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Tomber, puis s'élever



Tomber, puis s’élever


Flashback
✘ Solo




Le vent qui soufflait dans la toiture, les vagues qui s’écrasaient sur les larges flancs de Borat, les oreilles de ce dernier brassant les flots. Ce furent tout d’abord les sons qui me parvinrent, me sortant de ce sommeil profond dans lequel j’avais sombré à notre départ d’Îlipucie. Le combat avait été dantesque, si violent que j’en ressentais encore les séquelles alors que je me relevais doucement dans mon lit. Je ne savais pas combien de temps j’étais resté inconscient, mon corps était couvert de bandages, certains encore tâchés de sang. Un médecin de l’équipage avait dû s’occuper de mes blessures.

Mon dernier souvenir remontait au moment où, juste après mon combat à mort contre Sal Veol, j’avais dévoré le fruit du démon récupéré pendant l’affrontement. Je me souvenais du goût amer qui avait faillit me faire tout vomir, la sensation des morceaux du gros fruit descendant mon œsophage. J’avais attendus, adossé à un mur en ruines devant le corps inerte et broyé de l’homme dont je m’étais vengé. Le combat avait été rude, violent et sanglant, mais j’avais pus lui rendre la pareille de ce qu’il avait fait subir à Ivar, mon maître qui m’avait apprit à me battre, mon chef qui m’avait sortit de la misère des rues. Autant dire que je m’étais défoulé sur Sal une fois que j’avais pris le dessus. Toutefois, je ne m’étais pas attendus à ce que le salopard se batte si bien. En y repensant, j’étais passé à deux doigts de la mort. Et, le fruit du démon avait été une récompense à la hauteur des risques encourus.

Alors que je me levais du lit, m’aidant d’une béquille laissée à mon chevet, je réfléchissais à ce que mes nouveaux pouvoirs pouvaient faire. Je savais qu’il existait des catalogues répertoriant les fruits du démon, mais je n’en avais pas sous la main. De plus, je préférais découvrir cela par moi-même, la découverte d’un nouveau pouvoir il n’y a rien de mieux. Après avoir enfilé des vêtements, seulement habillé de bandage et d’un caleçon jusque là, je gagnais la salle du rez-de-chaussée. Sous mon pas lent, boitant légèrement même à l’aide de la béquille, les marches grincèrent, annonçant mon arrivée.

« Tiens, tiens, j’crois que le grand blessé s’est réveillé. » fit ‘Liquor’ Jack, toujours à sa place derrière le comptoir du bar. « Un café ça te va ? » demanda-t-il alors, fidèle à son poste.  

Un léger sourire aux lèvres, j’atteignis le bas des marches en faisant un signe de main aux quelques personnes présentes pour les saluer. Je me sentais encore faible, même après avoir autant dormis. Je me traînais péniblement jusqu’au comptoir pour prendre place sur un des hauts tabourets, m’accoudant sur le bar.

« Ouais, c’est nickel, merci Jack. » dis-je calmement, ma voix encore un peu éraillée.

Je balayais la salle du regard, la taverne était devenue un point de rendez-vous pour les membres d’équipage en pause. L’endroit était agréable après tout, et permettait de souffler un coup en buvant une bonne bière fraîche. Ainsi, plusieurs hommes buvaient aux tables, riant joyeusement en profitant du moment. Une quinzaine de tontattas étaient directement assis sur une table ronde, celle-ci assez large pour tous les accueillir. Ils tenaient des choppes aussi grandes qu’eux, les renversant en y plongeant leurs têtes, leurs barbes en ressortant couvertes de mousse. Depuis qu’ils nous avaient rejoints sur Union John, la bande d’une cinquantaine d’individus du fier peuple des tontattas s’était installée sous la maison, celle-ci étant surélevée et ayant un espace sous le plancher assez grand et haut pour les accueillir. Ils s’étaient construit leur petit village personnel sous la taverne avec l’aide des charpentiers de l’équipage, et semblaient contents de nous avoir rejoint.

« J’ai pioncé longtemps ? » demandais-je à Jack en attrapant la tasse de café qu’il me tendait.

« Une semaine, tu te réveillais de temps en temps avant de retomber inconscient, tu dois crever de faim. Je vais te préparer un truc. » me répondit-il en s’affairant derrière le comptoir, attrapant une miche de pain avant de disparaître dans la cuisine à l’arrière.

« Maintenant que tu le dis... » dis-je doucement en posant une main sur mon ventre, celui-ci se mettant à grogner et gargouiller.

Au bout du comptoir, le petit chat noir Momo y grimpa d’un bond agile, se dirigeant vers moi de son pas leste et enjoué, faisant danser sa queue derrière lui. Il vint trottiner jusqu’à moi, frottant sa tête contre mon bras, tournant et retournant en se mettant à ronronner.

~ Meoooow Meoow rooooonrr ~

Je lui fis quelques caresses et, comme à son habitude, il se mit à me grimper dessus le long de mon bras jusqu’à mon épaule où il patonna brièvement avant de plonger dans ma capuche et de s’y lover en boule. Il s’endormit dans cette position en continuant de ronronner, sa présence dans mon dos avait un petit quelque chose de rassurant. Jack revint de derrière le bar avec un petit plateau dans lequel il avait placé du pain, des légumes et de la charcuterie, ainsi que quelques fruits, il le déposa devant moi et s’accouda au comptoir en face de moi.

« Bon app’ mon pote. » fit-il en m’observant fixement.

« Hm, merci. Mais, pourquoi tu me regardes comme ça ? » demandais-je entre deux bouchées, gêné par son regard intense qui ne me lâchait pas.

« J’ai entendus dire que t’avais mangé un de ces fameux fruits du démon. Tout l’équipage a prit des paris sur le pouvoir que t’as obtenus. » déclara-t-il tout excité en m’observant sous toutes les coutures. « Alors, alors, c’est quoi ? »

Surpris, j’observais par-dessus mon épaule les autres types dans la salle, ainsi que les tontattas, qui me lançaient des regards par moments en discutant entre eux.

« Je vois...ben à vrai dire, j’en sais rien. J’viens de me réveiller, j’ai mal partout et j’ai pas vraiment sentis de changements particuliers. » dis-je alors pensif, en regardant mes mains, m’attendant à au moins un indice sur ces capacités surnaturelles. « J’sais pas comment ça marche. C’était peut-être un faux fruit, genre une arnaque pour se faire du blé, au prix que ça peut coûter ces merdes. »

J’espérais avoir tort, mais il était vrai que je ne ressentais aucun changement dans mon corps. Ou bien était-ce couvert par la douleur et les courbatures. Je fis quelques essais discrets, mimant un pistolet avec les doigts, essayant de déplacer un verre posé sur le bar à distance à la seule force de mon esprit, claquant des doigts devant une cigarette que j’avais mis à ma bouche. Ce fut finalement Jack qui s’approcha avec un briquet pour l’allumer. Il rit légèrement en voyant ma mine circonspecte.

« Haha ça m’étonnerait que ce soit un faux, vu le pognon que transportaient les types qui voulaient l’acheter. T’en fais pas va, ça viendra naturellement à un moment. »

« Et t’avais parié sur quel pouvoir toi ? »

« Le Zoan du Cochon, et je suis pas le seul à avoir parié sur celui-là, faut dire que t’irais de paire avec Borat, ce serait classe. » ricana-t-il en me servant une bière dans une pinte.

« Ah les bâtaaaards. »





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Flashback
✘ Solo




J’avais passé toute la mâtinée à faire des tests dans ma chambre, tentant de me concentrer malgré mes maux de tête. Le corps toujours endolorit, je m’étais allongé dans mon lit en observant le plafond, lançant une petite balle au-dessus de moi. Est-ce que j’avais vraiment ingéré un fruit du démon ou une contrefaçon ? Le doute était grandissant, me posant milles et unes questions. Est-ce qu’on avait affronté Sal et ses hommes pour rien ? Enfin, après tout j’avais eus ma vengeance, et on avait put récupérer une coquette somme destinée à acheter ledit fruit. Mais, j’étais tout de même déçu de ne pas avoir de super-pouvoir. Mis à part ma force et mes acrobaties, je n’avais rien de particulièrement original pour me démarquer dans l’équipage des Sandstorm. Le capitaine, lui, pouvait manipuler et créer du sable à volonté, même son corps en était composé, ça avait quand même beaucoup plus de panache que des patates de forain.

« Quelle poisse. » murmurais-je à moi-même en lançant la balle. « J’ai l’impression d’avoir été arnaqué, un dernier coup de pute de la part de ce bon vieux Sal...cette sale vérole putain, il aura bien mérité son sort celui-là. » dis-je en serrant les dents, bouillonnant intérieurement.

Morpheo vint me rejoindre en grimpant sur le lit, intéressé par la petite balle en mousse qu’il observait monter et redescendre à un rythme régulier. S’approchant tel un chasseur, se tapissant dans les replis des draps, prêt à bondir en agitant son arrière train, ses pupilles dilatées. Il bondit toutes griffes dehors, passant au-dessus de moi pour tenter de l’attraper alors que je la récupérais dans ma main. L’animal, sur ses gardes, atterri de l’autre côté dans un dérapage pour se retourner directement vers moi, observant ma main attentivement. Je m’en étais déjà rendus compte par le passé, mais ce chat était particulièrement observateur et intelligent. Nous arrivions même à communiquer de manière un peu grossière à l’aide d’un code.

La jetant de nouveau au-dessus de moi, le chat attendit qu’elle retombe en la suivant attentivement du regard. Précédé d’un petit remuage des fesses, il s’élança en calculant le moment parfait où attaquer. Momo fondit sur la balle tandis que je tendais la main pour la récupérer le premier. Trop lent néanmoins, le félin refermait ses pattes autour de la balle, toujours dans les airs. Ce fut à ce moment-là que quelque chose d’étrange se passa. La balle, plutôt que d’être emportée par le chat qui l’agrippait à présent, se mit à remonter dans les airs avec l’animal, décrivant une drôle de courbe en direction du plafond, portée par l’élan du chat vers le côté. L’espace d’un instant, j’avais crus voir comme une lueur émise de ma main et un cercle se former dans les airs sous la balle et le chat. Sous la surprise, l’effet s’estompa et Morpheo retomba au sol avec sa proie entre les crocs.

~ Meooooow kfff kfff!~ feula-t-il dans ma direction avant de disparaître dans l’escalier menant au second étage.  

« C’était quoi ce bordel ? » soufflais-je en regardant mes mains sous tous les angles.

Je n’avais pas rêvé et le sens qu’avait prit la balle était bien trop étrange pour n’être qu’une coïncidence ou dû à l’action du chat. Ouvrant et refermant ma main devant moi, je me relevais du lit avec un sourire aux lèvres. J’en étais persuadé à présent, j’avais bel et bien acquis des pouvoirs surnaturels. La question qui subsistait à présent était : quels étaient exactement ces pouvoirs et comment les contrôler ?

Debout au milieu de la pièce, je tentais de réitérer l’expérience, faisant des gestes des mains qui, de loin, aura pu passer pour la danse maladroite d’un type complètement saoul. Je plaçais plusieurs objets de taille et poids différents au sol, me concentrant en plissant les yeux et en tendant les bras dans leur direction. Toutefois, ce fut un échec cuisant, aucun d’entre eux ne bougeant d’un pouce, ni  dans un sens, ni dans l’autre, rien. Après plusieurs minutes, je finis par craquer, cédant à l’impatience et à la colère de ma propre incapacité à faire fonctionner ce pouvoir. D’un coup de pied rageur, je frappais le plancher.

« Putain ! Comment ça fonctionne cette merde ?! »

Soudainement, l’atmosphère autour de moi changea. Sous mes pieds, un cercle transparent apparut, s’étendant sur plusieurs mètres. Le plancher se mit à grincer, les objets posés au sol s’y plaquèrent violemment comme s’ils étaient poussés par une force invisible. Dans toute la pièce, les objets se mirent à tomber les uns après les autres, un porte-manteau qui s’écrase, des vêtements accrochés à une poutre se déchirèrent sur leurs cintres pour rejoindre le plancher. Paniqué, je tentais d’arrêter le phénomène en claquant des doigts, en tapant du pied, mais rien n’y faisait. Finalement je me mis à fermer les yeux, imaginant dans ma tête que tout ceci s’arrêtait, lançant directement à mon cerveau l’ordre « stop ! » alors que je rouvrais les yeux. Puis, ça se calma, les objets roulèrent sur le sol et l’air sembla s’alléger. Une nouvelle fois, je fixais mes mains en arquant un sourcil curieux.

« Intéressant...très intéressant... » soufflais-je, admiratif.




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Flashback
✘ Solo




Je déboulais dans la salle de la taverne, au rez-de-chaussée de la maison, un grand sourire aux lèvres et un air de fierté. Si fier et excité que j’en avais oublié mes blessures, ayant laissé la béquille dans ma chambre j’avais dévalé les marches sans me soucier de la douleur. Sous mon martèlement précipité des pieds dans l’escalier, les quelques personnes présentes se tournèrent toutes d’un même mouvement dans ma direction.

« Vous allez jamais croire ce que j’ai réussis à faire ! » m’exclamais-je, transpirant de partout et haletant.

« T’as réussis à te transformer en cochon-hybride ?! J’ai gagné ? » s’exclama un des membres d’équipage dont j’avais oublié le nom, un petit gars grassouillet qui aimait bien déconner.

L’assemblée se mit à rire à l’unisson tandis que je lui répondis d’un doigt d’honneur en lui tirant la langue. Je leur fis signe de se taire et m’emparais d’une choppe des mains d’un pirate qui commença à protester.

« Vos gueules bande de bâtards, regardez plutôt ça. » dis-je pour les faire taire en posant la choppe au milieu d’une table à l’écart. « Vous ferez moins les malins quand vous aurez vus ça. »

Je me plaçais à côté de la table, la main tendue en direction de la choppe, la paume vers le haut. J’étendis mon index, pointant droit sur l’objet au centre de la table. Je pris une grande inspiration, plissant les yeux en concentrant toute mon attention sur ma cible, ma vision se faisant plus floue dans sa périphérie. Toutefois, rien ne se passait, contrairement aux tests que j’avais effectué pendant plusieurs heures dans ma chambre, qui ressemblait à un champ de bataille actuellement.

« Ben alors ? On attend, Ren ! » ricana le petit gros, quelques rires y répondant dans la salle.

« Tais-toi Gordito, laisses-le se concentrer sinon j’te sors d’ici par la peau du cul et j’te donne à bouffer à Borat, c’est clair ? » intima Jack qui faisait aller et venir une bouteille vide contre sa paume ouverte d’un air menaçant.

L’homme surnommé ‘Liquor’ Jack n’était pas un combattant, mais c’était toujours bon de l’avoir dans le coin pour remettre les gens à leur place. Particulièrement lorsque cela se passait dans la taverne qui était son domaine depuis que je l’avais nommé ‘gardien des lieux’. Et il gérait son rôle à la perfection, capable de calmer les clients les plus téméraires.

Je tentais de faire abstraction de tout ça, non sans quelques difficultés mais, finalement, je parvins à concentrer toute mon attention sur la choppe et la zone qui l’entourait. J’imaginais ce que je voulais faire dans mon esprit avant de le projeter dans la réalité. Créer une zone délimitée tout autour de l’objet, représenter le sens de direction et la force employée, chaque facteur incluant un coût sur mon énergie et me fatiguait à mesure que je maintenais ladite zone active. En l’espace de quelques heures d’entraînement, c’étaient les principes du pouvoir que j’avais compris. Toutefois, il restait encore de nombreuses zones d’ombre.  


Rise !!



Soudain, une lumière apparut au bout de mon index, comme une étoile dorée, une comète disparaissant aussi vite qu’elle était apparue dans le ciel. Un cercle transparent aux mêmes teintes apparut très discrètement, superposé aux contours de la table. En même temps, j’avais remonté mon index vers le haut, en pointant le plafond. La table se mit soudainement à trembler, le bois à grincer et la tasse commença à rouler sur la tranche, comme aspirée vers le haut. Poussés alors vers le plafond, la tasse commença à flotter, accélérant au fur et à mesure de la force employée. La table fit de même, ses pieds se décollant du plancher et se soulevant dans les airs à la suite de la tasse sous le regard médusé de tous ceux qui m’entouraient.

« Ouah putain...c’est quoi ce délire... » souffla un Gordito admiratif.

« C’est quoi ça, de la télékinésie ? » s’exclama Jack surexcité, qui s’était à moitié penché sur son bar, presque allongé dessus.

« De ce que j’en ai vu, ça a un rapport à la gravité... » commençais-je pensif, partageant les informations que j’avais pus découvrir jusque là. « Je peux l’orienter, l’inverser, l’augmenter et la manipuler dans une zone prédéterminée, à distance comme au corps à corps, d’ailleurs mon corps semble être insensible aux changements gravitationnels. »

J’avais déclaré mes explications machinalement, le regard rivé sur la table collée au plafond qui avait écrasé la tasse. Je sentais la fatigue me gagner peu à peu, mais rien d’insurmontable jusque là. Il faut dire que je m’étais entraîné une bonne partie de la journée, et l’utilisation répétée du pouvoir, aussi infime en fut l’utilisation, semblait me drainer. Je n’arriverais pas à contrôler cette capacité en un jour, ça c’était sûr.

« Attends, si les objets dans la zone sont influencés par la gravité, pourquoi pas toi ? » demanda Jack, vif d’esprit, qui posait souvent les bonnes questions.

« Regardes par toi-même, t’as une pomme ? »

Le barman m’envoya le fruit demandé, bien rouge et mure, prêt à être croqué. D’un lancé approximatif, je le lançais en plein dans la zone du pouvoir, le fruit commençant son voyage à l’horizontal avant de décrire une courbe et de monter droit à la verticale. Tournant mon regard vers Jack, je m’avançais à mon tour dans la zone, pile à l’endroit où la pomme s’était mise à grimper. Je me mis à sautiller sur place, levant mes bras et les descendant avant de hausser les épaules.

« Tu vois ? Moi-même j’y comprends rien, pourtant je suis toujours soumis à l’attraction terrestre, il doit y avoir des règles précises régissant son utilisation. » réfléchissais-je à voix haute.

Je m’écartais finalement de la zone, sentant la fatigue me gagner et mes doigts s’engourdir. Pointant mon index vers la zone, je joignis mon pouce et mon majeur pour claquer des doigts. Soudain, la délimitation disparut, les lois de la nature reprenant leur cours. La table tomba depuis le plafond et vint se briser au sol, suivie par les éclats de la choppe. Les regards étaient tous braqués sur les débris au sol et la table fendue en grande partie avec plusieurs bouts manquants.

« C’est fascinant... » souffla Jack en brisant le silence.

« Tu l’as dis...c’est tout à fait fascinant... »

« Et t’as essayé avec des objets plus lourds ? »




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Flashback
✘ Solo




À l’extérieur de la taverne, sur le dos verdoyant de Borat ainsi que sur les ponts des navires environnants, les hommes et femmes de l’équipage se pressaient, se penchant sur les bastingages pour observer le spectacle. Il avait fallut que Gordito aille faire le tour des navires en criant haut et fort que j’avais découvert les capacités de mon fruit du démon et que j’allais faire une présentation publique. Quel enfoiré celui-là j’vous jure.

Ainsi, tous les matelots s’étaient détachés de leurs tâches l’espace de quelques minutes pour assister à ma soi-disant démonstration. Tous leurs regards braqués sur moi, je descendais les marches du perron pour fouler du pied le dos de mon ami le cochon géant. C’était gênant, surtout pour un pouvoir sur lequel je n’avais aucun contrôle précis. Cette blague puérile du petit gros, rembarré plus tôt par Jack, les mettait plus en danger qu’autre chose. Car, si j’avais bien compris les tenants et  aboutissants de cette capacité, cela consistait à une manipulation de la gravité dans une zone précise. Et, en pleine mer et en mouvement, un accident était vite arrivé.

Les matelots m’amenaient pleins d’objets en tous genres, du plus petit au plus gros, du plus léger au plus lourd. Les voyant évoluer ainsi en portant des caisses, des meubles et même un hamac dans lequel dormait toujours un de leurs collègue, cela me fit penser que je n’avais pas encore testé cette aptitude sur un autre être humain. Lors de la découverte avec Momo et la balle en mousse dans ma chambre, le chat semblait avoir été légèrement poussé vers le haut, donc cela devait bien fonctionner sur les êtres vivants. Toutefois, j’y étais insensible, alors les humains étaient peut-être une exception, à moins que ça ne soit seulement l’utilisateur du fruit du démon qui le soit.

« T’es sûr que je peux soulever tous ces trucs ? Ça semble super lourd, ça va me crever. » demandais-je à Jack à mes côtés qui arborait un air confiant.

« Je pense pas que ça dépende du poids. » commença-t-il en se grattant le menton. « Si c’est bien la gravité, c’est comme retourner un sablier, quelle que soit la quantité de sable que tu retournes il s’écoulera toujours vers le bas. »

La métaphore était plutôt bien choisie, suffisante pour que j’y vois plus clair. La gravité était une force inhérente du monde, présente partout et qui nous influençait dans chaque pas que nous faisions. L’inverser revenait à ignorer les lois fondamentales de la nature, retourner le monde comme un sablier. Observant le petit groupe de trois matelots qui portaient leur pote en hamac jusqu’au tas d’objets en tous genres, j’eus un petit sourire narquois en tendant ma main dans leur direction. Il fallait bien tester ces capacités sur des cibles en mouvement, je ne pouvais pas me contenter des objets inanimés. Me concentrant en visualisant la zone que je voulais créer dans mon esprit, je fis appel aux mêmes sensations ressenties lors des utilisations précédentes. Ma main se mit à briller d’une faible lueur dorée tandis que je la levais vers le haut.

« Woh qu’est-ce qui se passe ? » s’exclama l’un des types qui portait le hamac.

Leurs pieds se décollèrent doucement du sol, commençant à flotter en agitant leurs jambes sous eux sans que cela ne change rien. Sous la surprise, ils lâchèrent les bords du hamac qui flottait également, montant peu à peu jusqu’à quelques mètres au-dessus du dos de Borat. Tout autour, les spectateurs étaient effarés, lâchant un « ooooooooooh » collectif de surprise. Le matelot qui dormait dans son hamac se réveilla, se frottant les yeux avant de se rendre compte de sa situation.

« Aaaaaaaaah c’est quoi ça, j’suis où, pourquoi je flotte bordel ?! » se mit-il à paniquer en battant des bras dans les airs.

Sa brasse approximative lui permit de ‘nager’ dans l’air sous la faible densité de gravité dans cette zone précise. Les quatre hommes flottant appelaient à l’aide sous les rires de l’équipage, il faut dire que la situation était comique. De mon point de vue, j’avais l’impression de jongler avec quatre matelots et un hamac, une drôle de sensation. Je fis redescendre ma main devant moi, faisant revenir l’attraction gravitationnelle à la normale. Ils retombèrent maladroitement les uns sur les autres en poussant de petits cris de surprise dans leur chute, le hamac leur tombant sur la tête. Ils se débattaient pour en sortir, rajoutant aux rires de l’équipage.

« Hm, y a encore quelques réglages à faire. » murmurais-je pensif, pour moi-même.

« Et tu peux la manipuler autrement que verticalement ? »

Pour seule réponse, je tendis la main en direction d’une bouteille de rhum posée sur les caisses entreposées pour la démonstration. Je me concentra, plissant légèrement les yeux en essayant d’imaginer une zone de la même taille que la bouteille, aussi haute, formant une zone circulaire avec le milieu comme épicentre. Le sens de direction partait de derrière la bouteille pour venir dans ma direction. J’aperçus du coin de l’œil Jack qui se tenait derrière moi être légèrement repoussé en arrière, devant faire quelques pas pour lutter comme face à une tempête. La force d’attraction fut suffisante pour soulever la bouteille et la faire voler jusqu’à moi, l’attrapant entre mes doigts.

« Pratique ! » m’exclamais-je content de ma performance et entrevoyant des possibilités de picoler sans avoir à lever mon cul de ma chaise.

« Tu vas devenir flemmard, j’le sens. » railla Jack qui n’avait pas tort. « Tu pourrais même te déplacer en soulevant un truc sous tes pieds, tu vas prendre du poids mon vieux. » expliqua-t-il en ricanant.

Assis sur les marches du perron, je passais les heures suivantes à tester les capacités de mon fruit du démon. Je soulevais des objets, orientant la direction de l’attraction pour faire voler des objets au-dessus du dos de Borat. J’en profitais même pour lui envoyer quelques pommes dans le processus grâce à mon pouvoir. J’en attrapais une au passage, la soulevant de la caisse assez haut dans les airs, annulant le pouvoir pour le réactiver juste derrière en donnant une autre direction. C’était encore un peu maladroit mais, après avoir balancé la moitié de la cagette de pommes à la flotte, je parvins enfin à envoyer une belle pomme rouge droit vers ma tête, l’attrapant juste avant de me faire percuter.

« Y a encore de la place pour l’amélioration. » dis-je, content du pouvoir que j’avais obtenus en croquant dans la pomme.




« Avec ce pouvoir, les possibilités sont infinies. » rêvais-je en continuant mes expérimentations.

Les matelots s’étant réunis pour assister au spectacle s’étaient barrés depuis longtemps, rappelés à l’ordre par les contremaîtres. Quelques curieux continuaient de regarder par-dessus le bastingage en nettoyant le pont machinalement, témoins de mes essais souvent infructueux. Mais, tout était dans l’expérimentation, essayer encore et encore jusqu’au succès. Plus je me servais du pouvoir, mieux je le comprenais, mais plus il me drainait de toute force. Finalement éreinté par l’effort, je regagnais ma chambre et mon lit en traînant des pieds, retrouvant un Morpheo enroulé dans les draps, tranquillement endormit. Je m’allongeais alors à ses côtés, fermant les yeux pour recharger les batteries et me remettre des blessures que j’avais presque oublié sous la découverte de mon fruit du démon. Si je continuais de m’entraîner ainsi, je maîtriserais rapidement ce pouvoir et pourrais le mettre au service de l’équipage. Nos prochaines aventures seront gravitationnelles.  




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