme de s’exprimer. En effet, à peine la silhouette encapuchonnée se fut-elle tu que déjà elle disparaissait dans l’ombre dans laquelle elle était apparue.

    « Merde ! »

    Le juron se perdit dans la nuit. Si près du but, la blonde échouait. De colère, elle frappa le mur contre son dos. Geste inutile qui n’eut pour résultat que de lui écorcher la main. Une nouvelle injure jaillit de ses lèvres avant qu’elle se ressaisisse. Dans un geste nerveux, elle se passa la main dans les cheveux tandis que son cerveau carburait à toute vitesse. Ce n’était pas parce qu’un homme lui avait échappé qu’elle avait perdu toute chance d’atteindre son but. Si une rumeur sur la présence des révolutionnaires avait traversé les blues, ce n’était pas parce qu’un simple péquenot avait décidé de s’établir ici. Il y avait peu de chance pour que le ou les homme(s) quittent les lieux dès le soir même. En se rendant au Paladin, il y avait fort à parier qu’elle trouverait ce qu’elle cherchait.

    ***

    Contrairement à ce que le nom de la taverne pouvait laisser entendre, il n’y avait rien de noble au Paladin. Il ne s’agissait ni plus ni moins que d’un de ces lieux de débauche des bas quartiers. En poussant la porte, Louise ne se faisait aucune illusion sur ce qu’elle allait trouver dans le bâtiment. Des endroits comme ça, elle en avait fréquenté des dizaines depuis qu’elle sillonnait les mers à la recherche de son frère. Ainsi, elle ne fut pas plus surprise par les remugles d’alcool et de sueur que par le bruit assourdissant qu’une bande d’hommes ivres morts pouvaient produire. Lorsqu’elle entreprit de se frayer un chemin entre les tables, pas une main ne parvint à la toucher, l’effleurant à peine. Les gestes des hommes avinés étaient prévisibles, lents et maladroits, guères difficiles à éviter. Ces poivrots, Louise ne leur accorda pas un regard, se contentant d’avancer, visage fermé. En quelques seconde, elle atteint le comptoir.

    « Un César. »

    Le serveur l’observa avec un air étonné. Habitué aux pochards qui peuplaient actuellement les lieux, il n’avait pas l’habitude qu’on lui commande quelque chose de plus recherché qu’une choppe de bière ou de rhum. Après quelques instants de préparation, il tendit le cocktail à la jeune femme qui s’en saisit avant de se retourner, verre en main, en observant la salle. Il y avait pas mal de marines qui venaient se détendre après la fin de leur service, des pêcheurs, des commerçants, des alcooliques, quelques filles de joie dont la vulgarité plaisait aux pirates présents. Mais, au milieu de cette faune agitée et bruyante, Louise ne décelait aucun révolutionnaire. D’un autre côté, il aurait été étonnant qu’ils se baladent avec un panneau « Je suis un révo’ » sur le front. Elle devrait prendre son mal en patience. Avec un soupire, elle porta son verre à ses lèvres et but une gorgée du breuvage. C’était fort, mais ça faisait du bien. Elle avait bien besoin de ça après sa mésaventure de la ruelle.
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Cela ne méritait pas une once de gloire. Une tristesse infinie de voir une autre vie sacrifiée sur l’autel de la violence et de la corruption de cette satanée ville. Même si cet homme arborait un uniforme diabolique, son cœur fut autrefois celui d’un enfant, et s’il avait été avili, ce n’était pas en premier lieu de sa faute. L’assassin ne pouvait déraciner ce mal si profondément ancré sans tailler dans le vif, détruire ces fugaces instants de vie et réduire à néant toute une somme de souvenirs. Il ne tuait pas par plaisir, mais par une implacable nécessité. S’il ne faisait pas ainsi, qui se chargerait de protéger les faibles, les opprimés ? La mort réclamait son dû, et l’assassin n’était pas du genre à faire attendre ses amis. Son bras n’épargnait personne, et parfois cela réclamait des sacrifices, mais il cela ne l’empêchait pas de fermer les yeux, lorsqu’il en avait le temps. La cause qu’il poursuivait était bien plus grande que le simple cadre de la vie d’un seul homme. Lui, en revanche, ne pouvait se sacrifier aussi aisément : il était l’instrument qui ferait jaillir la roue du destin hors de sa ornière. Il était le grain de sable qui rassemblerait les pierres, et leur donnerait la force des montagnes. Ce n’était pas de son ego qu’il était question, mais d’un but qu’il s’était fixé. Il avait placé la barre si haute qu’il n’avait nul répit et pourtant, il aspirait toujours à aller plus vite, plus haut. Chaque défi n’était qu’un obstacle à surmonter coûte que coûte pour l’assassin, et jusqu’à présent, il s’était toujours acquitté avec merveille de cette tâche.

L’ombre était sa plus fidèle compagne. Elle l’embrassait avant qu’il ne parte et se faisait une joie de l’accueillir à chaque retour. Rafaelo laissa là la jeune femme agressée et se fondit dans le décor avec une étonnante habileté. Il la surprit à le dévisager pendant quelques secondes, et fut même intrigué par le subtil juron qu’elle lâcha. S’il était trop loin pour parvenir à l’entendre distinctement, il savait encore lire sur les lèvres. Et ce charmant minois avait éveillé en lui une curieuse envie de s’attarder. Il s’était hissé en haut du bâtiment le plus proche et s’était projeté sur le toit d’en face, celui-là même qui surplombait le mur sur lequel la jeune femme s’était appuyée. Perché là haut, il la surplombait sans même qu’elle ne s’en rende compte. Elle frappa du poing, visiblement courroucée. L’assassin plissa les yeux et bénit sa chance de l’avoir poussé à rester, et ainsi observer un si curieux spectacle. Il se déplaça silencieusement du haut de son promontoire, suivant les moindres faits et gestes de la jeune femme. Il n’y comprenait plus rien. Le corps qui gisait par terre était pourtant là pour prouver à l’assassin qu’il ne s’agissait pas d’un rêve. La noirceur du sang qui s’en écoulait détonnait étrangement avec le teint pâle de la donzelle. Il resta quelques secondes à la voir se diriger vers la taverne, une main sur son genou et l’autre sur le parapet. Le vent faisait claquer sa demi-cape, mais ses yeux restaient rivés sur la silhouette qui s’engouffrait dans l’endroit. Tout avait changé, d’un seul coup. Il ne voyait nulle faiblesse, aucune fragilité. Comme si la demoiselle en détresse avait disparu pour laisser place à une implacable chasseresse. C’était ainsi qu’il l’a voyait, elle avait juré à l’encontre des ténèbres dans lesquelles il s’était dissimulé mais n’avait eu cure de ce soldat. L’aurait-elle sacrifié pour sa propre cause, attiré dans ses filets afin qu’il ne la serve ? Ainsi, l’assassin n’avait fait que marcher au milieu de cette toile, mais en était pour l’instant sorti indemne. Cette veuve noire qui se dressait face à lui attisait ses envies de jeu. Etait-ce là un nouveau moyen pour mettre à l’épreuve ses compétences ? Très certainement. Avait-elle voulu le capturer ou seulement lui parler ? Rafaelo n’en savait rien, mais cette jeune femme s’était donné tellement de mal pour parvenir à l’attirer qu’il ne pouvait pas y rester indifférent. Certes, elle avait sacrifié une vie pour cela, mais l’homme avait tout d’abord tenté d’abuser d’elle. Ainsi, ce n’était que justice dans un sens. Un sourire s’épancha sur la face de l’Auditore, les nuits étaient si routinières ces temps-ci, pourquoi ne pas pimenter une peu celle-ci ? L’assassin prit une grande inspiration puis se releva et disparut dans l’ombre des toits.


~~~

Le grain grossier du bois, lisse par tant de passage. Ce contact rêche contre la peau tendue par l’exercice éveilla une douce nostalgie chez l’assassin. Tant de temps qu’il n’avait ôté son masque pour frayer au milieu des simples mortels. Il était en cet instant bien plus proche du démon que de ces simples hommes car nul ne pouvait supporter ou même envisager ses tourments. Il se voyait pourtant supérieur à ces pitoyables carcasses emplies de mauvais vin et de bière frelatée. L’odeur fut ce qui vint en second. Le tabac était devenu une mode répandue, mais son odeur n’était pas pour autant agréable. Une nuage de fumée flottait au plafond, et si le vin était mauvais, son odeur était pire. Rafaelo fronça légèrement les sourcils, puis avança d’un pas. Le bruit était irritant. Des cris, le son d’une choppe reposée brutalement. Un brouhahas incessant qui ne cesserait de le tourmenter tant qu’il serait en ces lieux. Il se faisait l’effet d’un étranger dans un lieu qu’il aurait du apprécier en temps normal, mais il n’était pas coulé dans le même métal que ces pauvres types. Il ne laissa cependant rien transparaître de son dégoût, rivant ses yeux sur la douce silhouette qu’il cherchait. Cela ne dura qu’une fraction de seconde, mais ce fut suffisant pour qu’il concentre son attention sur cette femme. Il se dirigea vers une table à peu près en bon état, puis s’affala contre la banquette rapiécée. Il posa ses bras sur les rebords de celle-ci, puis se coula dans son rôle. Une chemise de toile écrue ample masquait au mieux sa physionomie taillée dans le roc. Une ceinture de cuir noire faisait plusieurs tours autour de sa taille et maintenait un pantalon en lin plutôt ample, lui aussi. Ses bottes étaient d’une facture totalement différente de celle qu’il arborait d’habitude. Elle remontaient au dessus de ses genoux et lui donnait un parfait air de pirate, au milieu de ces quelques Marines éméchés. Il s’installa à ses aises, puis se caressa doucement le menton. Ses cheveux mi-longs pendaient aux côtés de son visage et lui donnait un l’air d’un véritable flibustier. Il ne portait comme arme que sa rapière, pendue sur le côté, et une bourse pleine de berrys. Une dague était cependant cachée dans sa botte, et pour le reste, il ne comptait que sur son propre corps, qui était une arme assez dangereuse en réalité.

Il resta quelques instants là. Il savait très bien que personne ne viendrait le servir, mais il laissa le temps à tous de se désintéresser de lui puis il se leva, et se dirigea vers le bar. Il s’accouda, nonchalant, aux côtés de la damoiselle. Il lui offrit un sourire aguicheur, puis fit signe au barman de s’approcher. Il tira de sa bourse quelques berrys et les posa sur le comptoir.


« Ton meilleur Rhum pour moi … et ressers donc un verre à la damoiselle, c’est pour moi ! » lui ordonna-t-il, changeant délibérément le ton de sa voix afin de paraître une peu plus vieux.

Il lui adressa un sourire charmeur, puis réceptionna sa commande d’une seule main. Il renifla discrètement l’alcool avant, un des premiers réflexes qu’il avait appris, puis le vida d’un trait, reposant bruyamment le verre sur le comptoir.


« Hey, ma lady. Qu’est ce qu’une jeune péronnelle comme toi vient végéter par ici ? » lui murmura-t-il à moitié, moqueur.
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    Il ne fallut pas longtemps avant que Louise se fasse aborder. D’un autre côté, vu l’ambiance des lieux, il n’y avait rien d’étonnant à cela. Tout ce qu’East Blue comptait d’ivrognes devait s’être rassemblé ici ce soir pour noyer son alcoolisme dans un peu de bibine. C’était vraiment pas fameux comme taverne, mais bon, d’un autre côté, si on voulait se rencontrer discrètement, c’était l’idéal. Les clients présents ne devaient pas être en mesure de se rappeler de quoi que ce soit le lendemain et les serveurs étaient bien trop affairés pour retenir des visages. Louise comprenait pourquoi cet endroit pouvait être le repère supposé de révolutionnaires. Mais il était toutefois difficile de croire que quiconque soit là pour comploter. Oh, bien sûr, y’avait deux ou trois gars qui avaient l’air sains, mais dans l’ensemble, c’était pas glorieux !

    Bref, rien d’étonnant donc à ce que la jeune femme soit rapidement le centre d’attention d’une de ces brutes avinées. La blonde s’attendait même à devoir repousser les avances de balourds inintéressants, mais ce soir, le sort en avait décidé autrement. En effet, à peine s’était-elle installée pour se siffler son cocktail et observer qu’un jeune homme à peu près sortable lui offrit un nouveau verre. Quelle bonne idée, tiens ! Ca lui ferait des frais en moins. Quoique, entre nous, on ne pouvait pas dire qu’elle payait souvent ses consommations… L’art de la séduction à de nombreux avantages, mine de rien.

    L’homme qui s’était installé à côté d’elle avait des allures de pirate, et il était tout à fait probable qu’il en soit un. Mais Louise savait que les apparences étaient trompeuses et elle n’était pas assez stupide pour se laisser piéger par des a priori sans fondement réel. Alors que le type lui demandait ce qu’elle faisait là – limite il se foutait de sa gueule en lui demandant – la blonde le détailla. Grand, bien bâti, pas désagréable à regarder, il était pas mal. Si elle n’avait pas eu d’autres projets, la chasseuse de prime lui aurait volontiers proposé de partager sa nuit. Mais elle n’était pas là pour ça, ou tout du moins, pas pour le moment. Elle avait d’autres révolutionnaires à fouetter. Paranoïa aidant, Louise ne mit pas longtemps à se demander si ce type en était un. Il n’en avait pas l’air, mais on ne sait jamais avec ces malades fanatiques. Il pourrait même être le type de la ruelle. Il avait la carrure. La carrure mais pas la voix ni l’attitude. Oh pis merde hein, le meilleur moyen d’en apprendre plus, c’est de parler, non ? Au diable les réflexions métaphysiques à deux balles !

    « La même chose que les poivrots dans ton genre. Je viens boire. Merci le verre, d’ailleurs. »

    Elle lui avait répondu sur un ton égal, mais la moquerie se teintait d’une insolence caractéristique à la jeune femme. Si le type n’était pas capable de faire avec, ce n’était pas son problème après tout. Elle n’aurait pas de mal à trouver plus intéressant ailleurs. Mais bon, tant qu’elle y était, hein… Elle porta son verre à ses lèvres, avala une gorgée et reprit, observant son interlocuteur dans les yeux, comme elle le faisait à chaque fois qu’elle adressait la parole à quelqu’un :

    « Et toi ? Pourquoi venir trainer dans un coin pareil ? On peut y faire de mauvaises rencontres… »

    Ouais, Louise donne des conseils de sécurité à un type qui ne doit avoir aucun mal à se défendre. C’est presque l’hôpital qui se fout de la charité… Mais elle ne dit pas cela sérieusement. Elle veut simplement provoquer l’autre, le tester, voir ce qu’il vaut. Qui sait, on peut toujours soutirer des informations à un pilier de comptoir. Et même si ce gars n’était pas d’ici, il devait bien avoir laissé ses oreilles trainer durant la journée ou elle ne savait quand. Au point où elle en était, toute info était bonne à prendre. Et puis vu sa haine viscérale pour les révolutionnaires, elle avait tendance à se montrer un peu trop obsédée par ses recherches lorsqu’elle s’y mettait. Surtout après la rencontre qu’elle avait fait dans la ruelle un peu plus tôt. Putain, si elle tenait ce mec…
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Oh, mais c’était que la petite araignée avait aussi des crocs, enfin des chélicères pour rester cohérent. Enfin bref, ce n’était pas le moment de s’accorder de pareilles digressions. La jeune femme prit cependant le temps de le dévisager, et de détailler sa physionomie dans son ensemble. Il se voûta légèrement pour paraître moins grand et expira longuement de manière à modifier légèrement son allure générale, de façon à paraître un peu plus fluet. C’était une précaution un peu trop exagérée dans de telles circonstances, mais les vieilles habitudes avaient la vie dure. Il sentit comme un poids sur ses épaules cet examen, comme s’il était passé au crible, cette désagréable sensation d’être mis à nu par un seul regard. C’était à la fois inquiétant et amusant, comme si il était analysé avec la même attention que celle dont il avait fait preuve à l’encontre de la jeune femme. L’assassin masqua sa gène par un sourire dédaigneux, puis il posa son coude sur le comptoir et pivota de manière à se mettre face à la jeune femme. Il profita de son statut déjà pré établi d’homme, ainsi donc de créature avide de stupre et de luxure, pour étudier un peu plus en détail le physique de sa proie. Elle était tout à fait délectable et cette tenue relevait ses formes, sans trop en dire non plus. Il sourit à cette idée. Elle semblait en cet instant tout autant déguisée que lui, arborant un timide masque prenant au piège le premier venu. Mais lorsque l’on savait déjà à quoi on avait affaire, celui-ci était inutile. Rafaelo fit tourner son verre entre ses doigts agiles, puis détourna le regard de la jeune femme, lançant une nouvelle pièce au barman. Celui-ci lui expédia alors un nouveau verre empli du même liquide brunâtre et entêtant que précédemment. Il le renifla de nouveau, savourant ce doux nectar quelques secondes avant de se repencher sur sa victime. Il s’amusait à détailler toutes les réactions de la jeune femme, quitte à l’observer à outrance. Ce léger froncement de sourcil, trahissait un certain agacement. Celui de ne pas avoir pu lui mettre la main dessus ? Peut-être bien, après tout. Ah, et cette petite moue … Elle avait son charme, et ce petit jeu commençait à plaire de plus en plus à l’assassin. Voyons, jusqu’à quel point pourrait-il aller avant de la faire ployer ?

D’un geste lent, il porta son verre à ses lèvres et il y prélevant une mince gorgée qui lui réchauffa le palais. Il sentait déjà l’effet euphorisant du dernier verre le gagner, légèrement. Il n’était plus habitué à boire, mais sa constitution le prévenait quand même de sombrer dès les premiers verres. Depuis combien de temps ne s’était adonné à quelques divertissements de ce type ? Lui qui parcourait autrefois les tavernes en ne rêvant que de femmes et de gloire … Cette époque s’était envolée en même temps que sa jeunesse en des jours bien funestes. Il était à présent un homme fait et ne pouvait reculer devant la tâche qui lui incombait, et quelle tâche ! Il se sentit légèrement coupable de s’adonner à ce jeu en cette soirée, mais tout homme avait besoin de souffler de temps en temps, du moins c’était ce que Césare lui rabâchait sans cesse lorsqu’il venait le retrouver lors de ses séances harassantes d’exercice. Et bien soit, pour une fois, il écouterait son frère dans ce domaine. L’assassin reposa lentement le verre, avec un sourire amusé.

« Tu serais bien présomptueuse de me prendre pour un poivrot, ma dame. » se moqua-t-il, en prélevant une nouvelle gorgée de Rhum.

Il leva son verre et lui adressa un signe de tête, un sourire malicieux sur les lèvres.

« Mais de rien pour le verre, s’il en faut si peu pour te satisfaire, je t’en offrirais un second avec joie … » lâcha-t-il avec un léger ricanement.

Il se mit alors dos au bar et étudia la salle d’un œil exercé. Entrant dans son rôle avec le plus grand professionnalisme, il lui fit signe d’observer l’assemblée qui se tenait là, devant eux.

« Ainsi donc la seule femme à des lieues à la ronde ne viendrait ici que pour boire un verre … » lui fit-il, espiègle.

« Quant à moi, si on tient compte des bases commerciales qui font de moi l’honnête marchand que je suis … c’est donnant-donnant. Alors, en terme d’échange équitable, je te répondrais … je viens chercher l’aventure. » se moqua-t-il.

Il lui adressa un clin d’œil puis préleva une nouvelle gorgée de son Rhum. Il cacha par là un sourire naissant sur son visage. Si son visage était figé dans ce simulacre de pirate facétieux, son cœur jubilait de vivre pareil instant. Bien qu’il n’osait se l’avouer, il aimait particulièrement jouer ainsi et faire valoir ce semblant de pouvoir qu’il pouvait avoir sur ses semblables. Malheureusement, c’était aussi en de pareilles occasions que sa présomption prenait le pas et lui faisait commettre des erreurs plutôt dérangeantes, mais il s’était plutôt amélioré avec le temps. Il ne restait cependant pas à l’abri d’être victime de sa propre vanité, ainsi il inspira un grand coup et se tourna vers la jeune femme, dardant son regard océan sur elle. Quelle serait alors la suite des événements ? Laisser planer un peu de mystère rendrait la rencontre, et donc le jeu, un peu plus épicé, mais il n’était pas à l’abri du courroux d’une telle créature. Terriblement tentatrice, elle exhalait cependant une terrible aura de danger pour l’assassin, qui l’avait déjà vue à l’œuvre … et qui s’était donc laissé prendre une fois. Un homme averti en valait deux, mais dans ce cas, il commençait à se demander si cela suffisait. Il chassa de sa tête ces idées noires, puis continua sur sa belle lancée. Trinquons mes jolies, yo-oh !

« Mais je manque à tous mes devoirs, dis-moi. » lui fit-il, avant de reculer d’un pas et de se feindre d’un courte révérence.

« Ivélias Naïlo, enchanté, littéralement. » se présenta-t-il, sous une de ses nombreuses fausses identités.

La suite des événements ne dépendaient à présent plus que de cette jeune damoiselle, mais il espérait l’avoir assez intriguée pour que la rencontre se poursuive sur la même voie. Et puis, au pire, il lui restait toujours un atout dans sa manche. Cette sensation, ce jeu était grisant mais encore plus jouissif, c’était d’ignorer la fin, de ne pas savoir ce qui en résulterait. Se révèlerait-elle aussi noire que ce que son âme laissait transparaître, ou au contraire, était-elle animée d’une juste cause ? Et pourquoi pas, née de la vengeance, issue du sang ? Tant de possibilités, tant de devenir mais un seul futur. L’assassin était de ceux qui ne croyaient pas au destin. Il érigerait sa propre histoire dans le sang et les cendres de la Marine, et rien en ce monde ne pourrait l’arrêter car son but était bien au-delà de tout cela. Il cherchait à devenir plus qu’un simple homme, à devenir un symbole, une icône que nul ne pourrait détruire. Il deviendrait ce qu’il désirait devenir, rien de plus et rien de moins. Il était le seul maître de son devenir et personne ne se dresserait sur son chemin, ou bien grand mal leur en ferait. Cette soirée n’était qu’un test déguisé en un jeu de mensonges. Il ne se voyait pas sortir perdant de ce duel, et pourtant … rien n’était écrit à l’avance.
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    Visiblement, le type en face de Louise n’était pas aussi rustre que ce que la blonde avait présagé au premier abord. Il ne faut pas se fier aux apparences, elle l’avait bien dit. Ce fut donc avec un certain contentement que la jeune femme se rendit compte que son interlocuteur était bien plus fin que la moyenne des hommes présents ici. Ce qui, en un sens, n’était pas un exploit non plus. Un enfant de cinq ans aurait été plus subtil que ces poivrots. M’enfin, ce qui comptait, c’est que le ‘marchand’ à côté d’elle n’en soit pas un. Un marchand… Quelle blague ! Ce type n’avait rien d’un honnête commerçant. Lorsqu’il se présenta en tant que tel, elle lui répondit par un sourire tout ce qu’il y a de plus ironique et significatif. Elle était loin d’être dupe et faisant en sorte que l’autre le comprenne bien.

    Toutefois, le statu quo qui s’établissait entre les deux protagonistes intriguait Louise. Sans qu’elle parvienne vraiment à définir comment, elle sentait que le type en face d’elle jouait avec elle, ou croyait le faire. Malgré le ton léger et moqueur, il y avait autre chose derrière ce masque de bonhomie un peu trop amical. Elle ne savait pas comment elle devinait ça, ni même pourquoi, mais elle était convaincue que ce type cachait quelque chose. Peut-être était-ce aussi sa paranoïa naturelle qui parlait, mais cet Ivélias Naïlo n’inspirait pas la confiance. Mais bon, de toute manière, Louise s’était toujours méfiée des gens qui essayaient d’entrer un peu trop loin dans son espace vital. Elle n’aimait pas les gens affables ou sympathiques qui avaient l’air de vouloir tout savoir sur vous pour vous aider. Dans le fond, elle pourrait presque dire qu’elle préférait les soulards de la taverne plutôt que les gars comme son interlocuteur. Eux, au moins, ils ne posaient pas de questions gênantes. Mais bon, une petite conversation à double-jeu n’était pas non plus dénuée d’intérêt parfois.

    La blonde avait écouté parler Ivélias – dont le nom la laissant franchement sceptique – en souriant. Elle n’avait pu s’empêcher de tiquer face à sa perspicacité quant à sa présence ici, mais son sourire n’avait pas quitté ses lèvres, à la fois amusé et provocateur. Ce n’était pas parce qu’elle n’était pas vêtue comme la dernière des trainées qu’elle n’était pas en mesure de charmer un homme. Elle n’était peut-être pas aussi belle qu’une sirène, elle n’en était pas moins charismatique et charmeuse. Charmante ? Là, c’était une toute autre histoire…

    « Je vois, t’es plutôt perspicace pour un aventurier. »

    Tout en parlant, elle avait insisté sur le mot aventurier, montrant bien le crédit qu’elle apportait aux paroles proférées un peu plus tôt. Mais leur manque d’honnêteté respectif et le côté joueur d’Ivélias firent naitre une idée plutôt plaisante dans l’esprit de la blonde. Quitte à s’amuser, autant y aller jusqu’au bout, non ?

    « Ca te dirait de jouer un peu ? Comme tu l’as deviné, je ne suis pas là seulement pour boire. Et toi, t’es tout sauf un marchand, et je te pense encore moins honnête. Je me plante peut-être, j’en sais rien. Mais ce que je te propose, c’est un jeu de gages. »

    La blonde prit le temps de finir son cocktail avant de reprendre, amusée.

    « Rien de compliqué. Chacun notre tour, on se donne un gage, si on le réussit, on peut poser une question à l’autre, si on le rate, on doit répondre à une question. »

    En temps normal, la blonde n’aimait pas les jeux qui impliquaient des questions-réponses, mais pour ce soir, elle ferait une exception. Ce type de distraction était après tout idéal pour observer les comportements des gens autour d’elle et peut-être trouver ce qu’elle cherchait.

    « Oh, et j’oubliais… »

    Elle commanda du rhum avant de reprendre :

    « Mizuno. Je m’appelle Louise Mizuno. Enchantée également. J’espère que je ne te vexe pas en te laissant le monopole de la courbette. »

    Malgré le sourire ironique et une apparente légèreté, la blonde avait insisté sur son nom de famille en guettant une réaction quelconque chez son interlocuteur ou chez n’importe qui d’autre. Ce nom était aussi sans doute celui d’un révolutionnaire, celui de son frère, si ce dernier n’en avait pas changé. En offrant ainsi son nom, elle espérait recevoir un indice quelconque sur la situation actuelle de William.
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Intéressant. Très intéressant. Elle entrait dans son jeu, dansait avec lui et pourtant ne se laissait pas mener par cette folle envolée. Elle savait garder les pieds sur terre et ne se perdait pas en conjectures inutiles. Un tempérament que l’assassin admirait. Il la voyait de plus en plus calculatrice, avec une logique implacable mais il la sentait tout aussi méfiante. Certes, il n’y était pas allé par quatre chemin, en saupoudrant juste assez de mystère pour paraître inquiétant et assez de charme pour déranger. Que pouvait-elle bien penser de lui à présent ? Pirate, Chasseur de prime ou encore Révolutionnaire ? Ah ça, il ne le saurait qu’en temps voulu. Mais le fait qu’elle se prête à ce jeu augurait de bonnes choses en perspective : elle offrait elle-même de se livrer à son inspection, mais il se devait de prendre le même risque en parallèle. Ce n’était pas déplaisant, de corser l’échange et de rendre les instants partagés un peu plus épicés. Un sourire joueur s’étira sur la face de Rafaelo, tandis qu’il écoutait la damoiselle dévoiler ses prérogatives. Pensait-elle réellement qu’elle allait édicter ainsi les règles d’un jeu, son jeu ? Pensait-elle pouvoir le mener sur son propre terrain, l’amener à danser sur sa toile ? Non, il l’avait vue. Capable de planifier un meurtre pour il ne savait quelle obscure raison. Peu être était-il justifié, ou non, mais quoi qu’il en soit les faits étaient là. Un criminel reste un criminel après tout ? Ainsi donc, ce serait un jeu entre meurtriers ce soir ? Pourquoi pas, après tout on ne trouvait bonne compagnie que chez ses semblables. Néanmoins, la tentatrice avait vu clair dans le jeu de l’assassin avec une facilité déconcertante. Elle était arrivé à ces conclusions avec une telle habileté que jouer dans sa cour était très dangereux. Il avait l’impression de se faire petit à petit enrouler dans sa toile mais ne faisait rien pour s’en détourner. Pourrait-il toujours danser ainsi emmêlé ? Il hésitait sur la conduite à tenir, rentrer dans la partie ou changer quelque peu la donne … Bien évidemment, c’était un défi à sa hauteur, mais s’il pouvait en plus de cela la faire entrer dans un jeu de pouvoir bien plus subtil que le précédent, il y serait gagnant à tout point de vue. Il acquiesça donc, sans piper mot, conservant ce sourire arrogant qui lui seyait tant. D’un geste amusé, il coiffa une mèche rebelle et planta son regard bleuté dans celui de l’imprudente. Tiens, pourquoi ne l’avait-il pas encore remarqué ? Des yeux vairons. À force de chercher les défauts, il en arrivait à ne pas en voir ce qui pouvait être le plus évident. Une chose assez rare pour être notée, et qui rajoutait une touche exotique au charme sauvage de la demoiselle. Intriguant, envoûtant. On s’y plongerait avec envie, mais il soutint ce regard avec malice.

« Un jeu … serions-nous aussi civilisé que ces satanés forbans qui parcourent librement le funeste océan ? » se moqua-t-il, levant les sourcils à l’adresse de la jeune femme.

Elle prit alors un verre, l’accompagnant par ce geste dans sa soirée de débauche. Malheureusement pour elle, il ne perdait pas de vue son objectif et même si ses charmes auraient été efficaces en d’autres temps, il ne se laissait pas abuser, seulement tenter. Ce fut pourtant avec un grand étonnement qu’il accueillit la nouvelle qui suivit. Il fronça légèrement les sourcils mais resta de marbre, conscient que la jeune femme dardait sur lui ses yeux inquisiteurs. Peut-être espérait-elle là une réaction ? Mizuno. En effet, ce nom lui était connu. Et plutôt pas mal, même. Il n’était que peu impliqué dans les affaires de l’Union Révolutionnaire, mais il restait néanmoins informé des différentes évolutions de sa propre section, dirigée par son jumeau Césare. Il connaissait chaque membre et aurait été capable de retracer leurs différentes affectations depuis au moins une dizaine d’années. C’était une tâche dont il se devait de s’acquitter pour assurer la cohésion entre le bas de l’échelle et le sommet que son frère représentait. Il était, en quelque sorte, son bras droit et se chargeait la plupart du temps de la formation des nouvelles recrues, ce pourquoi ce nom lui était familier. Il l’associait à un jeune homme brun, plutôt bien bâti mais ce qui l’avait surtout marqué, c’était cette lueur froide et implacable dans son noir regard. Une homme décidé, animé par un idéal que bien peu auraient été capables de lui enlever. Oui, il oeuvrait même actuellement au sein de la Police, mais n’était pas encore rattaché à la Confrérie, ce qui ne faisait pas de lui un disciple de Rafaelo. Son nom, William Mizuno. À vrai dire, il retrouvait quelques similitudes dans le port de cette jeune femme. Cette façon qu’elle avait eu à l’instant de bouger … De simples détails, invisibles pour quelqu’un qui ne les cherchait pas mais c’était là que résidait tout l’art de l’assassin. Faire attention à ce que le commun des mortels ne voyait pas. Césare se moquait parfois de lui en lui associant une mémoire absolue, mais il savait très bien que c’était faux. Son œil était entraîné, exercé au-delà du raisonnable. Il n’était pas un simple pécore, nom de Dieu, il était le fier descendant de Giovanni Di Auditore, le frère jumeau de l’Empereur. Il était Il Assassino, Invaincu à ce jour, jamais capturé, seulement aperçu. Il n’était qu’une légende urbaine que certains s’amusaient à compter les soirs, une figure qui selon les dires populaires n’était là que pour massacrer sans peine ni remords. La vérité était totalement différente, mais malheureusement la Marine avait la mainmise sur les médias et autres sources d’informations … mais un jour cela changerait. C’était une conviction qu’il partageait, justement, avec William. Il avait bien apprécié ce gars, bien que celui-ci ne l’ait connu que sous le couvert de son uniforme.

L’assassin prit conscience que ce nom avait quelque peu affecté sa façon de percevoir la jeune femme. L’avait-elle fait exprès ? Non. Elle était certainement une grande manipulatrice, mais pousser le vice jusque là, c’était osé. Déjà, l’engrenage d’une machination sordide se complexifiait dans l’esprit de Rafaelo mais il repoussa en bloc toutes ces questions. Il n’était pas encore temps de se préoccuper de cela. Autant lui donner un échantillon de ce qu’il savait sur son frère qui la convaincrait de sa réaction, de son léger blocage sur ce nom. Il fallait dire qu’il n’était pas venu en étant prêt à encaisser la révélation du nom d’un membre éminent de sa propre section d’un groupe top secret de la Révolution. Il s’en tiendrait donc au strict minimum, et tairait le reste … pour l’instant. Si les choses pouvaient se révéler un peu plus palpitantes, pourquoi ne pas en discuter un peu plus. Il était véritablement prêt à jouer ce jeu jusqu’au bout, et il était certain que Louise pensait arriver à le mener en bateau au moins autant que lui était persuadé du contraire. Rafaelo inspira un grand coup et pencha la tête sur le côté. Il était temps d’entrer dans la danse. Il n’avait cure des règles car de tout temps, c’était lui qui les avait toujours fixées sans jamais respecter celles des autres. Alors, pourquoi se préoccuper de celles d’une jouvencelle, tout aussi dangereuse soit-elle ? Il savait grossièrement à quoi s’attendre avec elle tandis qu’elle restait dans l’aveugle. Cela lui laissait déjà une forte longueur d’avance.

« Mi-zu-no … ce n’est pas la première fois que j’entends ce nom. » mumura-t-il, presque sur le ton d’un comploteur.

Il se ressaisit soudain et se redressa sur le bar, laissant croire qu’il aurait pu se laisser aller à quelque confessions. Mais non, ce n’était que peine perdue. Il semblait déjà voir se profiler la prochaine question de la jouvencelle, mais à présent, il prenait encore un point d’avance sur elle.

« Et bien soit, jouons alors ! » fit-il, cherchant à la couper dans son élan.

Qu’elle soit prise au dépourvu aurait quelque chose de plus tentant qu’une simple altercation verbale, ou quelconque joute. S’il arrivait à prendre de vitesse Louise dans ses machineries, il s’estimerait au moins satisfait de sa soirée, mais bien entendu, le jeu ne s’arrêterait pas là. Oh non, il y avait tellement de chose qu’il voulait soutirer à cette jeune femme. Ce n’était pas la quantité qui lui importait réellement, mais il espérait la prendre à son propre jeu et à tirer d’elle ce qu’il voulait sans qu’elle ne s’en rende forcément compte. Bien entendu, ce serait aussi à double tranchant pour lui, car il restait, bien que meurtrier de sang-froid, calculateur et ennemi de la nation, un homme loyal qui tenait ses engagements car il attachait à son honneur une importance hors du commun.

« Je serais donc galant une fois encore, chère Louise et vous laisserais donc l’honneur de m’attribuer le premier gage. Pourquoi ne serait-ce pas à l’homme que je suis de prendre les risques en premier, n’est-ce pas ? » minauda-t-il, sirotant son verre.

Ainsi, il lui laissait l’illusion d’un choix, mais il savait très bien sur quel terrain il s’aventurait … verrait-elle le danger, se détournerait-elle ? Ou alors, sombrerait-elle dans la toile de l’assassin pour prendre le risque de s’empêtrer dans celle-ci, de devenir sa chétive proie. Cette marque de politesse n’avait en réalité rien de tout cela, elle n’était que le début de leur jeu, qui commençait fort. La suite des événements allait certainement déterminer la suite de leur soirée, ainsi que le ton des échanges …
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    Le cœur de Louise rata un battement. En donnant son nom, elle avait obtenu bien plus encore que ce qu’elle avait souhaité. Elle avait d’abord pensé devoir se contenter de la légère hésitation de son interlocuteur, mais celui-ci avait enchainé en déclarant connaitre ce nom. Elle voulut parler, poser une question. Son corps lui répondait à peine tant son esprit était pris dans une chape de souvenirs.

    Elle se revoyait huit ans plus tôt, en bas de l’escalier de la maison familial, son frère, sac sur le dos, quittait la demeure sans même lui accorder un regard. Elle n’avait pas compris. Pas à temps. Plus jamais elle n’avait revu William après ça. Plus jamais elle n’avait été capable d’accorder sa confiance à quiconque. La trahison avait été trop douloureuse pour qu’elle prenne le risque que cela se reproduise. Jamais.

    Un éclat de rire bruyant la ramena à la réalité. Son regard égaré se promena sur la salle et elle réalisa qu’elle venait de se montrer dangereusement vulnérable. Cela n’avait duré que quelques secondes, mais c’était déjà bien trop. Son air amusé avait complètement disparu de son visage et elle posa sur Ivélias un regard noir. Le genre par rassurant et qui veut généralement dire le fixant n’est pas loin de tuer le fixer. Mais la blonde ne ferait pas ce genre d’erreur. Ou tout du moins pas en public. Elle prit son verre de rhum sur le comptoir et en but une longue rasade. Heureusement qu’elle tenait l’alcool, sinon il y avait fort à parier que l’ivresse l’aurait déjà gagnée.

    Lorsqu’elle posa son verre, rien de ce qui s’était passé dans les quelques instants précédents ne se lisait sur son visage. Son sourire provocateur avait repris sa place et elle observait son partenaire de jeu avec le même intérêt teinté d’ironie que précédemment. Ce type avait essayé de se moquer d’elle, de l’enrouler dans sa propre toile et ça, elle ne lui pardonnerait pas. Elle la Reine, celle qui dictait les ordres, qui s’occupait non seulement des pions, mais aussi des autres pièces. Elle était l’atout essentiel d’un joueur, la pièce mobile qui prendrait le roi arrogant et lâche. Celui qui la manipulerait n’était pas encore né, et dès à présent, elle ne baisserait plus sa garde. Que cet Ivélias – ou peu importe son nom – se tienne près, la partie commençait maintenant.

    Monsieur voulait jouer les hommes galants ? Grand bien lui en fasse. Les risques, il allait les prendre, et il risquait de ne pas aimer. La vengeance est un plat qui se mange froid, n’est-ce pas ? Louise ne se laissera pas enflammer par sa haine ou ses sentiments. Oh non, elle avait déjà assez donné lorsque, plus jeune, ce genre de cas s’était produit. Elle ne ferait pas l’erreur de recommencer. Ses années passées à jouer aux échecs lui avaient appris à se tempérer, à gagner en finesse, à mieux cerner les comportements. Des compétences utiles qu’elle saurait une nouvelle fois mettre en pratique ici.

    « Très bien. Puisque tu veux prendre les risques en premier… »

    Louise savait d’ores et déjà ce qu’elle comptait imposer à l’autre. Mais elle allait devoir auparavant choisir un intervenant extérieur qui n’avait rien demandé.

    « Tu vois ce mec là-bas ? A côté de la fenêtre, avec la fille sur les genoux. »

    Ce faisant, la blonde désigna un homme bruyant, visiblement bien entamé, qui tenait une prostitué sur une de ses larges cuisses. Il avait tout de la brute épaisse violente et encore plus dangereuse sous l’emprise de l’alcool. L’arme à feu posée sur la table et la lourde hache reposant contre la fenêtre renforçait cette impression. Il parlait fort, riait à gorge déployé sans se soucier de la bière qui coulait dans sa barbe et sur ses vêtements. Autour de lui, ses compagnons n’en menaient pas plus large et même les autres ivrognes de la taverne semblaient les éviter.

    « Va lui rouler une pelle. »

    Le gage était tombé. Peut-être un peu puéril, facile et prévisible, mais toujours efficace. Et puis, considérant la victime du gage, on était loin de la blague d’adolescents. Pour le coup, Ivélias courrait un véritable danger s’il acceptait le défi. Louise était curieuse de voir ce qu’il allait faire. Cela valait bien de devoir répondre à une question. Car après tout, si l’autre prenait les risques en premier, il prenait également l’avantage en cas de réussite. Le coup était bien pensé, mais la blonde ne se laisserait pas faire aussi facilement.
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Oh. Une faille. Cette lueur d’incertitude, une telle occasion ça ne se retrouverait pas deux fois. Ainsi, le sujet de William était cher à ses yeux ? Vengeance ou Amour perdu ? Le gusse n’était pas le genre à planter femme et bambins pour s’en aller en guère, et il était trop jeune pour être le père de cette donzelle. De la famille proche, c’était certain, et pour autant la toucher, son frère ? C’était ce qui lui paraissait le plus plausible. Ainsi donc elle serait la sœur du preux William. Enfin, preux, façon de parler. L’assassin partageait quelques idéaux avec lui, mais il ne le connaissait pas plus que cela. Il n’était pas au courant de noirs secrets ou autre. Seulement qu’il était quelqu’un de fiable, sur qui on pouvait compter. Ainsi, pourquoi la petite chercherait à se venger ? De l’avoir abandonnée ? N’en aurait-il pas été autant blessé de la part de Césare ? Certainement. Cela ressemblait au scénario typique, deux enfants, deux orphelins. Elevés ensembles et cætera. Peut être même orphelinat, ou dans la rue, allez savoir. La chose dont l’assassin restait néanmoins persuadé était qu’il s’agissait là de la sœur de Will. De plus en plus intéressant. Elle avait donc mordu à l’hameçon et avait faillit se faire prendre mais elle était encore bien trop combative pour cela. Rafaelo admira la vitesse à laquelle elle se recomposa et reprit son rôle. Ainsi donc, il y aurait une petite fille douce et fragile à l’intérieur de cette charmante tentatrice ? Un léger complexe, une blessure qui avait suinté tout ce temps et rempli son cœur d’un fiel nauséabond ? Cependant, pour fragiliser une structure, il fallait généralement deux points de pression et il n’avait trouvé là que le premier, mais quel premier ! S’il voulait briser la coque de la veuve noire, il lui faudrait procéder par tâtons et sonder une à une ses angoisses les plus fortes. Il possédait encore l’avantage du fait qu’elle ne savait réellement pas à qui elle avait affaire. Ainsi qu’un autre, encore. Combien de questions devaient à présente se bousculer dans sa tête, questions concernant son frère ? Il l’avait troublée, c’était certain, mais il était prêt à parier qu’elle ne se contenterait pas d’une seule question. En tout bonimenteur qu’il était, il prendrait à cœur de répondre juste assez à ses questions pour lui mettre l’eau à la bouche, sans trop en révéler. Après tout, elle lui demanderait des informations sur William, et ne se concentrerait pas alors sur lui. Et quand bien même elle ferait l’inverse, il y serait gagnant. Ah, quelle douce sensation que celle d’être encore maître de la situation.

En un sens, l’assassin avait l’impression de dominer l’altercation, mais ce n’était que le premier estoc d’une longue joute qui s’annonçait. Il savait qu’il avait piqué à vif la jeune femme, mais il savait comment la surprendre. Il savait comment tourner en dérision sa prochaine attaque. Il n’avait aucune intention de se mettre en danger, seulement de profiter de cette occasion d’en apprendre plus. Sa curiosité le perdrait, ainsi que son amour des défis. Elle était sûre de la profondeur du défi qu’elle lui imposait mais encore une fois, Rafaelo désirait ardemment la tourner en dérision. Il espérait ainsi faire sortir d’elle une deuxième faiblesse dans sa carapace. Il sentait que cette femme était orgueilleuse, comme le prouvait son défi. Il était issu de sa colère, de sa hargne. Bien pensé, mais elle aurait pu un peu mieux le réfléchir. Elle s’attaquait ainsi à l’égo de l’assassin qui ne se plierait pas à cette demande, bien entendu … mais elle aurait tout autant pu en profiter et le mettre en danger de manière bien plus subtile. Quoi qu’il en soit, si elle avait voulu voir jusqu’où il pouvait aller, elle allait être déçue. L’assassin s’adossa au bar et hocha de la tête en dévisageant sa cible. Il eut un léger sourire puis se tourna vers Louise.

« Il va falloir trouver mieux que ça. » trancha-t-il, puis il soupira longuement « À moi, donc. »

Le gage semblait lui être passé largement au-dessus de la tête. Il arborait un tel masque de suffisance que l’on aurait cru imperméable à toute menace. Peut être qu’il n’avait rien à cacher, après tout ? Non, le secret c’était de croire en soi. Et Rafaelo appliquait cet adage avec ferveur. La pauvre Louise partait handicapée dans ce combat, comme s’il ne lui restait plus qu’un cheval et une misérable tour pour se défendre, alors que le plateau de l’assassin était encore intouché. Ses chances de gagner étaient certes réduites, mais pas inexistantes. En la poussant ainsi dans ses retranchements, Rafaelo faisait d’une pierre deux coups : d’une part il la jaugeait, et d’autre part il la poussait à commettre une erreur. Mieux valait ne pas jouer lorsqu’on était pas prêt à gagner …

« Tu me poseras ta question après, je veux juste que tu connaisses mon petit défi avant de te lancer. »
commença-t-il.

Il mourrait d’envie de la torturer, de se jouer d’elle avec les évènements antérieurs, mais ce serait refuser l’avance qu’il conservait à présent. Non, il lui fallait quelque chose de plus anodin, quelque chose qu’elle penserait capable d’accomplir. Oui, un véritable piège. Il sentait le plaisir que lui procurerait cette farce affluer en lui. Il fallait encore voir si elle tomberait dans le panneau … ou pas.

« Bien. Dis moi quel est mon nom. »
lâcha-t-il, avec un odieux sourire.

Trop facile ? Évidemment … Soit elle avouait ouvertement qu’elle ne lui faisait pas confiance, soit elle se trompait. Peut être réussirait-il à attiser ainsi sa curiosité et à lui soutirer une prochaine question pour conserver sa maîtrise du jeu ? Ainsi, il s’amuserait à la perturber, à la forcer à se questionner sur lui, sur son frère et à se perdre en conjectures. Il y avait toujours le risque qu’elle mette en plein dans le mille, mais les chances étaient plus que minimes. Ainsi, l’assassin s’assurait du risque de ce jeu tout en se moquant ouvertement de la jeune femme. Bien, il lui faudrait à présent réfléchir à sa prochaine question … voyons, que pourrait-il bien lui soutirer ? Il y avait maintes choses qu’il désirait savoir sur cette délectable créature, mais une en particulier lui trottait dans la tête. Il était certain qu’elle y avait déjà pensé, mais peu importait … Il se délecterait du spectacle de la voir s’empêtrer dans sa toile.

Vilain petit moucheron, pourquoi es-tu grognon ? Dans la toile emprisonné … bientôt tu seras mangé !
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    Si Louise n’était pas aussi maitresse d’elle-même, si la perte de contrôle n’était pas sa peur la plus grande, elle aurait très certainement envoyé son verre à la figure de son interlocuteur. Il venait d’agir avec une lâcheté incomparable, privant ainsi la jeune femme de sa revanche. Très bien, elle lui montrerait ce que c’était de jouer réellement. L’attitude affligée de l’homme n’eut cependant pas raison du masque de la blonde. Elle se contrôlerait jusqu’au bout, elle en faisait serment. Mais avant ça, elle avait une petite leçon à donner. Et puis elle voulait jouer aussi. Elle avait gentiment écouté les propos de son interlocuteur, sans leur accorder plus de crédit que cela. Question, gage. Trop facile. Il était tombé dans son propre piège. Amateur.

    « Je m’occupe de toi dans une minute. Attends et regarde. »

    Louise posa son verre sur le bar et se leva. Elle grimaça légèrement en sentant sa robe voler légèrement autour d’elle. Elle faisait vraiment sainte Nitouche comme ça. Mais bon, elle était bien obligée de faire avec. Elle adressa un sourire moqueur à Ivélias puis fendit la foule, en direction de la cible désignée un peu plus tôt. Là, séductrice, elle se planta devant la brute avinée et sa poule.

    « Mon ami là-bas m’a lancé comme défi de t’embrasser. Je n’aimerais pas le décevoir. »
    « Ah ah ah ! Quel culot ma jolie, viens donc par là ! »

    Sans se faire prier, le blonde passa ses bras autour du cou de l’homme et l’embrassa langoureusement. Trop ivre pour se poser des questions, il se laissa faire, ne cherchant pas à savoir d’où sortait cette fille ni même les tenants et les aboutissants de son geste. Il profita simplement de l’instant et lorsque l’inconnue se releva, il éclata à nouveau de rire.

    « Tu veux pas rester ? Tu me plais bien ! On pourrait passer la nuit ensemble. »
    « Pas ce soir, je suis déjà prise, une prochaine fois peut-être… »

    Les paroles n’étaient pas vraiment prononcées dans le vent. La jeune femme était parfaitement capable de revenir le lendemain pour coucher avec cet homme, aussi immonde soit-il. Mais comme elle l’avait dit, elle avait d’autres préoccupations dans l’immédiat. Elle s’accorda toutefois un petit plaisir et embrassa également la prostituée sur les genoux de l’homme. Le spectacle fit sans doute rêver les hommes attablés, mais il ne s’agissait de rien d’autre qu’un jeu pour Louise. Un jeu et une provocation envers Ivélias et ses tentatives de manipulations.

    Ayant ainsi assouvie sa petite lubie de la soirée, la jeune femme revint vers le bar et reprit sa place, l’air amusé.

    « Très bien, à nous deux maintenant. Ma question d’abord. Quelles sont tes différentes identités ? »

    La question était piège, c’était une évidence. Louise se souvenait parfaitement du nom qu’il lui avait donné, mais s’il lui posait la question, c’est qu’il y avait forcément d’autres noms dont elle ne connaissait pas l’existence. Le seul moyen de parvenir à réussir ce gage était de le contraindre à lui dévoiler ces noms. D’autres se seraient sans doute fait pigeonner par ce genre de subterfuge, mais pas elle. Au risque de paraitre présomptueuse – ce qu’elle était -, elle était bien plus maline que ça.

    La Reine dirigeait, les autres obéissaient. Il faudrait bien plus qu’un gage raté à Ivélias pour réussir à les renverser, elle et son égo. Cela dit, l’intention y était et il était plutôt malin. Mais d’autres s’étaient cassés les dents sur le cas de Louise Mizuno. Les dents ou autre chose. Malgré sa frêle silhouette et l’apparente fragilité qu’elle pouvait dégager, elle avait mis un point d’honneur à savoir se défendre. Elle avait ses faiblesses, mais elle avait surtout des atouts dont elle savait se servir à bon usage. Comme ce fruit du démon qu’elle mangé, par exemple. Le fruit de l’échiquier… Il était complexe à comprendre, encore plus à manipuler, mais elle avait appris à en faire une arme de choix. Nombreux étaient ceux qui étaient tombés dans ce piège, et nombreux seraient ceux qui y feraient face. Dans tous les cas, Louise restait la Reine. Majestueuse et invaincue. Mais jusqu’à quand ?
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Hmm. Touché. Alors qu’il pensait la plonger dans une indécision totale, Rafaelo n’avait fait que redonner du poil de la bête à la petite. Elle aurait du se concentrer sur lui, douter de ses assermentions et lui demander son véritable nom, mais non, elle avait pris cela pour un énième piège. À malin, malin et demi ! Lui laisser croire l’évidence, lui laisser penser que c’était trop facile. Une tactique basique, mais efficace. Ainsi, elle pensait l’avoir dupé ? Ah, elle pouvait se penser maîtresse du jeu mais n’en restait pas moins enserrée par les mailles de l’assassin. Il fallait néanmoins lui accorder qu’elle s’était bien sortie de cette situation avait commencé à rééquilibrer le plateau, mais Rafaelo n’était pas en reste de ce côté-là. Alors qu’elle lui montrait comment elle pouvait s’acquitter de son gage, il la dévora du regard avec une malice sans nom. Elle pensait ainsi lui renvoyer le revers de la médaille ? Il ne s’en sentait nullement offensé. Les règles n’étaient pas les mêmes pour les deux, dans ce cas. Il savait qu’elle agissait ainsi car il l’avait agacée et énervée, et c’était là son but. Le regard interloqué de l’ivrogne et de l’ensemble des clients le fit sourire. Elle ne manquait pas de culot la gamine, il fallait l’avouer. Elle ne se prenait pas pour n’importe qui. Par contre, cette façon qu’elle avait de dénigrer son propre corps, de se donner ainsi en spectacle ne faisait que confirmer les soupçons de l’assassin. Elle était bien plus dangereuse que sa douce constitution ne le laissait présager, et il redoutait l’affrontement. Mieux vaudrait pour lui de la jouer en finesse et d’éviter les faux-fuyants. Il accueillit son retour avec un signe amusé de la tête.

Tentait-elle de le provoquer ? En ce cas, ce n’était pas ainsi qu’elle y parviendrait. Il était énormément attaché aux valeurs qui faisaient de lui le soldat du peuple qu’il était, mais tant qu’elle n’aurait pas deviné ce qu’il, ou qui il était réellement, il n’y aurait aucun risque qu’elle ne le fasse sortir de ses gonds. Et encore, cela serait dangereux pour elle, il était assassin après tout pas un vulgaire soûlard de pacotille. Il la laissa poser sa question et sourit face à l’apparente naïveté de la jeune femme. Elle n’était pas tombée dans le panneau et avait mis le doigt sur l’essentiel de la chose. Il était en effet un homme aux multiples rôles, mais si elle ne choisissait pas mieux ses mots … elle finirait par en payer le prix. Identités. C’était plutôt vague comme notion, elles étaient si nombreuses, qu’il lui aurait fallu une dizaine de minutes pour toutes les citer, cela le dérangeait quelque peu car il s’agissait là de secrets bien enfouis et particulièrement liés à sa profession. Mais bien entendu, le terme était assez générique pour qu’il se permette lui aussi de l’être, du moins dans sa définition. Libre à la jeune demoiselle de chercher à se préciser par la suite, mais il serait alors trop tard. Il ne ferait que complexifier la toile de son personnage, multiplier les possibles pour un seul devenir. Mais il prenait aussi le risque de se trahir en révélant ainsi les diverses facettes de son rôle. Il n’était certes pas un pirate, mais il n’était pas plus un autre que cela. Son identité se résumait à tout ces rôles à la fois. Il était l’Assassin, là était son unique et seule personnalité mais ses missions exigeaient de lui une grande adaptabilité ainsi, il pouvait être n’importe qui … n’importe quand.

« Mes identités ? Tout le monde, et personne à la fois. »
minauda-t-il.

Il vida alors son verre d’un trait et la dévisagea, s’attendant à la voir s’emporter ou pester. Mais il était plus probable qu’elle intériorise sa rancœur, conformément à tout ce qu’elle avait montré jusqu’à présent. Sa tournure de la phrase était quelque peu abusive certes, mais la réponse y correspondait. On ne pouvait trancher sur sa véritable identité. Il confirmait par là les doutes de Louise, certainement, sur sa propre versatilité, mais il n’en révélait pas d’avantage. C’était un jeu, mais plus les échanges s’intensifiaient, plus il se demandait si, au final, il avait bien fait de s’y engager. Bien qu’il conservât l’ascendant sur la partie, du moins il en avait l’impression, la jeune femme avait du répondant et ne se laissait pas abattre. Mais avec ce dernier coup bas, Rafaelo venait certainement de donner le ton de leurs prochains échanges. Il avait intérêt à surveiller ses paroles et ses gages car tout cela pourrait rapidement tourner au vinaigre et lui revenir en pleine figure. Elle était diablement dangereuse, la donzelle mais ça tombait bien car il aimait ça, le danger.

« Pense à ton prochain gage, ma chère, j’ai déjà une petite idée pour la question. »
se moqua-t-il en effleurant doucement le bout de ses doigts.

Il s’amusait à lui tourner autour depuis le début de leur rencontre, à s’approcher un peu plus de cette féline jeune femme. Il la mettait en boule puis la titillait peu à peu, prêt à la voir éclater à tout moment. Il était prêt à tout, même à l’inévitable, du moins autant qu’on pouvait l’être. Flirter ainsi avec le danger lui procurait des sensations inespérées. Ce n’était pas la même chose que le combat, non. En un sens c’était plus grisant, plus euphorisant. Se sentir au bord du gouffre, à deux doigts de sauter affronter les vents et la roche. Cette femme lui procurait cette sensation inespérée d’un défi à sa hauteur. Perdre n’était pas à l’ordre du jour pour lui. Il la plierait et sortirait grandi de cette épreuve, ce n’était même plus une question de curiosité ou de justice mais bel et bien d’orgueil et de défi. Il commanda un nouveau verre, faisant glisser une nouvelle fois la somme convenue, puis s’empara d’une bonne rasade qui lui réchauffa une nouvelle fois le gosier, déjà fort chaud. Peut être était-ce aussi l’alcool qui augmentait cette sensation de bien-être et d’adrénaline. Ah … la suite allait être amusante, palpitante.
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    Malgré le jeu, les mensonges et les défis, il y avait une sorte de flirt entre les deux protagonistes. Leur échange était comme un tango. Ils se repoussaient, s’attiraient, dégageaient une certaine passion. Mais une passion qui n’était pas tournée l’un envers l’autre. Une passion du danger, du challenge, et peut-être d’autres choses, Louise ne pouvait pas dire ce qu’il en était pour son adversaire. Oui, un adversaire. C’était ce qu’était Ivélias désormais. Peut-être deviendrait-il un partenaire, elle n’en savait rien. Mais pour le moment, il était seulement question d’opposition et d’affrontement. Un affrontement où le plus malin et le plus inventif l’emporterait. Qui avait pour le moment le meilleur score ? Impossible à dire. Chacun était persuadé d’avoir une longueur d’avance sur l’autre. Louise par ses défis impossibles, par son assurance et sa manipulation pensait avoir coincé Ivélias. Pour ce dernier, il en était de même. D’une certaine manière, les deux personnages se ressemblaient. D’une certaine manière. La chasseuse de prime refusait d’être comparée à cet homme. Elle n’avait rien d’une révolutionnaire.

    Oui, vous avez bien lu. Si elle n’a aucune preuve, elle a malgré tout bien compris qu’elle n’a pas à faire à un simple marchand. Elle s’est rendue compte que son interlocuteur cache plus de chose qu’il ne le laisse penser. Il y avait cette attitude dérangeante. Il était trop charmeur pour être rassurant, trop fin pour passer pour un homme simple. Il y avait aussi son comportement. Posé, réfléchi. Il reniflait ses verres avant de les boire, comme s’il craignait qu’on les empoisonne. Le commun des mortels n’avait rien à craindre de ce côté-là. Pourquoi tant de méfiance, alors ? Et enfin, il y avait ses mots. Pourquoi mettre au défi la blonde de donner son nom si le nom qu’il avait donné était réel ? Louise ne savait pas qui elle avait en face d’elle, mais elle était certaine qu’il s’agissait d’un homme à multiples facettes. Un homme qui n’était pas aussi sympathique qu’il le laissait croire. Et puis, il avait également dit qu’il connaissait le nom de Mizuno. Qui, ailleurs que dans la Révolution, aurait pu en entendre parler ? Elle-même n’était pas assez connue pour cela. Ivélias était un révolutionnaire. Elle en mettrait sa main à couper. Rien que ce simple fait donnait envie à Louise de le frapper, le forcer à parler, à révéler ce qu’il savait. Mais ce n’était pas une bonne idée. Loin de là. La violence gratuite, c’était pour les faibles.

    Pourtant, lorsqu’il répondit à la question de la jeune femme, celle-ci ne put qu’admirer la subtilité de l’homme. Il avait su contourner le piège et redevenir maitre de son gage. Bien joué, elle était forcée de l’admettre. Mais rien n’était encore perdu. Les scores étaient à égalité. Ou peut-être pas complètement… La jeune femme n’avait pas encore entendu la question de son adversaire, et d’après ce qu’il avait montré jusqu’à présent, elle redoutait le pire. Elle ne manifesta toutefois aucune inquiétude lorsqu’il lui fit remarquer qu’il avait déjà une idée sur ce qu’il comptait lui demander. La seule chose qu’elle ne put réprimer, ce fut un frisson lorsque les doigts de l’autre effleurèrent les siens. Aucun désir là-dedans, ni même de la peur, mais un dégoût certain. Elle ne repoussa pas Ivélias pour autant, mais l’idée d’être si proche d’un Révolutionnaire la révulsait. Malgré tout, elle était prête à aller jusqu'au bout pour obtenir ce qu’elle voulait. Cela faisait longtemps qu’elle avait appris à faire abstraction de son corps. Peu importe ce qu’elle lui faisait subir, cela n’avait aucune importance, tant qu’elle restait maître des situations dans lesquelles elle se fourrait. Alcool, drogue, sexe… Son corps n’importait pas, ne valait rien. Mais laissons de côté ces digressions, elle avait une partie à mener. Si elle ne se trompait pas, l’autre lui avait bien demandé « dis-moi quel est mon nom ». Il l’avait eu en restant vague sur la question des identités, elle l’aurait sur le sens de la formule.

    « Moi quel est mon nom. »

    Ce genre de blague, Louise ne les avait jamais trouvées plus tordantes que ça, mais dans la situation présente, elles l’arrangeaient. La parade avait beau être enfantine, elle ferait peut-être ses preuves. Tout dépendrait de comment Ivélias prenait la chose. S’il refusait cette solution de facilité, Louise lui concéderait. Après tout, c’était un peu tricher que de répondre de la sorte. Mais comme on dit : qui ne tente rien, n’a rien.
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Une tension palpable dans l’air. Une sorte d’arc électrique entre les deux comparses. La donne venait de changer tout à coup. Plus qu’une preuve, c’était un ressenti, une intuition. Le contact fugace avec la belle avait été tout sauf agréable, comme si au dernier instant, ce regard de haine et de dégoût qu’elle aurait pu lui adresser était devenu tangible. L’assassin ramena sa main près de son corps puis dévisagea de nouveau la jeune femme. Elle était trop versatile à ses yeux, ou alors était-ce sa véritable nature qui refaisait surface ? Il n’aurait su le dire, seule cette impression fugace. Enigmatique. Il resta un instant interdit, non pas d’avoir ainsi été repoussé, mais plutôt qu’elle n’ait pu retenir ce frisson. Son dégoût était-il si profond ? Il y avait là quelque chose à gratter, une chose indicible au fond d’elle. Tenait-il là son second levier ? Etait-elle lassée de ce jeu ? Il était persuadé qu’elle aussi masquait au mieux sa volonté et ses émotions, rien que par la façon dont elle reprenait le contrôle d’elle-même, mais il avait réussi à la faire chanceler deux fois, et ce n’était pas rien. Il y avait à présent de multiples façons de mener le combat à terme, il était persuadé de savoir comment la faire sortir de ses gonds, comment la pousser à se rebeller ou encore la forcer à se comporter comme le plus doux des agneaux. De multiples possibilités mais aucune ne le satisfaisait. C’était un étrange coup du sort que de la savoir si vulnérable à ses attaques, de penser pouvoir briser sa carapace en quelques mots et pourtant en être réduit à continuer cette joute verbale grandiloquente.

Elle s’était montrée plus retorse que lui au jeu du plus malin. Elle l’avait pris de court avec une blague banale et vaseuse mais qui eut son effet. Perdu dans ses pensées, l’assassin ne comprit pas tout de suite où elle voulait en venir. Il fronça un sourcil, lui adressa un regard interrogateur puis leva les yeux au ciel. La garce. Ce furent les premiers mots qui lui vinrent à l’esprit. Il du cependant lui concéder qu’il aurait lui-même cédé à cette facilité si d’aventure elle avait commis la même boulette que lui. Il analysait cela comme une conséquence de son esquive à sa dernière question. Après tout, il n’y avait pas répondu, ce qui offrait à la jeune femme une chance de se rattraper. Et puis, lui laisser une question n’était pas un si mauvais choix. Il y avait eu, pendant ces quelques secondes du moins, quelque chose qui avait changé. Quelque chose qui avait perturbé Rafaelo. Et la laissait s’interroger dessus, lui poser la question ne pourrait pas être plus mal, au final ! Il laissa de nouveau son sourire arrogant se glisser sur ses traits, puis soupira longuement en secouant la tête.

« Je l’ai bien mérité, je l’avoue. » répondit-il, en éclatant de rire.

« Bien. Ça te laisse une nouvelle question, ainsi que l’énoncé d’un nouveau gage. Hey, on dirait que tu commences à me plumer à ce jeu … »
se plaignit-il, à mi chemin entre une hypocrisie certaine et une sincérité non feinte.

Et puis le fait qu’elle le pense bon joueur pourrait aussi lui servir. Il était évident qu’elle savait que son comportement était entièrement feint, mais il se plaisait à endosser ce rôle presque naïf. C’était comme une échappatoire au sordide de sa vie actuelle. Il était humain après tout, et comme tous il avait besoin d’exutoires. Si le symbole qu’il cherchait à créer se devait immortel, il n’en restait pas moins sujet aux maux de ses semblables lui. Un instant, il avait cru s’attacher à la jeune femme, mais l’impression avait été aussi fugace que le contact qu’il avait eu avec elle. L’aspect formel de sa quête lui revint dans le même temps, il était là pour déterminer qui elle était, et pourquoi elle avait ainsi chercher à lui mettre la main dessus, lui qui était au service du peuple. Il était bien entendu un ennemi du Gouvernement et rentrait ainsi dans la catégorie des … Ah. Bien sûr. Ses conjectures l’avaient donc menée là ? Agent du Gouvernement ? Elle n’en avait pas véritablement le profil, mais qui savait. La logique de sa réaction était à présent évidente pour Rafaelo : venait-elle de se rendre compte d’une facette de sa réelle personnalité ? Comment avait-elle pu faire le lien aussi facilement ? Bougre d’imbécile, c’était évident ! William, son frère présumé, il était dans la Révolution, lui, dans l’Union même. Il avait avoué connaître ce nom, ainsi le lien s’était fait tout seul. Elle était quand même pas mal futée la gamine. En effet, c’était dans cette voie qu’il avait connu William, mais il y avait une multitude de possibilités. Tête mise à prix ? Non, elle le saurait forcément. Altercation avec le Gouvernement ? Non, si elle en faisait partie, c’était trop risqué. Bah, autant en revenir aux bases : se servir de ce qu’il savait à son avantage. En tout cas, s’il s’agissait bien là de ce qui avait fait changer brusquement l’attitude de Louise avant qu’elle ne remette son masque, Rafaelo pouvait se contenter d’avoir deviné cela pour l’instant. Ceci lui serait utile par la suite, mais pour l’instant, il devait attendre qu’elle ne fasse le premier pas, pour le premier geste à vrai dire. C’était bizarre, mais il avait l’impression que cette rencontre était réellement orchestrée comme une partie d’échecs, chacun échangeait coup après coup et tentaient au mieux de déjouer ceux de l’adversaire, avec une grand habileté. Toutes les règles semblaient cependant permises, et l’assassin gardait encore bien au chaud la pièce maîtresse de son combat, William Mizuno. À l’évidence, il aurait une importance cruciale dans les prochaines minutes … mais l’assassin nourrissait encore l’étrange désire de ramener Louise dans son camp. Enfin, son camp, c’était une façon de parler, plutôt de l’amener à perdre toute méfiance ou à déborder de nouveau mais la partie s’annonçait de plus en plus serrée.
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    Tricher n’est pas jouer. Cette maxime empruntée aux dames aurait pu s’appliquer à la réponse de Louise. N’était-ce pas de la triche que d’utiliser contre Ivélias sa propre tournure ? Ou bien était-ce tout simplement une habile feinte ? La frontière pour passer de l’une de ces propositions à l’autre était mince. Si l’adversaire de la blonde avait refusé la réponse, la jeune femme n’aurait pas protesté. Mais il n’en fut rien. Même si la victoire s’était de ce fait montrée facile et peu honorable, l’ego de la chasseuse de prime ne s’en sentait pas entaché. Elle se moquait bien des stratagèmes utilisés tant qu’elle pouvait gagner. Le moyen importait peu, même si elle tirait une certaine satisfaction à piéger ses adversaires comme elle venait de le faire. Et le regard interrogateur que lui renvoya Ivélias valait bien cette bassesse.

    Toutefois, bon joueur, il accepta. Le rire qui accompagna ses paroles surprit Louise. Dans sa méfiance et ses réflexions, elle en était presque venue à oublier que derrière le côté révulsant du révolutionnaire, il y avait un être humain comme les autres. L’idée la fit frémir. Après tout, les pires monstres ne sont-ils pas les hommes eux-mêmes ? La perspective était plutôt inquiétante et ne faisait que renforcer ses appréhensions face à l’homme. Pourtant, avec son sourire aux lèvres et son air amusé, elle aurait pu le trouver sympathique, voire charmant. L’impression était vraiment… déroutante. Elle pinça les lèvres et reprit son verre de rhum abandonné plus tôt. Elle le porta à ses lèvres, laissant l’odeur plus que le goût l’enivrer avant de le reposer, en ayant à peine bu. Ce verre serait le dernier de la soirée. Elle ne voulait pas prendre le risque de perdre encore plus pied. Elle ne donnerait pas ce plaisir à celui qu’elle était en train de plumer, pour reprendre les mots de l’autre.

    « Evidemment. Je ne joue pas si je ne pense pas être en mesure de gagner. »

    Evidence même. Elle n’avait peut-être pas froid aux yeux, mais elle ne risquait pas à prendre des risques inutiles. Si elle avait pensé qu’elle n’aurait aucune chance de vaincre l’autre à ce jeu de défis, elle ne lui aurait jamais proposé. Surtout en considérant les enjeux. De toute manière, elle avait toujours excellé au domaine des jeux, peu importe lesquels. Qu’il s’agisse des échecs, où elle était un maître incontesté, du poker, du Monopoly, elle avait toujours un train d’avance sur les autres. Elle n’était pas forcément la meilleure à tous, mais elle savait se servir de ses atouts pour mettre en déroute les autres joueurs, pour les déstabiliser, les manipuler et les contraindre à commettre une erreur. C’était sournois, rarement apprécié, mais plutôt efficace comme tactique.

    « Donc, le gage d’abord, la question ensuite. »

    Quel défi lancer à Ivélias ? Encore une tâche dangereuse et impossible ? Non, ce n’était pas intéressant. Une énigme alors ? Pourquoi pas. Hm… Non, on verrait cela plus tard. Un peu d’action ne ferait pas de mal et permettrait à la blonde de tester son interlocuteur. Parcourant la salle des yeux, elle eut une idée en observant les malfrats attablés.

    « Je vais te donner une chance de te rattraper. Tu dois voler quelque chose à quelqu’un dans cette pièce. N’importe quoi à n’importe qui, toi exclu, bien évidemment. »

    En soit, le vol n’était pas si compliqué que ça, Louise en avait conscience. Mais elle voulait voir de quelle manière il allait réagir, ce qu’il allait faire et comment. Néanmoins, avant de le voir à l’œuvre, elle avait une question à lui poser. Une question qui tournait et retournait dans sa tête depuis tout à l’heure. Le tout était de la poser correctement afin de ne pas offrir à son adversaire une possibilité de se défiler. Elle devait faire attention aux mots qu’elle comptait employer et se montrer précise car elle n’avait droit qu’à une seule chance pour le moment. Elle inspira avant de se lancer.

    « La question maintenant. Qui est l’autre personne portant le nom de Mizuno que tu connais à part moi ? »

    Connaissait-il son frère réellement ? Savait-il où il était, ce qu’il faisait ? Louise aurait voulu rajouter toutes ces questions, mais elle ne le pouvait pas. Elle était contrainte d’attendre, le visage impassible, la réaction de son interlocuteur.
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Elle ne jouait pas pour perdre ? C’en était à se tordre de rire. Pensait-elle vraiment que Rafaelo était sincère en prononçant ces mots ? Il était encore le maître de la situation et elle n’avait que l’illusion de mener la danse. Peut être était-ce ainsi qu’elle faisait pour se mettre les autres hommes dans la poche, mais pas un assassin. Un physionomiste, un être capable de vous deviner en observant votre façon de vous mouvoir, de parler. Chacun des tics nerveux qui vous animaient étaient une mine d’or pour lui, et chacun de vos mots vous trahissait. Comment penser qu’elle était de taille, cette jouvencelle ? L’agneau se croyait pourvu de crocs à présent ? Ridicule. Elle était tombé dans la tanière du loup, et celui-ci jouait avec elle comme il l’aurait fait avec un fétu de paille. Rafaelo ne lui laissa pas voir que ses mots sonnaient creux à ses oreilles, qu’il se gaussait de lui lorsqu’elle mettait en avant sa présomption à le battre. Au pire, il la tuerait et il repartirait de cette taverne sans que personne ne puisse même s’en douter. Alors, pourquoi s’inquiéter ? Elle avait mené un homme à la mort par sa volonté. Ce ne devait certainement pas être le premier sacrifié à son compte, mais si elle persistait dans cet orgueil qui, disons le franchement, ne seyait qu’à Rafaelo, il ferait une petite entorse à la vérification des crimes de cette jouvencelle. On ne pouvait laisser quelqu’un mourir et ne pas s’en préoccuper ainsi. La prochaine fois qu’elle se montrait odieuse, il lui trouverait une raison de sortir de cet endroit et adviendrait d’elle ce qui pourrait. Un sourire mesquin se dessina alors sur ses traits, une lueur meurtrière passa dans son regard. Il se ravisa soudain. Etait-ce l’alcool qui révélait ainsi ses pulsions ? Il ne devait pas prendre ce jeu au sérieux, ou cela terminerait bien mal. Lui qui raisonnait de manière si appliquée, si cartésienne, il se méfiait plus que tout de ses propres instincts. Il risquait de faire un carnage s’il écoutait son cœur plutôt que sa tête. Il était assassin, maître dans l’art du subterfuge, de la dissimulation et de la mort. Il n’était pas fait pour considérer les simples gens, comme Césare s’aimait à les appeler.

L’assassin offrit à la demoiselle un sourire hypocrite puis se réfugia dans son verre. Il ferma les yeux en humectant une gorgée, sans la boire. Bon sang, pas de bavure ce soir. Il avait déjà assez donné dans le massacre de taverne, même si ce ne fut pas réellement de sa faute cette journée là. Il se remémora un instant le fugace instant de carnage qu’il avait partagé avec cet homme poisson destructeur surnommé Thunder F. Cette pensée attisa de nouveau une colère sourde en lui qu’il jugula autant qu’il put. Bien que son visage ne trahissait rien, il posa son verre un peu trop brusquement à son goût. Il avait failli perdre la maîtrise de lui-même pendant ces quelques secondes. Ce n’était, en soi, pas si grave, mais il n’avait aucune envie d’avoir à se battre à visage découvert. Se contrôler, surtout. Il n’avait jamais été dans une telle situation auparavant, et c’est là qu’il voyait que sa force à se dissimuler derrière de faux semblants était bien peu utile dans ces conditions. Il frappait vite et fort avant de disparaître, et jamais il ne s’attardait. Ce n’était pas pour autant qu’il allait perdre cette partie, bien au contraire. Juste qu’il aurait pensé l’emporter bien plus vite. Il avait cependant l’impression qu’il était constamment à deux doigts de dégainer son arme. Comme si cette femme envoyait en continue des pulsions de meurtre à son encontre. Il avait cette désagréable impression de se trouver face à un miroir lorsque lui dévisageait un agent du Gouvernement …

Qu’est-ce que c’était que ce gage ridicule ? Voler, lui ?! La belle affaire ! Il était partagé entre l’envie d’épater la gamine et celle de lui faire croire qu’il était incapable d’accomplir ce simple acte. Etait-ce un piège ? Peut être bien, mais elle semblait le deviner de plus en plus, alors pourquoi faire semblant. Il soupira longuement en secouant la tête. Non, elle ne s’exposerait pas ainsi, pas à une question de sa part si c’était le cas. Diantre, elle ne se doutait vraiment de rien la donzelle. Rafaelo se recula d’un pas du comptoir et écarta les bras. Il fit jouer ses doigts devant lui puis tourna les poignets en un habile tour de passe-passe. Il révéla alors, à plat sur sa main, une figure en ivoire représentant une tour surmontée d’un cœur éclatant. Il attrapa la figurine et la posa sur le comptoir et la fit négligemment danser du bout du doigt. C’était une pièce d’échiquier. Une pièce finement sculptée dont la valeur devait être plus sentimentale que vénale. Il ne put retenir un rire satisfait lorsqu’il se plongea à nouveau dans les yeux vairons de la damoiselle. Il se stoppa alors et abattit la pièce sur le comptoir, toujours en la dévorant du regard. Son sourire en disait long.

« Echec … et mat ? » se moqua-t-il alors que la pièce oscillait sur le bar.

Quand diable avait-il pu dérober cela ? Lors de leur première entrevue, l’avait-il assez approchée ? Ou alors lors de leur premier verre échangé ? Lorsqu’il s’était rapproché d’elle pour lui parler tout bas, ou était-ce lorsqu’il l’avait effleurée ? Il était un maître assassin, cela aurait pu être n’importe quand. La Volpe, le voleur qui lui avait appris ses tours, en avait fait un expert dans ce domaine, il était capable de dérober son arme à un Colonel tout en lui parlant en face, si vous voyez l’image. Il n’avait évidemment pas pu résister à ce coup d’éclat, à faire ravaler de sa superbe à Louise. Il aurait même lui prendre alors même qu’elle lui proposait ce défi, mais cela importait peu. Il l’avait fait car il le pouvait, c’était généralement ce qui guidait ses gestes. De même, il savait que ce soir il repartirait plus riche qu’il n’était arrivé. On aurait pu le prendre pour un prestidigitateur mais c’était sans compter le côté sombre et malsain qu’on pouvait percevoir chez lui et il était persuadé que la jeune femme s’en était rendu compte. Il avait pris un malin plaisir à la perturber, à la mener où il voulait la mener, avec ou sans succès, mais ce coup là était celui d’un maître. Elle venait de lui donner une occasion en or de se remonter, de reprendre la main sur cet affrontement. Mais tout ceci avait bien entendu une contrepartie, maintenant elle savait. Elle savait qu’il n’était pas un homme du commun, qu’il ne pouvait être ici par hasard. Mais de là à savoir qu’il était là pour elle … il y avait encore un pas à faire. Quoi qu’il en soit, si elle le prenait déjà pour un membre de la Révolution, qu’avait-il à perdre à jouer ainsi ?

Venait donc la question. Ah. Enfin, enfin elle en venait à son frère. Il ne l’en avait détournée que quelques instants, mais suffisamment pour l’ébranler. Il aurait pu feinter, trouver un moyen de détourner ses mots. Elle devait bien avoir un père, ou une mère non ? Mais le jeu n’en serait pas aussi plaisant qu’il ne l’était en cet instant s’il ne l’achevait pas avec une dernière pique. Il la tenait dans le creux de la main, il devait la surprendre à nouveau, la faire chanceler pour mettre cette forteresse à bas. En feintant, il ne serait pas aussi puissant qu’avec un coup puissant. Non. Il devait dévorer la Reine et mettre le Roi à mal. Une image qui lui plairait, à n’en pas douter vu ce qu’il avait trouvé sur elle … Cette pièce symbolique lui en apprenait beaucoup sur la façon de réfléchir de la jeune femme. Elle envisageait certainement l’échange coup par coup de manière froide et logique. Tout comme lui. Mais lui ne laissait aucun survivant. Il ne jouait qu’avec une seule pièce et éliminait toutes celles de l’adversaire sans frémir. Il se rapprocha donc de la jeune femme et lui offrit un de ses plus beaux sourires. Il ouvrit lentement la bouche et s’humecta les lèvres. Il désirait la faire attendre, la faire frémir de cette réponse. Son regard se durcit et se fit soudain beaucoup moins sympathique mais tout aussi pénétrant. Il allait donc lui révéler l’horrible vérité ? Non, il allait la faire souffrir, encore une fois. Il allait l’ébranler tout comme il l’avait fait la première fois qu’il avait murmuré ce nom.

« Ton frère. » lui susurra-t-il.

Puis il se recula, admirant le spectacle de sa révélation. Un sourire mesquin trônait sur ses traits alors qu’il prenait définitivement l’aval sur sa conception de la rencontre. Elle ne cessait de lui donner des armes, malgré elle. Il était venu la voir avec une longueur d’avance, s’en rendait seulement compte ? Il n’avait pas seulement pris la peine d’être sûr de gagner, il avait déjà conclut de l’avenir de cette confrontation dès son départ. Mais tout n’était pas là. C’était à présent à lui. À lui de reprendre les rênes et de mener ce combat sur son propre terrain. Mais il ne voulait pas encore lancer de gage, non. C’était bien trop tôt. Il voulait la pervertir, la faire sombrer et lui faire comprendre qu’elle ne pouvait rien face à lui. Il savait comment y parvenir, et il savait qu’il lui faudrait gâcher une question pour cela. Non, ce n’était pas gâcher mais plutôt optimiser. Il connaissait la réponse, cela se lisait sur le visage de cette pauvre créature, mais il fallait qu’elle sache qu’il le savait et qu’il la dominait, qu’il était si loin devant elle qu’il était au dessus du jeu et savait déjà ce qu’il y avait à savoir sur elle. Oh, il n’avait que beaucoup d’hypothèses mais cela suffisait. Elle se prenait peut être pour la Reine, mais même les Empereurs étaient humains face à la mort. Comment pouvait-elle se croire au dessus de lui alors qu’il incarnait la fin de tout être ? Qu’elle redescende à sa place et le regarde d’en bas. Il était Il Assassino. Qui donc pouvait oser se dresser face à la terrible famille Auditore ? Exactement, personne.

L’assassin lui offrit un sourire entendu, puis hocha de la tête. Maintenant, c’était à son tour. Maintenant il allait lui porter le troisième coup de cette troisième manche. Il se rapprocha de nouveau mais resta plus distant qu’auparavant. Il laissa quelques secondes pour la tension s’installe de nouveau et qu’elle perçoive le malaise qu’il cherchait à imposer. Elle devait le sentir dangereux, tout autant que charmeur. Elle devait ressentir à quel point il pouvait être pire qu’elle dans ce domaine. Il était le démon, qui vous charmait pour mieux vous précipiter dans les enfers, dans les affres de la mort. Qu’elle y vienne et elle ne serait pas déçue du voyage. Mais il ne serait satisfait qu’après l’avoir brisée. Après l’avoir vue s’effondrer comme un château de carte. Il entrouvrit la bouche et inspira longuement avant de poser sa fatidique question.

« As-tu déjà tué ? » lui murmura-t-il.
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    Louise était préparée. Elle savait que la réponse serait difficile à accepter, que son interlocuteur exploiterait la moindre de ses failles. Elle savait. Et pourtant, les deux mots prononcés lui firent l’effet d’un coup de poing dans l’estomac. Son frère. Alors c’était bien la vérité ? Etrangement, elle ne se sentait pas capable de remettre en question les propos de l’autre. Pas un instant elle n’envisagea qu’il puisse mentir. Son frère. Il le connaissait. Et il le connaissait suffisamment pour faire le rapprochement avec elle. La blonde ferma les yeux, se forçant à ne pas laisser ses sentiments l’endiguer. Elle devait tenir. Elle ne pouvait pas s’effondrer, pas maintenant. Pas en pleine partie.

    Quelques instants plus tôt, Ivélias avait eu le culot de réussir son gage en déposant une pièce d’échec sur le comptoir. Une pièce qui appartenait à Louise. Un roi immaculé. Echec et mat avait-il dit. La phrase n’avait pas plu à la blonde. Elle était celle qui devait prononcer ces mots. Elle était la Reine implacable qui ne reculait devant aucun sacrifice. Jamais elle n’avait douté de cela, et le fait que ce fanfaron abatte ainsi le roi devant elle ne remettrait pas ses convictions en question. Plutôt mourir. Et puis de toute façon, le roi n’était pas important. Il n’était qu’un enjeu mineur de la partie. On devait le protéger, certes, mais sans les autres pièces, le roi perdait tout intérêt. Futile pièce. Un sourire sans joie fendit le visage la jeune femme. S’il savait. Si Ivélias savait ce que les échecs représentaient pour elle, s’il savait que si elle l’avait mis au défi de la battre il n’y serait jamais parvenu… Elle prenait toujours les noirs. Non seulement pour laisser un coup d’avance à ses adversaires, mais aussi parce qu’elle avait quitté depuis longtemps la pure innocence de l’enfance. Ses rêves, ses désirs, ses espoirs, tout s’était envolé. Ils avaient sombrés comme ce roi qu’Ivélias avait abattu. Quelle situation ironique.

    « Dans tes rêves. »

    Non, elle ne s’était pas laissée démonter par le vol. Elle ne l’avait peut-être pas vu faire, elle n’appréciait peut-être pas que la main du révolutionnaire se soit aventurée dans son sac, mais elle ne lui ferait pas la joie de se montrer troublée par cet « exploit ». Elle avait de toute manière obtenue l’information qu’elle voulait. Elle avait eu une preuve du danger que pouvait représenter Ivélias. C’était ce qu’elle avait cherché et ce qu’elle avait obtenu. Pourquoi demander plus ? Non, elle ne dirait rien de plus, n’afficherait rien. Elle attendrait la suite en silence, soutenant le regard de l’homme. Sans crainte. Ce stupide gage ne l’intéressait déjà plus. Ce qu’elle voulait c’était sa réponse. Une réponse qui tardait à venir, qui oppressait la jeune femme par son retard. Le sourire de son adversaire faillit être la goutte d’eau qui faisait déborder le vase. Lumineux, victorieux, charmant, il aurait donné envie de vomir à Louise. Il n’y avait rien de vrai chez cet homme, sa satisfaction et son ego mis à part. Il jouait avec elle ou pensait le faire. Elle en était parfaitement consciente. Elle savait ce qu’il faisait pour l’avoir elle-même fait subir à de nombreux autres auparavant. C’était donc ainsi que ses victimes avaient pu se sentir ? Prises au piège, inquiètes ? Non, certainement pas. Ils n’avaient jamais été assez subtils pour déceler la toile qu’elle avait tissé autour d’eux. Et lorsqu’ils s’en rendaient compte, c’était déjà trop tard. Qu’en était-il pour elle ? Elle n’eut pas le temps d’y songer plus que déjà la réponse tant attendue tombait, implacable.

    Son frère. C’était bel et bien ce qu’il avait osé dire. C’était ce qu’elle s’était attendue à entendre. Et pourtant, elle ne su faire face. Elle se sentait au bord d’un gouffre où Ivélias n’attendait que de la pousser. Les yeux fermés, la blonde tenta de se reculer, de s’éloigner de cette abysse qui l’attirait inexorablement. Ses mains tremblaient et elle dut serrer les pans de sa robe pour les abaisser. Echec et mat, hein ? Louise devait lui concéder ce coup. Lorsqu’elle se sentit en mesure de faire à nouveau face à son adversaire, elle rouvrit les yeux et les planta dans son regard océan. Encore un abyme. Elle n’y prit pas garde et accueillit le sourire qu’il lui offrit avec un sourire dur et peu engageant. Si elle avait pu, elle l’aurait tué sur le champ. Mais au lieu de passer à l’action, elle laissa son esprit visualiser encore et encore le corps de cet Ivélias se faire transpercer de part en part par son poignard. Vision délectable qu’elle n’était pas encore en mesure de rendre réelle. Si elle attaquait dans son état, dans ce lieu, les risques seraient trop élevés pour elle. Elle se contenta donc d’un regard meurtrier. Et lorsque la nouvelle question tomba, ce fut presque avec sérénité qu’elle l’accepta.

    Avait-elle déjà tué ? Pour un peu, la question l’aurait amusée. Evidemment. Bien sûr qu’elle avait tué, à plusieurs reprises déjà. Mais la mort n’était rien sinon une délivrance. Combien de fois avait-elle-même songé à s’accorder cette délivrance ? Combien de fois s’était-elle sentie prête à se donner la mort ? Sa vie n’avait rimé à rien. Enfermée dans une spirale autodestructrice, elle avait toujours été trop lâche pour voir la réalité en face, pour accepter ses erreurs. Ses voyages, ses recherches, tout n’était qu’une fuite désespérée pour échapper à ses propres démons.

    Avait-elle déjà tué ? Oui. Et elle était sa première victime. Elle se tuait à petit feu. Chaque jour un peu plus. Cette manière d’oublier son corps, de se perdre dans les plaisirs de la chair et dans l’ivresse de l’alcool ou des drogues n’était qu’un moyen parmi d’autres de se punir de sa lâcheté.

    « Oui. »

    Comment placer plus de détresse dans un seul mot ? Pour la première fois dans la soirée, Louise s’était montrée sincère. Pour la première fois depuis des années, elle avait dévoilé une fragilité qu’elle avait toujours fait en sorte de dissimuler. Elle avait laissé une ouverture vers ce roi si bien protégé. Mais tout cela ne dura qu’un instant, un fugace instant auquel la jeune femme mit un terme avant même qu’il ait pu réellement prendre vie. Elle n’avait pas le droit de perdre pied.
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Lentement la carapace s’affaissait. Il la voyait céder par petits bouts, se craqueler petit à petit sous ses coups incessants. Elle était comme toutes les autres. Au fond du gouffre ne se trouvait qu’une gamine effrayée qui hurlait à l’aide. Au départ de tout cela, un traumatisme, un choc profond qui l’avait tournée dans cette voie de destruction. En d’autres temps et d’autres lieux, l’assassin aurait pu lui venir en aide. Non, il aurait seulement souhaité le faire. Il la vit chanceler à la mention de son frère et son attachement le troubla, lui aussi. Lui rappelant à quel point il était lié à Césare et combien sa perte lui serait douloureuse. Mais c’était une autre histoire que la sienne, et la sphère personnelle n’avait pas à y entrer. Il devait se contenter de maintenir ce mur entre eux et enterrer petit à petit sa proie. Mais déjà, son désir de la briser s’atténuait. Il ne récoltait pas là l’instant de joie qu’il pensait atteindre. Il ne voyait que du dépit et de la souffrance. Un instant il regretta son geste, seulement un instant. Il n’était pas né pour la souffrance mais elle l’avait façonné aussi sûrement que le plus grand des sculpteurs. Il avait fait de l’ombre sa seule compagnie et l’avait toujours préférée à la lumière, qu’il prétendait pourtant rechercher. Que penser alors de sa pitoyable existence ? Qu’elle n’était animé que par une seule cause dévorante, la haine et la vengeance. En cet aspect, il la préférait à maintes autres mais il ne s’était jamais posé la question de réellement savoir qui il était et s’il désirait véritablement cela au fond. Pourquoi tant de réminiscences ? Parce que ce fragment de victoire ne lui était pas aussi savoureux qu’il l’escomptait ? Non. Il avait touché une corde sensible chez son adversaire, une corde qui prenait naissance dans une de ses propres failles. La famille. Qu’on ose toucher à ce qu’il pouvait rester de la sienne et il entrerait dans une rage sourde et destructrice, que penser alors de ses moyens pour venir à bout de la résistance de cette femme ? William apprécierait-il ? Mais que diable venait faire son avis là dedans ? Rafaelo était apte à diriger ses actes seul, sans le soutien de qui que ce soit, alors pourquoi de telles questions ? Il le niait, mais il connaissait parfaitement la réponse. De la voir ainsi fragilisée, de voir ce qu’il y avait derrière le rempart l’avait ému. Ce n’était pas de la pitié, mais ça s’en rapprochait. Une forme d’empathie à l’attention de cette femme qui souffrait. Il devinait là la source d’une profonde rancœur dont il ne connaissait pas réellement la provenance.

Voilà les dangers que recelaient le cœur d’un assassin. Son raisonnement logique partait en vrille et les racines de la compassion lui broyaient les tripes. Comment penser agir efficacement ainsi ? Ses pensées n’avaient pas à interagir avec sa volonté. Les mécanismes de pitié étaient souvent utilisés par l’adversaire et il devait se faire violence pour ne pas y céder. Il resta un instant interdit à partager un fragment de cette douleur puis il se ressaisit. Là n’était pas sa volonté. La victoire, du moins celle-ci, lui semblait bien amère mais elle restait réelle. Il n’avait pas à comprendre son adversaire, et son raisonnement devait se maintenir à la seule fin de la duper et de la briser. Il n’avait plus même besoin de la questionner sur ses actes de ce soir, le schéma se dessinait très clairement dans son esprit. Elle recherchait son frère, comme le témoignait son intérêt et le choc démontré. Ainsi, elle avait tenté d’attirer un Révolutionnaire dans ses filets en tentant de faire vibrer la corde sensible de celui-ci. Peut être avait-elle entendu parler de lui, il n’en savait rien, mais en tout cas, elle avait réussi. Elle avait sacrifié un Marine pour cela, mais la facilité avec laquelle elle l’avait fait démontrait que la mort ne l’effrayait pas, et donc qu’elle avait très certainement déjà tué comme elle venait de l’avouer. La suite n’était qu’une affaire de décisions pour l’assassin. Il pouvait décider de jouer le jeu, encore, ou d’en finir. Cette femme n’était à présent plus intéressante à ses yeux. Elle avait perdu en saveur dès l’instant où il l’avait comprise mais ses sentiments, car on pouvait les appeler ainsi, ne battaient pas au même diapason. Il cherchait à faire taire cette agaçante voix qui lui commandait de ne pas être aussi cruel, de laisser une chance mais il y avait longtemps qu’il avait oublié le chemin de la rédemption. Seul comptait le châtiment et il devait se montrer exemplaire. Une nouvelle idée de gage naissait peu à peu en lui, mais elle était en désaccord avec ses pensées. Cette femme l’avait appréhendé et saisi une partie de ses qualifications : elle ne pouvait pas vivre avec ces secrets. Elle était capable de faire le lien entre son visage et les idéaux Révolutionnaires, chose dangereuse pour lui. Se devait-il de la tuer ? L’obliger à le faire par elle-même ?

Rafaelo soupira longuement. Il s’adossa au bar et laissa un silence de mort s’installer. Peu importe ce qu’elle pouvait penser, sa dernière réponse avait achevé le jeu aux yeux de l’assassin. Il n’était plus intéressé une fois le mystère percé. Il repoussa son verre d’une main négligente puis se tourna de nouveau vers la demoiselle. Elle pouvait avoir remis son masque, il avait vu au travers une fois, et cela avait suffi à le lasser. Plus de suffisance, plus d’arrogance seulement de la lassitude. Il la considéra un instant, estima qu’elle devait néanmoins constituer une bonne combattante mais ne sut trancher si la vie ou la mort lui seyait mieux. Que faire ? Il était rare qu’il soit indécis sur ce point. Elle ne méritait pas la mort à ses yeux, mais la nécessité l’exigeait. Une seule chose retint alors ses pensées. Elle était la sœur d’un des hommes de son frère. Et il devait avant tout considérer l’importance de la loyauté de William, et la tuer n’entrait pas en compte dans ce cas. Il rapporterait cette histoire au concerné et jugerait alors si sa décision était justifiée. Oui, il allait faire comme ça. Pas la peine de continuer plus longtemps cette mascarade, autant en terminer là et laisser le doute et la souffrance faire germer quelque chose de plus … révoltant chez cette femme. Peut être serait-elle un atout par la suite ? Elle lui avait bien plus, un peu plus tôt, et même si cet instant était passé, il avait existé. Elle ferait une parfaite servante du peuple à ses yeux, une parfaite révolutionnaire, puisque c’était ainsi qu’on les appelait, à tous les mettre dans le même sac. L’assassin se redressa puis épousseta ses habits, adressant un regard un peu plus doux à la jeune femme.

« Bien. Je te fais cadeau du gage, ma demoiselle. Il est temps pour moi de dormir car j’ai fort à faire demain. Ce fut une plaisante rencontre, peut être à refaire. » lâcha-t-il, sur un ton plus enjoué qu’il ne l’aurait voulu.

« Et ne perds pas espoir … un jour viendra où cela changera. » lui murmura-t-il, avant de se reculer et de faire quelques pas vers la sortie.

Il avait dit ces paroles un peu dans le vent, mais il parlait sincèrement à l’adresse de sa relation peut être houleuse avec son frère, et surtout par rapport à ce qu'il avait pu voir d'elle. Il n'avait pas même pris garde à conserver son timbre de voix feint, ni même sa posture exagérée. Un instant, il s'était trouvé trop las pour endosser ce rôle, tout comme il avait prodigué ces quelques mots à l'adresse de celle qui fut son adversaire. Mais il se rendit soudain compte qu’il parlait en général, comme il aurait parlé de cette ville, de cette infâme corruption qui la rongeait jour après jour. Ces mêmes mots qu’il avait lâché à l’attention de …

« Oh. » lâcha-t-il malgré lui.
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    Alors Ivélias ? Quel plaisir retires-tu de m’avoir humilié ? Les yeux fichés dans ceux de son interlocuteur, la question inaudible que posait la jeune femme se devinait sans mal. Elle s’était montrée faible et méritait la réaction de son adversaire. Elle aurait agi pareil, elle n’en doutait pas une seconde. Peut-être avec un contentement plus marqué. Elle était une prédatrice après tout. Elle ne s’estimait satisfaite qu’une fois sa cible brisée, étalée devant ses pieds, prête à faire tout ce qu’elle lui demanderait. Louise n’avait pas un bon fond. Ses expériences avaient peut-être joué sur sa personnalité, mais elles n’avaient fait que ressortir ce qu’il y avait de pire chez elle. D’une certaine manière, elle était toute aussi monstrueuse que les révolutionnaires qu’elle exécrait. Mais elle s’assumait et c’était ce qui lui permettait d’avancer la tête haute. A condition que personne ne s’amuse à attaquer ses points faibles, bien sûr. La soirée avait été longue et éprouvante et la blonde sentait avec un certain soulagement qu’elle touchait à sa fin. Ivélias le confirma en annonçant qu’il se retirait pour la nuit.

    Le comportement de l’homme avait changé. Il n’y avait plus chez lui la malice qui avait dominé l’échange dès leur rencontre. Il n’était plus question de défi, de jeu ou de quoique ce soit d’autre. Non, maintenant, il semblait las. Las de quoi ? D’elle ? De son caractère de merde et de ses jeux de gamine ? Peut-être. Louise n’avait pas tellement envie de savoir en fait. Elle avait assez donné pour la soirée. Suffisamment pour que, contrecoup de l’émotion, elle laisse son aversion et sa colère prendre quelque peu le contrôle de ses actes. Oh, pas une colère foudroyante qui vous fais agir sans réfléchir, non. Une colère plus froide, plus calculée, quelque chose de plus dérangeant. Grâce à un monumental effort de volonté et des années passées à dénier la réalité, la jeune femme parvenait à repousser sa détresse, à l’enfouir là où elle ne pourrait pas ressortir avant un moment, avant qu’elle ne soit seule.

    « Bien, j’espère que le spectacle t’aura plu. »

    Il n’y avait plus aucune fragilité décelable chez la jeune femme. Toute inquiétude, tristesse ou forme de remord avait disparu. Elle ne pensait plus, elle agissait simplement avec la froideur calculée dont elle avait appris à user. Elle ne cherchait pas à comprendre pourquoi elle réagissait comme ça, pourquoi elle se sentait juste inapte à ressentir quoi que ce soit. Elle agissait. Elle agissait comme la salope manipulatrice qu’elle était. Est-ce que son désarroi passé avait réellement existé ? Avait-elle seulement éprouvé les émotions manifestées un peu plus tôt ? Impossible à dire. Comme pour protéger son esprit, tous les sentiments superflus s’étaient envolés. Le changement radical était déroutant, peut-être même dérangeant. Elle n’en avait cure. Elle ne pensait pas.

    Lorsqu’Ivélias se releva après lui avoir murmuré quelques mots, elle ne manifesta aucune surprise. Elle se contenta de sourire froidement, le détaillant de bas en haut. Elle s’était interrogée plus tôt au sujet de l’homme masqué de la rue, puis elle l’avait oublié. Mais en soit, il n’y avait rien de surprenant à ce qu’il s’agisse d’Ivélias. Qui d’autre ?

    « Evidemment… Ca ne peut être que toi. J’aurais dû faire le rapprochement plus tôt. »

    Sourire toujours aussi sinistre aux lèvres, la blonde se leva à son tour. Elle s’approcha de son interlocuteur sans pour autant le menacer d’aucune façon. Très calme, elle laissa glisser sa main contre sa joue avec de se pencher à son oreille pour à son tour lui murmurer quelques mots.

    « Ce charmant visage, je ne l’oublierais pas, sois-en sûr. Mais pour te remercier des informations que tu m’as fournie, je n’en toucherais pas un mot au gouvernement, n’aie crainte. Mais je te traquerais, toi comme mon frère, et lorsqu’on se reverra, notre rencontre sera bien moins amicale. »

    Oui, il s’agissait bien d’une menace. Cela ne plairait peut-être pas à Ivélias, mais ce n’était pas important. En revanche, pour ponctuer sa tirade, la blonde redescendit vers le visage de son interlocuteur et effleura ses lèvres en lui susurrant un « à bientôt ».
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Quel est le mérite d’un assassin ? Rester inconnu, dissimulé dans l’ombre. Que son visage ne soit pas reconnu, seulement ses actes. Pouvoir marcher dans les rues sans que personne ne le découvre ou ne se méfie de lui, qu’il puisse encore et toujours se faufiler dans le dos de ses ennemis et leur assurer un coup fatal. Cela n’était plus possible lorsque l’assassin était identifié. Il se condamnait alors à une vie entière de masques et de faux-semblants. Des masques bien réels, ceux-ci, auxquels on ne pouvait échapper si l’on désirait se protéger de la folie ambiante qui guettait les années à venir. Une seule mégarde et quelqu’un pouvait apercevoir ce qui trônait sous le déguisement du meurtrier et alors c’en était fini de lui. Les assassins n’avait qu’une seule règle d’or, celle de leur anonymat. Et en cette soirée, Rafaelo ne l’était plus. Il venait d’enfreindre de manière stupide l’une de ses plus grandes résolution, celle de ne jamais révéler son visage à qui n’était pas prêt. Il avait pris la décision d’épargner cette jeune femme en l’honneur de l’homme qui combattait dans le même camp que lui, mais la donne avait alors changé. Lentement, il se retourna et laissa cette fois tomber tout masque, adressant un meurtrier regard à la jeune femme. L’air semblait s’être glacé tout autour de lui, tant son visage exprimait une détermination sans faille. Tout trace de charme avait disparu de ce visage, seule une terrifiante fureur. Une aura de meurtre écrasante, tout comme un danger naissant. L’assassin aurait eu ses lames secrètes, il les aurait dégainées sur le champ et se serait rué sur la jeune femme mais son esprit lui rappela où il était. Au milieu d’une taverne, à visage découvert. Il devait absolument l’entraîner dehors, la tuer et s’enfuir en laissant là le cadavre de la pauvrette. Non. Il devait aussi la cacher pour que personne ne puisse faire le lien. L’éliminer n’était pas suffisant, sa couverture était corrompue. Elle ne pouvait vivre, c’était la seule chose dont il était sûr.

Le contact attisa en lui une déferlante de colère, tant envers lui-même qu’envers cette femme qui avait trouvé un moyen de le faire fléchir. Il resta de marbre alors qu’elle lui caressa la joue, mais il y prit, étrangement, un égoïste plaisir à ce toucher. La partie recommençait dès lors, comme si cette flamme de rage lui avait redonné de l’intérêt pour cette confrontation. Il chassa la main d’un simple geste de la tête mais ne repoussa pas la tête de la blonde qui vint lui murmurer à l’oreille. S’il exhalait une aura, elle aurait été empreinte du rouge qu’il désirait verser dès à présent. En un chaste contraste, il voyait les ténèbres envelopper cette étrange créature. Il était à peu près sûr qu’elle était aussi retorse que lui, aussi dangereuse même mais elle avait trop de points faibles, ce qui la perdrait. Sa seule faiblesse était bien plus forte qu’il ne l’était, lui. Et l’autre … était morte le jour de sa naissance. Pourquoi alors s’inquiéter de cela ? Non, pour devenir un danger à ses yeux, elle devrait s’affranchir de tout cela. Dès lors, elle serait capable de le détruire … grâce à ce qu’il venait de lui donner. Une seule mégarde, une seule erreur. Comment avait-il pu lâcher ces mots, comment avait-il pu faire une telle erreur ? Répéter par deux fois une phrase à la même personne sous le couvert de deux identités. Pitoyable. D’autres personnes n’y auraient vu que du feu, mais pas elle. Non, elle n’était pas commune.

Il serra les dents, frémit sous ce contact qu’il n’aurait su qualifier. De la haine, de la satisfaction ? Peu importait, cela se rejoignait en un sens. Il avait relâché sa garde un instant, fait un faux pas et elle allait le payer de sa vie. Il porterait cette mort comme un fardeau mais ne renoncerait pas pour autant à son combat. Sa cause était bien plus grande que la simple existence de quelques individus, lui y compris mais il se devait de vivre pour assurer la pérennité de son combat. Alors ce soir, il ne pouvait laisser de telles traces, quand bien même elle lui assurait de ne pas divulguer son identité. Il n’y avait aucune raison de prendre part au jeu auquel elle lui demandait de se prêter. Un léger sourire se dessina sur ses traits, alors qu’elle s’imaginait être capable de le traquer. Non, cela ne se passerait pas ainsi. Elle ne dicterait pas les règles car il la tuerait ce soir. Seulement, pas ici … quoi que. Il frissonna de nouveau avec la proximité des lèvres de la jeune femme puis sourit malicieusement. La partie n’était donc pas terminée ?

« Non. » lui répondit-il, simplement.

Sa main gauche s’envola rapidement à la gorge de Louise et d’un geste puissant il la plaqua contre la charpente. La violence du choc fit se lever quelques têtes qui dévisagèrent les deux inconnus d’un œil suspicieux. Un Marine osa même tirer son épée de quelques centimètres. Le silence ne se fit pourtant pas, mais ce n’était pas passé inaperçu. Rafaelo en était parfaitement conscient. Il resserra sa prise, bloqua le bras droit de la jeune femme de son coude et saisissant l’autre de sa main libre. Il planta son regard océan dans celui de la jeune femme puis se rapprocha lentement de son visage et y déposa ses lèvres. Les têtes se désintéressèrent alors de l’affrontement, et l’assassin rapprocha son corps de celui de sa victime. Il interrompit son baiser et se rapprocha de son oreille, doucement.

« Je peux te tuer de cinq façons en te maintenant dans cette position, dont trois qui te laisseraient un sursis de quelques minutes. » lui murmura-t-il, sur un ton glacial.

« Je ne voulais pas te tuer, mais maintenant je vais t’apprendre qu’on ne me traque pas. Pas plus que je ne laisse de témoins derrière moi. » continua-t-il, toujours aussi monocorde.

« Donne-moi une seule bonne raison de ne pas le faire. » cracha-t-il enfin, en resserrant son étreinte.

Pourquoi diable lui laisser une chance ? Il ne devait pas la laisser vivre, surtout pas ! Etait-ce ce baiser ? Non, c’était trop stupide. Il ne pouvait décemment s’attacher à cette gamine, admirer sa logique froide et implacable. Sa façon qu’elle avait de se remonter après chaque échec, ainsi que cette faiblesse non feinte. Ce n’était pas correct, il ne pouvait pas laisser ses impressions guider sa logique. Malheureusement pour lui, il était encore humain, et c’était ce qui l’empêchait de sombrer dans des abîmes de démence et de destruction, ce qui le maintenait encore et toujours sur la bonne voie. Il avait l’impression de voir une personne de sa trempe en face de lui, une personne coulée dans le même métal que sa haine. Pourquoi diable était-ce ainsi ? Pourquoi n’aurait-il, tout simplement, pas pu s’amuser avec elle et la jeter comme toutes les autres ? Non, il lui laissait une chance, mais ce n’était pas une preuve de faiblesse. C’était une preuve d’humanité, pas de faiblesse. Du moins, il cherchait à s’en convaincre.
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