Sédition nocturne


Sédition nocturne

Les clans Wave et Suisou venaient d'arriver à un terrain d'entente, après des négociations tumultueuses. Johnny Blue leur avait offert le gîte et le couvert, en guise de bonne foi. Néanmoins, Lamia, Hayato et sa famille restaient sur leurs gardes. Après tout, ils ne traitaient pas avec des enfants de chœur, mais avec des criminels des bas fonds de North Blue ! Aussi, le petit clan avait-il instauré des tours de gardes, afin qu'au moins l'un d'entre eux soit toujours discrètement à l’affût du moindre bruit suspect. Alors que la caverne où s'étendait Carcinomia était plongée dans une quasi totale obscurité, Hayato se reposait dans sa propre chambre.

La belle pièce, d'une quinzaine de mètres carrés, se situait au premier étage du quartier général du clan Wave. Le riche lit à baldaquins n'était pas au goût de l'ex vagabond. Le matelas était bien trop mou et les draps en satin bien trop glissants. Comme à son habitude, entretenue neuf années durant lors de ses périples, il somnolait assis contre un mur. Son sabre reposait sur son épaule gauche, ses deux mains posées non loin. D'un sommeil léger, le chef du clan Suisou se ressourçait après une journée riche en émotions. Pour autant, il était prêt à parier que les semaines suivantes le seraient bien plus encore !

Il n'en était qu'aux balbutiements de ce qu'il souhaitait accomplir, sur Carcinomia. Et c'était sans compter ses projets pour tout North Blue... avant d'étendre sa sphère d'influence sur les autres mers du globes ! La route vers le sommet, vers le trône d'empereur de la pègre, était semée d’embûches. Mais celle pour devenir un homme digne de rendre fier feu son père adoptif, était bien plus longue et sinueuse encore. Loin de le décourager, l'adversité renforçait sa conviction, aussi sûrement qu'une pierre à aiguiser affûtait un sabre.

Soudain, un bruit fit dresser l'oreille à l'épéiste. Il ne bougea pas d'un iota, sa respiration ne changea pas, mais son esprit se recentra immédiatement. Quelque chose, ou quelqu'un, n'était pas à sa place. Ses sens aux aguets, l'ex vagabond attendit. La seule porte d'entrée se situait à sa gauche. Le lit reposait en face avec, de part et d'autre, deux fenêtres. Il finit par comprendre ce qui l'avait tiré de son sommeil sans rêve : la brise nocturne. Comment expliquer pareil phénomène, alors qu'il avait fermé les fenêtres avant de s'endormir ? Le bruit qu'il avait perçu était donc un loquet qu'on forçait, le plus silencieusement possible. Quelqu'un tentait de rentrer par l'extérieur.

Il entrouvrit lentement les yeux. Les décombres bloquant la voûte céleste, loin au dessus de leurs têtes, avaient forcé les locaux à trouver une autre source de lumière que celle de la lune. Ainsi, de rares rais de lumière lui parvenaient depuis l'extérieur, grâce à un système d'éclairage artisanal sur l'île. Ce fut néanmoins suffisant pour repérer une silhouette gracieuse et élancée. Cette dernière enjambait silencieusement la fenêtre entrouverte, afin de poser le pied sur le plancher. Il aurait été sot de lui prêter des intentions louables, vu la façon dont elle prenait contact avec lui. Ainsi, Hayato lui laissa le temps de faire quelques pas, afin de la laisser pénétrer dans son maai. Une fois que l'épéiste fut certain que l'intrus était à sa portée, il prit la parole d'une voix calme :


- Encore un pas, et vous devenez manchot.


Hayato avait beau dégager en permanence une aura de quiétude, la menace n'était clairement pas à prendre à la légère. Sans un bruit, ses mains s'était déjà rapprochées de la garde de son sabre, de sorte que dégainer et trancher ne serait qu'une formalité, à présent. Il ouvrit totalement les yeux pour dévisager l'importun. Son regard d'airain ne traduisait aucune animosité, mais plutôt une détermination sans faille. Une fois certain d'avoir capté l'attention de son invité, il lança :


- Je vous laisse une seule chance de m'expliquer ce que vous faites ici, en pleine nuit.


Encore une fois, sa voix ne trahissait aucune intention belliqueuse. Il s'agissait en apparence d'une demande simple, formulée de manière posée. Pour autant, la posture de son corps ne laissait aucun doute quant aux conséquences d'ignorer sa requête. La balle était dans le camp adverse, à présent.


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Alliances et Manigances.
Le somptueux salon familial des Valthane est un chef-d'œuvre d'architecture et de design, un lieu où l’apparat et le raffinement se marient harmonieusement pour créer une atmosphère d'opulence et de pouvoir. Lorsque l'on pénètre dans ce salon, on est immédiatement frappé par l'élégance intemporelle qui imprègne chaque détail, des meubles majestueux aux riches tapisseries qui ornent les murs. Le salon est vaste et spacieux, avec de hauts plafonds ornés de magnifiques fresques représentant des scènes mythologiques et historiques. Les murs sont revêtus de bois sombres et de panneaux de marbre finement sculptés, créant une ambiance de splendeur et de sophistication. Au centre de la pièce, trône un imposant lustre en cristal étincelant, dont les multiples branches ornées de bougies illuminent la pièce de leur lueur chaleureuse. Les rayons de lumière se reflètent sur les surfaces polies des meubles en bois massif et des tables basses richement décorées, créant un jeu de reflets et d'ombres qui ajoute à l'atmosphère mystérieuse du salon. Les sièges sont recouverts de somptueux tissus aux couleurs riches et profondes, rehaussant l'élégance de la pièce. Des canapés moelleux et des fauteuils capitonnés invitent à la détente et au confort, tandis que des coussins brodés et des couvertures en soie ajoutent une touche de luxe supplémentaire.

Des étagères en bois ouvragé sont remplies de livres anciens, de reliures en cuir et d'objets d'art précieux, témoignant du savoir et du goût raffiné de la famille Valthane. Des vases en porcelaine, des sculptures en marbre et des tapis orientaux complètent la décoration, ajoutant des touches de beauté et d'exotisme à l'ensemble. Le sol est recouvert d'un tapis épais et moelleux, orné de motifs complexes et de broderies élaborées, qui amortissent le bruit des pas et confèrent une sensation de luxe sous les pieds. Au fond du salon, une grande cheminée en marbre sculpté diffuse une chaleur réconfortante, créant un point focal autour duquel la famille Valthane peut se réunir pour discuter et délibérer en toute intimité.

‘’Davinia, ma chère, nous avons besoin de tes talents pour entrer en contact avec Suisou. Tu sais comment manipuler les situations et les gens à notre avantage. Nous devons explorer toutes les possibilités de créer une union avec lui pour préserver notre statut et nos affaires.’’ S’exprime Vassia d'un ton calme mais déterminé.

Effectivement, même si Madame Valthane excelle dans la manipulation des situations et des gens, elle reconnaît que certaines circonstances exigent une approche différente. Dans ce cas précis, le mafieux contrôlant maintenant le clan Waves, représente à la fois une opportunité et un risque pour les intérêts de la famille Valthane, mais surtout ce trouvait dans un endroit non facilement approchable. Une alliance ouverte avec un individu aussi controversé et potentiellement dangereux pourrait également attirer l'attention non désirée, surtout de la part du clan Darkness, avec lequel les Valthane entretiennent déjà une relation. Cependant, le nouveau chef de la famille n’était en rien une perle et ceci se reflétait sur le clan. C'est pourquoi Madame Valthane a choisi de procéder avec prudence et discrétion dans ses tentatives pour entrer en contact avec Suisou. En dépit de son talent pour la manipulation, elle comprend les limites de son influence et reconnaît qu'il est parfois nécessaire de recourir à des moyens plus subtils et silencieux pour atteindre ses objectifs, surtout lorsque la sécurité et la stabilité de sa famille sont en jeu. Ainsi, même si Vassia pourrait théoriquement se mettre en danger en se lançant dans une confrontation directe avec Suisou, elle préfère adopter une approche plus prudente et stratégique, cherchant à négocier avec lui dans le plus grand des silences afin de préserver les intérêts des Valthane tout en évitant les conflits inutiles.

‘’Bien sûr, Mère. Je comprends l'importance de cette situation. Mais Suisou est loin d'être un allié facile à approcher. Ses intérêts sont stricts et il ne semble pas faire de compromis facilement. Je vais devoir user de ruse, mais aussi d’un poids dans la balance.’’ Répond Davinia à sa mère d'un air réfléchi. ‘’Quel son les limites, les offres ? Qu’elle est la chose que vous voulez offrir en échange de cette alliance ?’’

‘’Tu sais ce qui est en jeu ici, Davinia. Le blocus sur la grotte met en péril nos opérations et notre influence avec l’extérieur. Nous ne pouvons pas nous permettre de rester passifs face à cette menace. Si besoin est, tu devras utiliser tous les moyens nécessaires pour garantir notre sécurité.’’ Terith intervenant avec une expression sévère.

‘’Mon chéri, calme-toi, nous sommes là pour avoir une alliance avec cet homme, pas l’éliminer.’’ Souffle moelleusement Vassia à son mari. ‘’Protection, sécurité, un accès aux ressources d’armement… Puis plus tard quand tout ceci sera passer et nous pourront penser à combiner nos forces.’'

‘’Nous sommes confrontés à une situation délicate, mais nous devons agir avec prudence et intelligence. Davinia, je compte sur toi pour gérer cette affaire avec la même finesse et le même sang-froid que tu as toujours démontrés.’’ Lui déclare Talkan qui observant la discussion avec un regard pénétrant.

‘’Je comprends, Grand-père. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour régler cette affaire de manière favorable à notre famille. Je vais entrer en contact avec Suisou dès que possible et utiliser toutes les ressources à ma disposition pour trouver un terrain d'entente.’’ Réplique Davinia qui acquiesçait avec détermination.

☽ ☉ ☾

La nuit enveloppait le domaine du clan Waves d'un voile sombre et mystérieux, tandis que l’Énigmatique s'avançait furtivement à travers les ombres, son cœur battant dans sa poitrine alors qu'elle se préparait à infiltrer la demeure ou Suisou se reposait. Vêtue de vêtements sombres qui se fondaient avec l'obscurité de la nuit, elle se déplaçait avec une agilité féline, ses pas légers et silencieux lui permettant de se fondre dans l'ombre des murs et des arbres qui entouraient la propriété. Son regard était vif et alerte, scrutant chaque recoin à la recherche de tout signe de danger ou de surveillance. Les bruits nocturnes étaient ses alliés, masquant ses propres mouvements alors qu'elle se glissait à travers les jardins du domaine, évitant habilement les patrouilles de gardes qui veillaient sur la propriété. Ses sens étaient en alerte, captant le moindre bruissement de feuillage ou le craquement d'une branche sous ses pieds, lui permettant d'ajuster sa trajectoire avec une précision chirurgicale.

Lorsqu'elle atteignit enfin le bâtiment principal, Davinia se faufila avec habileté à travers le jardin évitant les dispositifs de sécurité qui protégeaient la chambre de Suisou. Son cœur battait de plus en plus fort à mesure qu'elle se rapprochait de son objectif, la tension montant à chaque pas qu'elle faisait dans l'obscurité oppressante. Enfin, elle atteignit la fenêtre de la chambre de Suisou, où elle se tint immobile pendant un moment, écoutant attentivement pour s'assurer qu'elle n'avait pas été repérée. Assurée que la voie était libre, elle se glissa silencieusement à l'intérieur, se déplaçant avec une grâce fluide comme lui avait imposer les Énigmatiques. Une fois à l'intérieur, Davinia se dirigea vers le lit où Suisou devait reposer paisiblement, son visage éclairé par la faible lueur de la lune filtrant à travers les rideaux. Avec un mélange de nervosité et de hardiesse, elle s'approcha lentement, sa main glissant sur la poignée d'un couteau dissimulé dans sa ceinture, prête à agir si la situation tournait au vinaigre.

Mais alors qu'elle se tenait là, à quelques pas de sa cible, Davinia se figea soudain, ses pensées tourbillonnant dans sa tête alors qu'elle entendait une voix masculine s’élever dans les air. Elle en retient presque sa respiration, avant de lentement se tourner en direction d’où la voix s’était élevée. Là, dans l’obscurité de la chambre, se dessinait faiblement une silhouette dans les ténèbres. Elle pinça les lèvres, avant de lever lentement les mains dans les airs, dévoilant ses paumes en signe de paix.

‘’Désolé de mon intrusion nocturne et de mes manières cachotières, mais en vu de la situation, un tierce parti à préférer que j’agisse avec la plus grande discrétion. Je suis une envoyé de la famille Valthane qui se trouve dans le clan Darkness. Nous ne sommes pas satisfaits avec le dirigeant actuel et nous aimerions créer une alliance avec vous. Les Valthane sont des grosses têtes dans l’industriel armement de Carcinomia, ainsi quand le moment serait venu pour vous de vous en prendre à Bronze, vous pourriez vous retrouver avec plusieurs avantages…’’ Explique calmement Davinia avant de tirer de sa poche intérieur avec une tentacule capillaire une lettre finement écrite pour la tendre vers lui.

Les mains toujours en l’air, la tentacule de cheveux sombre s’approche lentement, donnant une enveloppe sceller donc les mots suivant noircissait le parchemin.

‘’Une fois cette lettre prise en compte, j’aurais également discuté avec vous de quelque chose de plus personnel.’’ Annonce Davinia d’une voix plus poser.

*Cher Suisou Hayato,

Je vous adresse cette lettre au nom de la famille Valthane afin de vous proposer une alliance stratégique qui pourrait bénéficier à nos deux clans et renforcer notre position dans le paysage politique et économique de Carcinomia. Nous sommes conscients de votre influence et de votre pouvoir dans la région, et nous pensons qu'une collaboration entre nos deux familles pourrait être mutuellement avantageuse. Voici ce que nous proposons dans le cadre de cette alliance ;

Les Valthane s'engageraient à fournir à votre clan une protection et une sécurité accrues dans nos domaines d'influence. Nous utiliserons nos ressources et notre réseau pour contrer les menaces extérieures et les rivalités avec d'autres clans ou factions, assurant ainsi la sécurité de vos biens et de vos intérêts.

En échange de cette protection, nous demandons à bénéficier d'un accès privilégié à certaines ressources ou opportunités commerciales contrôlées par vous. Ceci renforcerait notre position économique et notre influence dans la région, nous permettant de prospérer ensemble.

Ensemble, les Valthane et Suisou Hayato pourraient former une force redoutable, combinant nos ressources, nos compétences et nos influences pour consolider notre pouvoir et étendre notre contrôle sur Carcinomia. En unissant nos forces, nous pourrions faire face à toutes les menaces et défis qui se dressent devant nous, et assurer notre succès commun dans cette société impitoyable.

Nous espérons que vous considérerez cette proposition avec sérieux et que vous verrez les avantages mutuels qu'une telle alliance pourrait apporter à nos deux familles. Nous sommes ouverts à la discussion et à la négociation de tous les détails pour parvenir à un accord qui soit satisfaisant pour toutes les parties concernées. Dans l'attente de votre réponse favorable, veuillez agréer, cher Suisou, l'expression de nos salutations distinguées.

Cordialement,
Talkan Valthane
Patriarche de la famille Valthane*

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Sédition nocturne

Après son entrée silencieuse dans sa chambre, la jeune femme leva les mains, dès qu'elle entendit la voix d'Hayato, en signe de paix ou de reddition. Des rayons de lumières joueurs permirent à l'épéiste de détailler son interlocutrice. Une jeune femme de corpulence fine, élégante, drapée dans des vêtements discrets et pratiques. Il put apprécier, d'un bref coup d’œil, ses traits fins et délicats, presque émaciés, ainsi que sa peau d’albâtre. Ses yeux renvoyaient une expression déterminée, dure, alors qu'elle semblait aussi fatiguée que surprise. S'était-elle attendue à le trouver dans son lit ? Elle avait certainement déchanté. Pourtant, l'intruse rebondit bien vite et lui expliqua d'une voix posée la raison de sa présence. Ses propos trouvèrent un écho bienheureux, dans une discussion que le chef de clan avait eue avec Matsuri. Effectivement, X-Bronze ne faisait pas l'unanimité. Il était même source de plusieurs inimitiés et, si on en croyait les rumeurs, de tentatives de putschs !

Voilà donc où allait les mener cette discussion ?

Lorsqu'un tentacule de cheveux se faufila dans une poche de la jeune femme, le bretteur faillit avoir un réflexe malheureux. Il se retint au dernier moment de la trancher de part en part, lorsqu'il comprit qu'elle ne faisait preuve d'aucune trace d'hostilité. Il la laissa s'approcher, sans relâcher sa vigilance un seul instant. Sa main gauche sur le fourreau de son sabre, il tendit la droite pour récupérer la note qu'elle lui tendit. Le guerrier nota dans un coin de son esprit qu'elle cherchait, en plus de sa mission d'intermédiaire, à lui demander une faveur personnelle. Il ouvrit l'enveloppe et parcourut la lettre en la lisant à voix haute. Le fait pourrait paraître étonnant, mais le sabreur avait une idée derrière la tête, en procédant ainsi. La main toujours sur son sabre, il laissa ses yeux suivre les lignes de la missive, tandis que sa vision périphérique surveillait la jeune femme en face de lui.

Dès le premier paragraphe, il comprit qu'on cherchait à le brosser dans le sens du poil, pour mieux en tirer bénéfice par la suite. Sur le principe, écouter les arguments d'une famille dissidente, alors qu'il se lançait dans une conquête ardue, était tout à son avantage. Qu'ils cherchent à renier leur chef de clan actuel ne lui semblait pas saugrenu, au vu de la réputation d'X-Bronze.  De même, permettre à une famille de marchands de continuer à commercer semblait dans l'intérêt de tous, bien entendu. Cependant, la suite lui donna du grain à moudre. Il ne manqua pas de réagir, d'ailleurs, lorsqu'il arriva au passage en question :


- Vous vous proposez pour assurer ma sécurité ? releva-t-il avec un brin d'amusement dans la voix. L'argument me laisse un rien songeur. Mon clan va prendre le contrôle total de l’île d'ici quelques jours. Il n'existera alors plus qu'un seul clan : le notre. Les cinq grandes factions de l’île seront éliminées ou absorbées. Je pourrais donc compter sur ma famille, des centaines d'hommes, ainsi qu'un réseau d'informateurs fidèles pour dormir sur mes deux oreilles. J'ai peine à croire que vous puissiez surpasser une telle garantie.


Il laissa quelques secondes s'écouler, avant de reprendre d'une voix paisible :


- Néanmoins, la proposition n'est pas sans attrait pour autant. Sous certaines conditions, nous pourrions laisser certains électrons libres co-exister avec nous... avec quelques assurances en retour.


Il continua sa lecture, laissant un fin sourire s'étirer sur son visage. Lorsqu'il eut terminé sa lecture à voix haute, il plia respectueusement la lettre, avant de la glisser dans son kimono. Le criminel sembla réfléchir un moment, toujours en position défensive. Matsuri lui avait parlé de la famille Valthane et, en particulier, de l'auteur de cette lettre : Talkan, l'implacable. Un homme aux convictions solides, à l'expérience appréciable et à la stature imposante. Selon la kunoichi, le patriarche de la famille Valthane lui plairait. Ce faisant, son guide sur l'île lui avait également parlé d'une autre partie du clan Darkness qui pourrait leur poser de gros problèmes, s'ils n'étaient pas gérés correctement. Un groupe que la jeune femme devant lui devait côtoyer, si on en croyait les rumeurs de leurs... talents particuliers. Au bout de quelques instants, Hayato reprit la parole calmement :


- Sur le principe, la proposition de votre commanditaire m'intéresse. Cependant, ses conditions sont difficiles à accepter, en l'état. Le gage d'une sécurité, ainsi proposée, semble bien faible en échange des avantages demandés. « Un accès privilégié à certaines ressources et opportunités commerciales contrôlées par vous », me semble à la fois trop flou et trop avantageux. Je ne suis pas adepte des pactes léonins. Mais, j'imagine qu'il s'agit en réalité d'un préambule aux véritables négociations.


Cherchant à dévisager son interlocutrice, l'épéiste reprit sereinement :


- Du fait de son expertise en armement, et ce afin de ne pas déboussoler leur liste de clients, la famille Valthane semble tout à fait éligible au statut « d'électron libre ». Elle pourrait officiellement être laissée en paix, continuer à exister en tant qu'entité propre... mais, dans les faits, elle devrait répondre à certaines de mes demandes. Premièrement, jurer allégeance au clan Suisou.


La demande brutale n'était pas anodine. Cette technique d'ancrage était même délibérée ! Faire volontairement une proposition aux conditions ou à un prix honteusement élevé provoquait, immanquablement, un biais psychologique chez l'adversaire. Son échelle de valeur s'en trouvait fatalement perturbée vers le haut, de sorte que toute contre offre était attirée dans le sens souhaité... jusqu'à parfois excéder ce que l'on visait réellement. C'était une manière simple, rapide et puissante, d'obtenir plus, plus facilement, en laissant l'adversaire se débattre contre lui-même.


- Deuxièmement, je pense que la famille Valthane a autre chose à m'offrir, en échange de ce qu'elle demande. Vous êtes effectivement une petite cachottière... mademoiselle ? Je n'ai pas eu le plaisir d'entendre votre prénom. Or, vous connaissez déjà le mien, de toute évidence.


Il laissa le loisir à la messagère de répondre si elle le souhaitait, avant d'incliner la tête. Avec un sourire, il assènerait :


- Et donc, mademoiselle, votre commanditaire s'attendait-il à ce que je n'ai pas fait de recherche avant de débarquer ? C'eut été fort malavisé de ma part. Vous êtes envoyée par la famille Valthane mais, je pense ne pas me tromper, vous appartenez à un autre groupe du clan Darkness, n'est ce pas ?


L'allusion à peine voilée aux Énigmatiques était, une fois encore, parfaitement calibrée. Le chef du clan Suisou cherchait à apprécier la réaction de la jeune femme, mais également à lui sous-tirer des informations de manière détournée. Il tendit l'oreille, prêt à se battre par les mots... ou le sabre, en cas de nécessité.


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Alliances et Manigances.
Davinia écoutait attentivement les paroles de Hayato, observant ses réactions avec une concentration sans faille. Elle percevait le brin d'amusement dans sa voix lorsqu'il évoquait la proposition de sécurité, comprenant qu'il considérait cette offre avec scepticisme. La jeune femme restait calme, laissant son interlocuteur exprimer ses doutes et ses réserves. Lorsque Hayato mentionna la possibilité de laisser certains "électrons libres" coexister avec son clan, Davinia garda son expression neutre, ne laissant rien transparaître de ses pensées intérieures. Elle savait que ces mots étaient calculés, conçus pour susciter un intérêt chez elle et chez les siens. Même si pour le moment elle était présente comme représentante de sa famille, elle avait également d’autres options. Lorsque la demande d'allégeance au clan Suisou fut émise de manière directe, Davinia laissa un large sourire se dessiner sur ces traits neutres, dévoilant que ceci lui infusait un amusement certain. Elle savait que cette condition sortirait et son grand-père aussi savait très bien que ceci deviendrait une condition inévitable, elle n’était donc pas surprise.

"Je comprends votre perspective, Monsieur Hayato", répondit-elle d'une voix calme et mesurée. "L'allégeance est une chose sérieuse et je suis sûre que notre commanditaire serait disposé à discuter des termes exacts de cette affiliation, mais je crois que c’est quelque chose de possible. Si vous voulez avoir toutes les chances de votre côté, je vous conseil, le moment venu de discuter avec le patriarche de la famille et non Madame Valthane et je sais qu’elle va essayer. Bien sûr, quand il est dit sécurité, il fait référence à l’équipement militaire et aussi à une entraide généreuse. Il ne serait pas assez arrogant pour croire que vous lui confirez votre sécurité personnelle."

Dans ces instants suspendus où Hayato avait sondé le mystère de son prénom, Davinia naviguait entre prudence et calcul. Son esprit s'activait à une vitesse effrénée, pesant chaque mot, chaque geste, cherchant à décrypter les intentions de son interlocuteur tout en préservant les siennes. Au fond d'elle-même, Davinia reconnaissait l'importance de cette question en apparence anodine. Elle comprenait que la révélation de son prénom pouvait ouvrir une fenêtre sur son identité, offrant ainsi à Hayato un accès potentiel à une information personnelle qu'elle préférait garder secrète. Mais en même temps, elle se rendait compte que sa réticence à partager son prénom pouvait susciter la méfiance ou la curiosité chez Hayato. Son silence, bien que bref, lui avait permis de rassembler ses pensées, de peser le pour et le contre de chaque option. Elle avait senti le poids de ses mots, l'importance de chaque décision dans ce jeu complexe de négociations et de stratégie.

"Mon prénom n'est pas important dans le contexte de cette discussion, Monsieur Hayato. Ce qui compte, c'est notre capacité à trouver un terrain d'entente mutuellement bénéfique. Toutefois, si vous tenez à avoir un nom, vous pouvez m’appeler Nameless. Qui sait, peut-être qu’à la fin de cette entrevue, si vous accepté une requête personne de ma part, je vous donnerais mon nom complet."

Dans l'obscurité de la pièce, alors que les paroles de Hayato résonnaient, Davinia ressentait chaque mot comme une lame aiguisée, coupant à travers l'air lourd de tension. Les mots de Hayato concernant ses recherches préalables ne la surprirent pas. Les commentaires de l'homme étaient empreints d'une connaissance approfondie, d'une observation minutieuse, et cela ne faisait que renforcer son impression que cet individu était bien plus qu'il ne laissait paraître. Elle s'attendait à ce niveau de préparation de la part d'un homme aussi prudent et calculateur. Du moins avec ce qu’elle avait déduit avec ce qui avait été trouver. Cependant, la mention implicite des Énigmatiques la fit tiquer légèrement. Davinia garda son visage impassible, ne laissant rien transparaître de son malaise intérieur. Malgré son entraînement, malgré sa capacité à dissimuler ses émotions derrière un masque d'impassibilité, Davinia ressentait une pointe d'appréhension. Elle savait que chaque mot, chaque geste, était scruté de près par cet homme devant elle, qu'il percevait peut-être plus qu'il ne laissait paraître. Pourtant, elle s'efforçait de maintenir son calme, de dissimuler son malaise sous une façade de maîtrise et de contrôle. Dans l'obscurité, ses pensées tournoyaient, cherchant des solutions, des stratégies pour naviguer dans cette situation délicate. Elle savait que chaque décision, chaque action, pourrait avoir des conséquences profondes pour elle-même et pour sa famille. Et tandis qu'elle gardait son visage impassible, son esprit bouillonnait d'activité, tissant des plans, évaluant les risques, cherchant à trouver le chemin le plus sûr à travers ce labyrinthe de dangers et de intrigues.

"Vous semblez bien informé, mais n’oublier pas que les Énigmatique ne se cache pas réellement, ils sont connus depuis bien longtemps pour être dans le clan Darkness… La seule différence est que seul quelque élu on la possibilité de faire appel à eux.", dit-elle finalement, choisissant ses mots avec soin.

Au sein de la guilde des Énigmatiques, chaque murmure résonnait comme un écho dans l'obscurité, porteur de secrets et de serments immuables. Créée dans les profondeurs du clan Darkness, cette association d'assassins avait été forgée dans le feu de la nécessité, dans le but précis de servir les intérêts sombres et souvent dangereux de la famille Valthane. Depuis sa fondation, elle avait été le bras armé de la famille, exécutant ses volontés avec une précision mortelle et un dévouement inébranlable. Pourtant, avec l'arrivée de Bronze à la tête du clan, tout avait changé. Le nouveau chef avait testé les limites de la patience du Directeur en s'attaquant directement à la morale de la guilde. Ses actions remettaient en question les fondements mêmes de l'association, semant le doute et la dissension parmi ses membres. Pourtant, malgré ces provocations, la guilde avait maintenu une certaine retenue, une certaine loyauté envers la famille. La raison en était simple : les bonnes relations entre la guilde et d'autres branches de la famille Darkness, ainsi que l'intervention nocturne du Directeur auprès de Bronze. Lors de cette visite, dans l'obscurité de la nuit, le Directeur avait fait comprendre à Bronze que s'il voulait continuer à diriger le clan, il devait laisser les Énigmatiques en dehors de ses conflits enfantins. C'était une mise en garde claire et sans équivoque, une démonstration de pouvoir et d'autorité qui avait ramené un semblant de stabilité dans les rangs de la guilde. Pourtant, malgré cette apparente résolution, l'atmosphère au sein de la guilde restait tendue, chargée de méfiance et de suspicion. Les murmures dans l'ombre témoignaient de la frustration et de l'incertitude qui régnaient parmi ses membres qui sautillaient entre la loyauté envers Bronze et le Directeur de la guilde.

"Mais je suis ici en tant que représentante de la famille Valthane, avec laquelle nous espérons établir une relation fructueuse et mutuellement avantageuse. Toutefois, si vous êtes intéressé à avoir une discussion avec les Énigmatiques, je peux en avertir celle-ci et arranger un rendez-vous." Termine-t-elle doucement.
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Sédition nocturne

L'oreille tendue, Hayato écoutait l'intruse avec une attention redoublée. Cette femme semblait parfaitement entraînée. Dans la simili pénombre, l'épéiste aurait juré faire face à une statue, tant ses traits ne se déverrouillaient pas d'un iota, à mesure de leur discussion. Seule la demande d'allégeance de la famille Valthane auprès de son clan sembla la tirer de son manque de réactivité. À sa grande surprise, elle sembla abonder dans son sens. Il tenta de son mieux de le cacher, mais le bretteur n'était sans doute pas aussi doué qu'elle en la matière. Ce fameux Talkan l'avait il anticipé à ce point ? Et si oui... il avait malgré tout envoyé la jeune émissaire à sa rencontre ? À quel point détestait-il rester sous les ordres X-Bronze ? Ou, tout du moins, à tel point voulait-on qu'Hayato en soit persuadé ? Ne se voir offrir aucune résistance éveilla les soupçons du chef de clan, mais il ne pipa mot et se contenta de hocher de la tête. Il se permit même de sourire à nouveau, avant de répondre :


- Très bien, « Nameless », je prends bonne note de la nuance qu'apporte votre commanditaire à la notion de sécurité. C'est égalemetn la deuxième fois que vous laissez sous-entendre que vous attendez quelque chose de moi. Vous savez attiser ma curiosité...


Après un bref instant de silence, l'épéiste reprit d'une voix posée :


- Mais restons professionnels, pour le moment. J'aimerais effectivement obtenir une entrevue avec les Énigmatiques. Malgré leur lien avec le clan Darkness, je pense pouvoir leur offrir une autre option sérieuse à envisager. Pourriez-vous passer le mot à votre supérieur, Nameless ?


Hayato en était certain, à présent, cette femme était une Énigmatique. Mais elle semblait lui cacher quelque chose. Il n'en était pas sûr, n'avait rien d'autre que son expérience et ses tripes pour lui susurrer à l'oreille que quelque chose ne collait pas totalement. Il lui manquait un élément, mais son esprit un rien trop lent peinait à faire le lien. Pour l'heure, il préféra recentrer le débat. Si les assassins du clan Darkness pouvaient lui causer de sérieux problèmes, la résolution de ce conflit par les mots ou les armes ferait l'objet d'une discussion future. En ce moment présent, un tout autre enjeux était négocié :


- Mais nous nous égarons. Vous êtes venus pour me parler de la famille Valthane, et je vous fais digresser. Mes excuses, Nameless. Comme je vous le disais, je ne suis pas contre nouer une alliance et affaiblir mes ennemis. C'est d'ailleurs « le fin du fin » de soumettre l'ennemi sans croiser le fer. Pour autant, j'ai un timing serré à respecter, et de multiples facettes de notre plan sont à mettre en branle, dès demain matin. Enfin, je ne suis pas homme à perdre mon temps. Aussi...


Il hésita un bref instant, tandis que sa main attrapait son menton d'un air songeur. Il n'avait pas le choix, il avait besoin d'elle. Il soupira un bref instant, avant de lancer :


- Matsuri. Je sais que tu nous écoutes. Tu peux te montrer.


Un instant, il crut s'être trompé. Seul le silence répondit à son appel. En réalité, il était toujours incapable de repérer la kunoichi, tant son art de la dissimulation et son aura transparente mettaient à mal ses sens. Il s'agissait presque d'un coup de bluff car, en quelques jours, Hayato avait malgré tout compris le péché mignon de la ninja : sa curiosité sans limite. Soudain, un bruissement de tissu et un raclement de gorge s'élevèrent, à l'autre bout de la pièce. Depuis ombres mouvantes, se dessina une silhouette familière au faciès indéchiffrable. La jeune femme aux cheveux gris s'inclina légèrement.


- J’imagine que tu as entendu la teneur de la lettre et de notre discussion?
- Oui. Avant que vous le demandiez, j'ai également un escargophone emprunté au clan Wave.


L'ex vagabond ricana quelques instants, avant de finir par soupirer.


- Je vais sans doute devoir m'habituer à ce genre d'intrusion à l'avenir, n'est ce pas ?
- Pourquoi poser une question dont vous avez déjà la réponse ? piqua la jeune femme. Je pensais que vous n'aimiez pas perdre votre temps ?
- Touché, concéda l'épéiste.


Le chef de clan secoua la tête, avant de se racler la gorge. Il recentra son attention sur l'intruse, avant d'enfin éloigner sa main de son sabre. Il reposa la garde de celui-ci sur son épaule, dans un bruit métallique, avant d'ordonner :


- Si vous le voulez bien, nous avons un coup de fil à passer. Je gage que le patriarche de la famille Valthane n'est pas couché, et que vous avez son numéro ? J'aurais quelques questions à lui poser, mais je ne peux malheureusement pas me déplacer pour le moment. Vous avez étés vifs pour nous débusquer. Nous espérions passer inaperçu pendant encore quelques jours... aussi nous devrons nous contenter d'une première mise en relation par Den Den Mushi.


Avec un geste de la main, Hayato invita Matsuri à rejoindre Nameless, puis à lui confier son escargophone. Le guerrier s'installa confortablement, avant de lancer d'une voix calme :


- Je vous en prie, Nameless. Une discussion à quatre me semble nécessaire.


KoalaVolant
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